Apero caouette contre Apéri frais : les nouveaux comportements des Français à l'apéritif

Si l’équilibre alimentaire est une préoccupation grandissante chez les Français, le moment de l'apéritif, festif par excellence, instant de "relâche" autorisé, faisait jusqu'à présent figure d'exception. L'enquête réalisée par Ipsos pour APERIVRAIS montre pourtant que ce n'est plus tout à fait le cas. Les Français, adeptes de l'apéritif dînatoire, déclarent de plus en plus faire attention à la fraîcheur, l'originalité et la diversité des produits proposés.

Auteur(s)
  • Jean-François Doridot Directeur Général Public Affairs
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L'apéritif, un moment convivial qui fait régulièrement office de repas pour certaines catégories de population

Premier enseignement majeur de l'enquête : une proportion non négligeable de Français, notamment parmi les jeunes, transforme régulièrement l'apéritif en véritable repas, ce qui a des implications certaines sur le contenu de cet apéritif puisqu'il n'est plus seulement destiné à n'être qu'un encas précédant une pitance plus conséquente. Ainsi, 30% des Français organisent ou participent à des apéritifs qui font en même temps office de repas au moins une fois par mois. Un chiffre global qui masque de fortes différences selon l'âge de la personne interrogée : près d'un jeune de moins de 35 ans sur deux (47%) en organise ou y participe régulièrement, contre seulement 22% des plus de 35 ans. Cette habitude est particulièrement développée chez les 15-19 ans (51%) et surtout chez les 20-24 ans (59%), pour décliner ensuite régulièrement selon l'âge de la personne. Il semble donc y avoir un véritable effet générationnel concernant les apéritifs dînatoires. Ce phénomène pourrait s'accentuer à l'avenir dans la mesure où les jeunes sont susceptibles de poursuivre cet usage dans le futur et ainsi de modifier durablement leurs coutumes alimentaires liées à cet événement.

Si ce goût pour les apéritifs dînatoires est plus masculin, puisque 37% des hommes en organisent ou y participent régulièrement contre 24% des femmes, c'est surtout la catégorie socioprofessionnelle qui semble être un facteur clivant après l'âge. Ainsi, plus on dispose de revenus élevés ou d'un niveau culturel élevé, plus on pratique régulièrement les apéritifs dînatoires.

Par ailleurs, des études récentes montrent que l'apéritif – et particulièrement l'apéritif faisant office de repas – est souvent associé à la notion de convivialité. L'apéritif apparaît avant tout comme un moment de plaisir entre gens que l'on apprécie, où les produits proposés, tant dans leur composante que dans leur abondance, se substituent peu à peu non seulement au hors d'œuvre mais au repas lui-même, prolongeant ainsi cet instant de détente.  

 

L'apéritif, un instant aujourd'hui concerné par la quête d'équilibre alimentaire

Si l'apéritif s'apparente de plus en plus à un repas, se pose alors la question de l'équilibre alimentaire, dans un contexte de préoccupation grandissante à l'égard de la santé, du bien-être et du « bien-manger ». Des enquêtes sur le thème de l'alimentation et de la santé ont ainsi montré que le lien entre alimentation et santé est désormais un fait acquis pour la plupart des Français, qui tâchent dans la mesure du possible de surveiller quelque peu ce qu'ils mangent.

La question de l'équilibre alimentaire se pose avec d'autant plus d'acuité que l'apéritif est rarement synonyme de diététique : petits gâteaux salés, charcuterie, alcool et autres mets fréquemment proposés à cette occasion régalent les papilles gustatives mais peuvent s'avérer néfastes pour le reste du corps. Ce constat ne fait aucun doute pour une très large majorité de Français : ainsi 84% d'entre eux estiment que « souvent, ce que l'on mange à l'apéritif n'est pas équilibré et mauvais pour la ligne », une nette majorité (58%) en étant même « tout à fait » convaincue.

Pour autant, l'apéritif n'échappe pas à la quête d'équilibre alimentaire de plus en plus prégnante dans la société actuelle. Les Français font de plus en plus attention à ce qu'ils mangent, y compris à l'apéritif. Ainsi, 62% des interviewés admettent faire plus attention qu'il y quelques années au fait de manger des aliments sains et équilibrés à ce moment là, dont 24% qui disent même y faire « beaucoup » plus attention. Sans surprise, ce sont surtout les femmes, traditionnellement plus obsédées par les régimes, qui y prêtent une attention accrue (68% dont 29% « beaucoup plus », contre 55% des hommes dont 18% « beaucoup plus »). L'intérêt pour ce sujet augmente également avec l'âge, au fur et à mesure que les désagréments liés à une alimentation déséquilibrée se font sentir (prise de poids plus conséquente, plus grande difficulté à digérer etc.). Ainsi, 40% des 15-19 ans déclarent y prêter plus d'attention, contre 49% des 20-24 ans, 64% des 25-34 ans et entre 66% et 69% des 35-69 ans. Notons également que l'intérêt pour une alimentation équilibrée croit avec le niveau de revenu : il va sans dire que ce genre de préoccupation touche davantage les personnes qui ont les moyens de diversifier leur alimentation.

