Présidentielle 2022 | 1er tour : comprendre le vote des Français

L'enquête Ipsos & Sopra Steria réalisée pour france•tv et radiofrance auprès de 4000 électeurs du 6 au 9 avril dévoile les principales raisons de l'abstention, les motivations et les déterminants du vote, la perception pour les électeurs des différents candidats et de leur campagne électorale. Dans la plupart des cas, les jugements sont sévères.

Présidentielle 2022 - Les analyses des experts Ipsos

 

Les raisons de l'abstention

Plus d'un électeur sur quatre n'a pas voté au premier tour de l'élection présidentielle. Les abstentionnistes évoquent un faisceau de raisons, sans qu'aucune ne se détache réellement. Pour 28%, notamment les plus âgés, "les candidats disent les mêmes choses que lors des élections précédentes, il n'y a rien de nouveau dans leurs propositions". Environ un sur quatre regrette que "les candidats ne soient pas à la hauteur de la fonction" (26%), que "les jeux sont déjà faits, il n'y a pas de suspens sur le résultat" (26%), ou "qu'aucun candidat ne correspond à leurs idées" (24%). Un sur cinq pense encore que "les candidats ne parlent pas assez des sujets qui les préoccupent", 18% "que le candidat dont ils sont le plus proche n'a pas de chances de se qualifier pour le second tour", 16% sont encore d'avis que "cette élection n'aura pas d'impact sur leur vie ou la situation du pays", 16% également déclare "ne pas s'intéresser à la politique de manière générale" et 12% "n'étaient pas disponibles le jour du vote".

Les motivations du vote

Les deux tiers des votants ont choisi leur candidat "avant tout par adhésion" (66%), pour un tiers de vote "par défaut" (34%). Le vote par adhésion a tout particulièrement concerné l'électorat d'Éric Zemmour (81% de vote d'adhésion pour 19% de vote par défaut), un peu moins celui de Jean-Luc Mélenchon (59% / 41%). Les électeurs de Jean-Luc Mélenchon sont d'ailleurs, avec ceux de Yannick Jadot, les plus nombreux à s'être décidés dans les derniers jours, pour respectivement 29% et 33% d'entre eux. Du côté d'Éric Zemmour en revanche, deux sur trois (64%) avaient fait leur choix "il y a plusieurs mois". C'est aussi le cas de 61% des électeurs d'Emmanuel Macron, de 56% des électeurs de Marine Le Pen, pour globalement près d'un électeur sur deux (48%). Le choix de vote cette année a été un peu plus précoce qu'en 2017.

Si les électeurs ont majoritairement voté pour soutenir le candidat de leur choix, ils l'ont souvent fait en pensant au pouvoir d'achat. Cité par six personnes sur dix (58%) comme l'un des trois enjeux qui a le plus compté au moment de choisir pour qui voter, le pouvoir d'achat a été, au-delà des clivages sociodémographiques et politiques, le sujet n°1 pour toutes les catégories d'âge à partir de 25 ans, au sein des CSP- (70% de citations) mais aussi des CSP+ (57%), dans l'électorat de Jean-Luc Mélenchon (63%), de Marine Le Pen (69%) comme dans ceux d'Emmanuel Macron (54%) ou de Valérie Pécresse (54%). Il n'y a que dans l'électorat de Yannick Jadot où ce n'est pas le cas, avec "l'environnement" pour enjeu principal (84% de citations), et dans l'électorat d'Éric Zemmour, où "l'immigration" (72%) a été le premier moteur du vote.

Le pouvoir d'achat a écrasé les autres sujets, sans les éclipser tout à fait. L'immigration notamment, qui occupe la deuxième place dans la hiérarchie des enjeux du vote (27% de citations), la deuxième place également dans l'électorat de Marine Le Pen (55%) et de Valérie Pécresse (36%). Viennent ensuite presque au même niveau "le système de santé" et "l'environnement", cités chacun par 26% des électeurs, la question des "retraites" (25%), la "délinquance" et les "inégalités sociales", à 20% chacun. Les inégalités sociales sont à la deuxième place dans l'électorat de Jean-Luc Mélenchon (51% de citations). La hiérarchie est moins nette chez les soutiens d'Emmanuel Macron avec "la guerre en Ukraine" en deuxième position (31%, pour 15% de citations sur l'ensemble des votants), juste devant la santé et l'environnement, à 29% chacun.

