Affaire Lewinsky : l'opinion américaine et mondiale n'est pas indignée
En dépit du retentissement médiatique de cette affaire, une nette majorité des Américains soutient le président des Etats-Unis. Dans la plupart des pays développés, l'opinion est également indulgente à son endroit.
L'opinion publique américaine et internationale ne tient pas rigueur à Bill Clinton de ses frasques sexuelles supposées. La dernière enquête réalisée par le Pew Research Center for the people and the press auprès de 1189 Américains du 29 juillet au 2 août révèle un sentiment d'indulgence qui contraste avec le tintamarre médiatique provoqué par l'affaire Lewinsky aux Etats-Unis. Seulement 29% des personnes interrogées disent suivre de "très près" les développements de cette histoire croustillante. Les aventures de Monica passionneraient moins les Américains qu'une récente fusillade au Capitole ou encore la vague de chaleur qui submerge actuellement le pays.
Le témoignage de Monica Lewinsky sur la relation sexuelle d'un certain type qu'elle aurait eue avec Bill Clinton n'atteint nullement la popularité du président des Etats-Unis. Alors que la Maison Blanche vit dans la tourmente, la manière dont son chef effectue son travail est approuvée par 63% de ses compatriotes contre seulement 28% de désapprobation. Les Américains commencent visiblement à être agacés par l'énorme retentissement politico-médiatique de cette affaire. L'accusation selon laquelle Clinton aurait menti sous serment à propos de sa liaison avec l'ancienne stagiaire de la Maison Blanche n'est jugée "très importante" que par 27% des sondés et "assez importante" par 21%. Le zèle du procureur Kenneth Starr est très contesté: 70% des Américains lui reprochent d'accorder "plus de temps que nécessaire" à ce dossier. Sans croire d'ailleurs qu'il parviendra à ses fins puisque 55% prévoient que Starr ne réussira qu'à "embarrasser" le président sans aboutir à sa destitution.
Les Américains ne se font pourtant guère d'illusion sur l'innocence présidentielle. 70% pensent que Bill Clinton a effectivement eu une relation sexuelle avec Monica Lewinsky et 66% qu'il a menti sous serment à ce sujet. Mais ils prévoient que leur président persistera à nier ses fautes. Et même si preuve était faite que Clinton est coupable de mensonge sous serment, seulement 38% estiment qu'il devrait être destitué contre 58% d'opinions inverses. Une large majorité (60%) de personnes interrogées préféreraient que Clinton confesse qu'il avait menti pour protéger sa famille, auquel cas l'affaire en resterait là.
L'opinion internationale n'est pas plus secouée d'indignation. Une enquête réalisée dans pas moins de 32 pays par Angus Raid Group et publiée par le quotidien canadien The Globe and Mail conjointement avec la chaîne de télévision CTV montre d'abord la notoriété de l'affaire Clinton-Lewinsky.
Son taux de connaissance dépasse les 90% dans 21 des 32 pays sondés. Le record est atteint en Allemagne (99%), le chiffre le plus bas (67%) étant enregistré en Chine (l'enquête n'a été effectuée dans ce pays que dans les zones urbaines). Dans 22 pays sur 32, l'opinion estime que Bill Clinton devrait rester à son poste même s'il est convaincu d'avoir eu une relation sexuelle avec Monica Lewinsky. Le soutien au président américain est maximal en Italie (81%), au Danemark (80%), en France (79%), en Norvège (75%) ou encore en Belgique (73%). Les partisans d'un maintien en place de Clinton sont 60% aux Etats-Unis. A l'inverse, l'opinion est plus sévère dans les pays du tiers-monde: 72% des Indonésiens, 62% des Indiens (seul les membres de "l'élite urbaine" ont été interrogés dans ces deux pays), 54% des Turcs et 53% des Malaysiens sont favorable à la démission du président pêcheur.
Le sort du Bill Clinton dépend néanmoins sensiblement plus des sentiments de l'Américain moyen que de ceux de l'homme de la rue de Djakarta. La menace d'impeachment qui plane au-dessus de la Maison Blanche est singulièrement affaiblie par l'absence d'une réelle indignation de la part de l'opinion publique aux Etats-Unis. Cet état de fait constitue un sérieux atout pour le président Clinton à la veille de sa déposition, le 17 août, devant le Grand jury fédéral.