"Alliance": l'électorat de droite est unitaire mais quelque peu sceptique
L'immense majorité des électeurs de l'UDF et du RPR souhaitent que ces deux formations se fondent dans un parti unique. Mais "l'Alliance" est accueillie avec scepticisme par une forte minorité.
La création de "l'Alliance", annoncée le 14 mai par François Léotard et Philippe Séguin, n'a enthousiasme guère les Français, selon une enquête Ipsos-le Point. Si elle a surpris la classe politique, cette initiative de la droite, se heurte à "l'indifférence" de plus de quatre électeurs sur dix. Un cinquième des personnes interrogées manifestent leur "scepticisme" tandis qu'une fraction égale réagit avec "espoir".
Dans l'électorat UDF-RPR, cette dernière réaction arrive en tête mais avec une simple majorité relative (43%). Au total, parmi les sympathisants de droite, 54% accueillent positivement le projet commun de Léotard et Séguin tandis que 42% y sont hostiles ou indifférents. Les sympathisants du FN se sentent très étrangers à cet événement.
L'efficacité de la démarche est sérieusement mise en doute par les Français. Une majorité relative pense certes que l'Alliance "permettra de mettre en place un nouveau projet qui réponde aux attentes des électeurs UDF et RPR". Un voeu partagé par les deux-tiers des sympathisants de droite. Mais une majorité de personnes interrogées déclarent ne pas croire que cette initiative aura pour effet de "réduire l'influence du Front national", de "renouveler les dirigeants de l'opposition", de "mettre fin" à ses divisions ou encore de... gagner "aux prochaines élections législatives". Seulement un électeur de droite sur deux environ croit à l'efficacité de l'Alliance pour atteindre ces quatre objectifs.
Et pourtant, l'électorat de droite aspire profondément à l'unité: 86% des sympathisants UDF-RPR souhaitent que ces deux formations fusionnent à terme "pour ne plus former qu'un seul parti". Une simplification du paysage politique approuvée par 60% des Français. Cette volonté unitaire est particulièrement répandue chez les agriculteurs (74%), les artisans, commerçants, chefs d'entreprise (69%) ainsi que dans la tranche de revenus la plus élevée (73%).
Reste à savoir comment "l'Alliance" devrait se définir idéologiquement. Sur cette question décisive, les avis sont partagés. Une majorité relative de Français pense que cette structure de droite devrait être "d'abord libérale" - avec toute l'ambiguïté qui s'attache à ce terme en France - mais aussi nombreux sont ceux qui estiment qu'elle doit s'afficher "centriste" ou "gaulliste". Les jeunes électeurs imaginent volontiers une droite unie libérale tandis que les plus vieux se réfèrent plus souvent au gaullisme. L'étiquette libérale attire les agriculteurs, artisans, commerçants et chefs d'entreprise. L'image centriste séduit relativement plus les cadres supérieurs. Le label gaulliste garde enfin une certaine audience chez les employés et les retraités.
A droite, une majorité relative privilégie la définition libérale à la fois chez les sympathisants de l'UDF et chez ceux du RPR. Mais, comme on pouvait s'y attendre, les premiers placent en seconde position le centrisme tandis que les seconds choisissent le gaullisme. C'est dire si l'Alliance devra savoir faire sa place à des sensibilités politiques et historiques diverses.
Qui devrait diriger l'Alliance ? On sait que ses créateurs ont souhaité dédramatiser la question en suggérant le principe de présidences tournantes. Aux yeux des Français, aucune personnalité ne s'impose vraiment pour la première présidence. Avec 22%, Philippe Séguin ne devance que de deux points Edouard Balladur. Dans l'électorat de droite, c'est au demeurant l'ancien premier ministre qui tient la corde. Il doit cet honneur au petit faible que lui manifestent les sympathisants UDF. Les proches du RPR mettent tout juste en tête le président de ce parti, mais presque aussi nombreux sont ceux qui lui préféreraient Edouard Balladur ou même Alain Madelin. Les résultats de cette question sont enfin cruels pour François Léotard. Les initiateurs de l'Alliance ne sont nullement assurés de tirer profit de cette opération.