Comment dès lors concilier la convivialité associée à l'apéritif, une des dernières « chasse gardée » du plaisir sans contrainte, et la quête d'équilibre alimentaire à laquelle sont attachés les Français ? D'autant que les enquêtes portant sur la santé alimentaire mettent en évidence les difficultés ressenties par une frange non négligeable de la population quand il s'agit d'avoir une alimentation saine et équilibrée, non pas seulement au regard du coût que cela peut représenter mais aussi en termes de satisfaction familiale (contenter tout le monde) et individuelle (se faire plaisir malgré tout), de temps (prendre du temps pour incorporer des aliments équilibrés) et surtout d'information (assimiler les principes fondamentaux d'une alimentation saine, souvent à contre courant de nombreuses idées reçues).

 

Des consommateurs en quête de renouveau : un manque d'originalité qui coexiste avec une envie de fraîcheur

Le hiatus entre plaisir de l'apéritif et équilibre alimentaire n'est pas insurmontable, le tout étant de diversifier les produits consommés à cette occasion et d'y incorporer notamment des produits frais. Pour autant, ceci ne doit pas conduire à annihiler le plaisir associé à l'apéritif en assignant à ce moment privilégié des contraintes trop fortes en matière de santé et d'équilibre alimentaire.

Aujourd'hui, les Français ont très majoritairement le sentiment que dans le domaine de l'apéritif, il n'y a rien de nouveau sous le soleil, depuis bien longtemps. Ainsi, les deux tiers (67%) affirment que ce que l'on mange à l'apéritif manque souvent d'originalité, dont plus du tiers (37%) qui se disent « tout à fait d'accord » avec cette proposition, signe sans doute que les éternels biscuits et autres cacahuètes finissent par lasser.

Parallèlement, les Français réaffirment leur attachement aux facteurs « fraîcheur » et « naturel ». Les trois quarts (74%) apprécient le fait de manger des produits frais et naturels à l'apéritif, dont 43% qui y goûtent « tout à fait ». Les femmes et les personnes plus âgées se montrent particulièrement adeptes : 78% des femmes (contre 70% des hommes) et 81% des 45-69 ans (contre 68% des moins de 35 ans) aiment manger des produits frais à l'apéritif. Autant d'affirmations qui témoignent de l'intérêt porté à une diversification de l'alimentation au moment de l'apéritif, dans un probable souci d'équilibre alimentaire.

D'autre part, lorsque l'on demande aux Français ce qu'ils chercheraient d'abord à mettre en avant au moment d'organiser un apéritif, 44% évoquent la fraîcheur, qui arrive donc en première position concernant la totalité des réponses données, devant l'originalité (39%), la diversité (37%), le terroir (35%), l'équilibre alimentaire (31%) et la quantité (10%). Un classement « très serré » qui témoigne de l'intérêt porté par les Français aux produits frais mais qui rappelle aussi leur souci de diversité et d'originalité. Pour un produit, la seule fraîcheur ne suffit donc pas à remporter l'adhésion. Par ailleurs, logiquement, l'équilibre alimentaire arrive assez loin dans la hiérarchie, signe que cet élément, aussi important soit-il, ne doit pas être mis en avant au détriment du plaisir et de la recherche de diversité et d'originalité. S'il arrive aussi loin, alors que les Français ont montré par ailleurs leur fort intérêt pour lui, c'est aussi très certainement parce que beaucoup de nos concitoyens attendent des produits qu'ils soient équilibrés. C'est une qualité très probablement perçue comme devant être intrinsèque au produit.

Notons toutefois que la manière d'appréhender ce qui semble essentiel dans l'apéritif diffère d'une personne à l'autre, selon que cette personne est un homme ou une femme, un jeune ou un moins jeune, un féru d'apéritifs dînatoires ou un dilettante de ce genre de pratiques. Ainsi, la fraîcheur est largement plébiscitée par les femmes, qui la placent en première position (46%), devant l'équilibre alimentaire (40%), les autres aspects de l'apéritif étant relégués assez loin derrière dans le classement. Cette hiérarchie diffère considérablement de celle des hommes, qui placent en première position l'originalité (42%) juste devant le terroir (41%) et la fraîcheur (41%), l'équilibre alimentaire n'arrivant qu'en cinquième position (22% de citations seulement). Le terroir est d'ailleurs l'élément cité en première position par les hommes (24%). Les avis divergent également selon l'âge : les moins de 35 ans plébiscitent largement l'originalité (51%, première position) devant la diversité (47%), la fraîcheur (40%) et l'équilibre alimentaire (27%) arrivant bien derrière. A l'inverse, la fraîcheur est en tête chez les plus de 35 ans (46%), devant le terroir (43%) et l'équilibre alimentaire (34%). Ces résultats sont logiques eu égard à l'intérêt supérieur porté aux notions d'équilibre alimentaire par les personnes plus âgées, quand les plus jeunes cherchent surtout la diversité et se préoccupent peu de leur ligne.

Auteur(s)
  • Jean-François Doridot Directeur Général Public Affairs

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