La perception des candidats

La majorité des électeurs de Jean-Luc Mélenchon (53%), de Yannick Jadot (59%), de Marine Le Pen (52%) et d'Éric Zemmour (63%) ont choisi leur candidat parce "qu'il ou elle veut vraiment changer les choses". Emmanuel Macron a quant à lui d'abord été choisi pour sa "stature présidentielle" (71% de citations), tandis que les électeurs de Valérie Pécresse l'ont choisi en premier lieu pour son "bon projet" (42%). En deuxième choix, les électeurs de Yannick Jadot saluent également son projet (50% de citations), ceux de Marine Le Pen et de Jean-Luc Mélenchon louent la capacité de leur candidat à "bien comprendre les problèmes des gens" (respectivement 42% et 45%), du côté d'Emmanuel Macron on se félicite de sa capacité à "faire face à une crise majeure" (65%), tandis qu'on a aussi voté Éric Zemmour parce "qu'il tiendra ses engagements" (40%).

Mais en même temps, la majorité des électeurs - majorité relative en ce qui concerne Emmanuel Macron - pense que la situation de la France "se dégradera dans les années qui viennent", quel que soit le candidat élu. La proportion varie de 44% de cet avis si c'est Emmanuel Macron, à 69% si c'est Éric Zemmour. A noter que si 50% des électeurs pensent que les choses empireront si Marine Le Pen est élue, ils étaient 58% de cet avis en 2017. Pour Emmanuel Macron, la proportion de personnes jugeant que la situation se dégradera s'il était réélu a augmenté par rapport à 2017, passant de 37% à 44%.

Tout le monde ne voit tout de même pas l'avenir en noir et trois Français sur dix pensent au contraire que la situation de la France s'améliorera si Marine Le Pen est élue (pour 20% "ni l'un ni l'autre") : ses électeurs évidemment, mais aussi une bonne partie (58%) de l'électorat d'Éric Zemmour, 13% de l'électorat de Jean-Luc Mélenchon et 12% de l'électorat de Valérie Pécresse. On est "seulement" à 21% qui pensent que la situation s'améliorera si Emmanuel Macron est réélu, soit 69% chez ses électeurs, 16% des électeurs de Yannick Jadot et 12% des électeurs de Valérie Pécresse. Entre amélioration et dégradation, 35% penchent plutôt pour le "ni l'un ni l'autre" en ce qui concerne le Président sortant.

Le rapport de force enregistré quant à l'évolution de la situation du pays ressemble à celui mesuré par rapport à l'évolution de sa situation personnelle. Quel que soit le nom du prochain Président, une majorité de Français - majorité relative pour Emmanuel Macron et Marine Le Pen - pensent que leur situation personnelle se dégradera dans les années qui viennent. Au contraire, un peu plus d'un Français sur quatre (27%) pensent que leur situation s'améliorera si Marine Le Pen est élue, pour 14% de cet avis si c'est Emmanuel Macron. Mais là encore la part de Français choisissant le "ni l'un ni l'autre" est plus importante pour le Président sortant : 41%, contre 29% si c'est Marine Le Pen.

Comme concernant la situation du pays, le détail des avis selon le vote au premier tour fait apparaître du soutien pour Marine Le Pen au sein des électorats d'Éric Zemmour (52% pensent que leur situation personnelle s'améliorera si elle est élue), de Jean-Luc Mélenchon (14%) et de Valérie Pécresse (14%).

La perception de la campagne électorale

Deux Français sur trois (68%) ont jugé la campagne pour l'élection présidentielle "pas intéressante", pour 32% "intéressante". Les jugements sont un peu plus sévères qu'en 2017 (on était à 64% / 36%), même si on reste dans le même ordre de grandeur.

Pour la majorité, Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon sont les seuls candidats à avoir fait une "bonne campagne" (selon respectivement 57% et 50% des personnes interrogés, pour 24% et 29% de "mauvaise campagne"). Les jugements sont beaucoup plus sévères en ce qui concerne les campagnes d'Éric Zemmour, que 29% des Français jugent "bonne" pour 52% "mauvaise", d'Emmanuel Macron (20% "bonne" pour 59% "mauvaise"), de Yannick Jadot (20% / 50% avec un taux de Français "qui n'en savent pas assez pour juger" supérieur à la moyenne) et Valérie Pécresse, en dernière position sur cet indicateur (13% "bonne campagne" pour 68% "mauvaise"). A noter que pour Emmanuel Macron, la perception est mitigée y compris dans son propre camp : "seulement" 54% de ses électeurs jugent que sa campagne a été bonne, ils sont 55% de cet avis pour celle de Marine Le Pen. Cette impression en demi-teinte sur la campagne de son candidat s'observe aussi dans l'électorat de Valérie Pécresse et, à un degré moindre, dans celui de Yannick Jadot.

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Présidentielle 2022 - séparateur

Fiche technique : enquête menée par Ipsos & Sopra Steria pour france•tv et radiofrance auprès de 4000 personnes inscrites sur les listes électorales, constituant un échantillon représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, interrogées du 6 au 9 avril 2022.

 

Présidentielle 2022 avec Ipsos & Sopra Steria, France TV, Radio France, France Médias Monde, LCP/Public Sénat et Le Parisien-Aujourd'hui en France
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