Euro : monnaie unique, opinions plurielles
Un peu moins d'un an après la mise en place de la monnaie unique, les résultats de l'enquête menée par Ipsos pour l'Observatoire Thalys International montrent que la période d'adaptation n’est pas terminée. Plutôt acquis à son retentissement économique et se laissant gagner par les avantages pratiques, les Européens soulignent encore les difficultés rencontrées et hésitent entre restauration de leur ancienne monnaie et franche adoption de l’euro.
La perception de l'euro chez les Européens reste dominée par une vision macro-économique : la monnaie unique est encore fortement synonyme de développement des échanges entre pays membres et de rayonnement économique du Vieux Continent. Toutefois, les Européens se laissent peu à peu gagner par le caractère pratique du tout euro, même si les difficultés anticipées avant son arrivée ne se sont pas dissipées depuis sa mise en place.
Les clivages d'opinion entre les pays sont toutefois importants.
France : l'eurodynamomètre à zéro
En France, la déception est à la hauteur de l'optimisme que l'on mesurait il y a un an et demi. Si en mai 2001, les deux tiers des Français estimaient que la monnaie unique allait contribuer "au développement des échanges économiques entre les pays membre", ils ne sont plus que 35% à être de cet avis aujourd'hui (- 29 points). Seuls 41% des personnes interrogées pensent que l'euro a favorisé le rapprochement des Européens, contre 51% auparavant. Plus surprenant, à peine un Français sur deux estime à présent que "l'euro facilite la comparaison des prix des produits entre les pays" (contre 71%).
Les autres indicateurs sont également orientés à la baisse. Aujourd'hui, un tiers des Français pense que l'euro facilite "les voyages dans les autres pays européens" (contre 58% en mai 2001), "le développement des achats dans les autres pays de la zone" (contre 60%) ; seuls 12% croient que la monnaie unique facilite le développement des achats sur le net", contre quatre personnes sur dix de cet avis lors de la dernière vague.
Même si une large majorité des Français juge que l'euro va contribuer à rendre l'Europe plus forte face au reste du monde (72%), près d'un sur deux choisirait s'il en avait la possibilité le retour au franc (47%, contre 51% d'avis contraire).
Hollande : la nostalgie du florin
Tout en découvrant à l'euro des vertus qu'elle ne soupçonnait pas, la Hollande est la seule nation qui choisirait majoritairement le retour à son ancienne monnaie (53% de nostalgiques du florin). La situation est toutefois sans commune mesure avec la France. Si le tiers des Hollandais regrette "les difficultés créées par l'euro" (+11 points), ceux qui pensent que l'euro contribue à la naissance d'une "culture commune entre les Européens" sont un peu plus nombreux qu'auparavant (19%, +8 points). Surtout, en Hollande plus qu'ailleurs, on découvre à l'usage les facilités apportées par l'euro : pour la comparaison des prix des produits (87%, + 29 points), les voyages (76%, +44 points), le développement des achats dans les autres pays de la zone (56%, +42 points) et sur internet (43%, +35 points).
L'Euroconviction gagne les Italiens et les Espagnols
En retrait par rapport à l'ensemble des Européens, les Espagnols et les Italiens se laissent toutefois gagner par la conviction que l'euro peut aussi avoir des avantages pratiques. En mai 2001, ces deux pays étaient sceptiques quant au développement des échanges économiques entre pays grâce à l'euro ; les Espagnols se montraient également peu convaincus de son impact sur leurs comportements d'achat et leurs déplacements à l'étranger (tous les items proposés recueillaient des scores inférieurs à 30%). Aujourd'hui, une courte majorité d'Espagnols pense que l'euro facilite les voyages (51%, + 24 points), point de vue partagé par 39% des Italiens (+17 points). Près de la moitié s'accorde sur le fait que la monnaie unique facilite la comparaison du prix des produits (43% des Espagnols, +16 points et 49% des Italiens, +15 points). Un peu en retrait par rapport à la moyenne européenne, 38% des Italiens et 36% des Espagnols y voient aussi un argument de développement des achats dans la zone euro. Cette relative réserve doit vraisemblablement être rapprochée de leurs habitudes de déplacement à l'étranger car ils sont, de tous les pays interrogés, également les plus sédentaires : 62% des Espagnols et 53% des Italiens ne quittent en effet jamais le territoire national (contre 34% de l'ensemble des Européens).
La circonspection allemande et belge s'efface au profit d'un europtimisme prononcé
Relativement circonspects quant aux avantages de l'euro, sévères sur les inconvénients en mai 2001, le bilan de la mise en place de l'euro pour les Allemands et les Belges s'avère positif aujourd'hui. Tout en maintenant leur opinion sur les difficultés engendrées, les bénéfices de la monnaie unique leur apparaissent plus saillants et positionnent les deux pays en tête des europtimistes : la moitié des Allemands et des Belges s'accordent sur l'impact positif de l'euro sur les échanges économiques (51% des Allemands, + 14 points et 54% des Belges, + 13 points) ; la majorité pense également que l'euro contribue à rapprocher les Européens.
Leur perception de l'influence de la monnaie unique sur la création d'une culture commune recueille des scores supérieurs à la moyenne européenne (28% en Belgique (+9 points) et 26% en Allemagne (+9). De toutes les nations testées, la Belgique est encore celle qui regrette le moins son ancienne monnaie, 71% des interviewés du plat pays ne souhaitant pas revoir le franc belge.
Les Britanniques un peu moins réticents
Il faut traverser le Channel pour mesurer les évolutions d'opinion les plus marquées. Un quart des Britanniques est convaincu de l'apport de la monnaie unique dans la création d'une culture commune (+7 points). Plus globalement, les anticipations négatives mesurées en mai 2001 déclinent assez nettement, les Britanniques se plaçant aujourd'hui, sur toutes les propositions au niveau de la moyenne européenne : 38% croient désormais aux vertus de l'euro sur les échanges économiques (+16 points) et sur le rapprochement entre les Européens (+ 9 points). Parallèlement, ils associent encore fortement euro et difficultés (44% versus 40% en mai 2001) et doutent plus que l'ensemble des Européens de son impact sur le rayonnement international de l'Europe (49% le pensent alors que la moyenne européenne s'établit à 68%). Synthèse de ces perceptions en dents de scie : si une part non négligeable de Britanniques (39%) serait favorable à l'adoption de l'euro, une majorité d'entre eux (58%) ne souhaite pas encore lâcher la proie pour l'ombre.
Télécharger la synthèse détaillée de l'étude (PDF - 428 Ko)
Sommaire:
- Les habitudes de déplacement à l'étranger
- Impact de l'Euro sur le rapprochement et les échanges
- Les facilités développées grâce à la monnaie unique
- L'impact de l'Euro sur la mobilité et la consommation
- Le caractère incitatif de l'Euro sur la mobilité et la consommation " Focus Royaume-Uni "
- Le souhait de revenir à l'ancienne monnaie ou de passer à l'Euro
- Perception de l'impact de l'Euro sur la puissance internationale de l'Europe