Baromètre du logement Ipsos / Nexity
Le baromètre Ipsos / Nexity dévoile la perception du grand public par rapport aux problématiques de logement : situation du logement en France, perception de l'évolution des prix, jugements sur l'action du gouvernement en matière de politique du logement.
En 2012, le problème du logement s’est encore aggravé pour les Français
La situation du logement, déjà jugée extrêmement préoccupante en septembre 2011, se serait encore aggravée au cours de l’année écoulée : 83% des Français déclarent en effet qu’il est aujourd’hui difficile de se loger, soit une hausse de 5 points par rapport à l’an dernier. Pis encore, 41% (33% en 2011) d’entre eux jugent qu’il est très difficile de trouver un logement.
Aucune catégorie de population ne semble aujourd’hui épargnée par les problèmes d’accès au logement. Les plus jeunes sont certes toujours perçus comme les principales victimes de cette situation de plus en plus alarmante : la très grande majorité des Français estime ainsi que les étudiants (88%, +8 points vs 2011) et les jeunes actifs (82%, +10) ont du mal à trouver un logement adapté à leurs besoins et moyens. Nombreux sont également ceux (77%, +8) soulignant que les familles sont confrontées aux mêmes difficultés. Et les populations jusqu’alors perçues comme davantage préservées partageraient désormais de plus en plus le même sort : 6 Français sur 10 (62%, + 8) considèrent ainsi que les séniors font face à des problèmes de logement.
Ce diagnostic pessimiste concerne en outre tous les types de logement et encore plus ceux réservés aux populations économiquement et socialement fragiles : 86% des Français trouvent qu’il est ainsi problématique de bénéficier d’un logement d’urgence et 80% d’un logement social. Dans le même temps, beaucoup soulignent les difficultés à trouver un logement en location (71%) ou en accession à la propriété (63%).
Et les Français sont peu enclins à croire à une amélioration de la situation du logement : 36% d’entre eux craignent que les choses se détériorent encore dans les années à venir, 40% estiment qu’il n’y aura pas de changement tandis que seuls 21% prévoient une amélioration. Notons que le pessimisme est encore plus prégnant au sein des classes d’âge les plus jeunes : 47% des moins de 35 ans redoutent en effet une détérioration de la situation contre 33% des 35 ans et plus.
La principale cause de cette situation alarmante reste le prix de l’immobilier
L’écrasante majorité des Français (84%) incrimine l’augmentation des prix dans le secteur immobilier, diagnostic unanimement partagé par l’ensemble de la population. 57% d’entre eux jugent même que les prix ont beaucoup augmenté. Notons que cela s’inscrit dans une hausse générale des coûts des biens de première nécessité : 98% des Français perçoivent une hausse des prix de l’alimentation, 96% de l’essence, 96% de l’énergie, 79% de l’accès aux soins et 70% de l’habillement.
Et cela alors même que le pouvoir d’achat de nombreux Français est limité : 44% d’entre eux déclarent en effet que leurs revenus leur permettent tout juste de boucler leur budget, 19% vivent avec leurs économies et crédits. Ils ne sont qu’un peu plus d’un tiers (36%) à pouvoir mettre de l’argent de côté.
Comme l’année dernière, l’augmentation du prix du foncier reste, pour les Français, la principale raison de cette flambée des prix de l’immobilier : ils pointent ainsi avant tout du doigt une raréfaction et une hausse des prix des terrains (52%). Viennent ensuite l’augmentation des coûts de construction liés aux normes, réglementations et labels (45%), la marge des promoteurs (43%) et la pénurie de logement (34%).
Et les Français ne se montrent guère optimistes quant à une possible amélioration : selon eux, les prix de l’immobilier vont continuer à augmenter, à l’achat et plus encore à la location. Une hausse qu’ils envisagent encore plus importante pour les logements neufs.
- 69% pensent que les prix à l’achat des logements neufs vont encore augmenter, 48% pour les logements anciens ;
- 77% prévoient une hausse des prix à la location des logements neufs, 64% pour les logements anciens.
Les Français partisans d’un encadrement des prix de l’immobilier pour résoudre la crise du logement
En matière de logement, les Français préconisent avant tout un encadrement du marché et prioritairement de limiter la hausse des loyers (50%). Cette mesure est notamment approuvée par les catégories les plus jeunes (56% chez les moins de 35 ans vs 47% chez les 35 ans et plus). Les sympathisants du PS y sont également plus favorables (50%) que les proches de l’UMP (45%). Une limitation de la hausse des prix à l’achat est aussi souhaitée (31%).
Notons qu’une prise en compte de l’impact environnemental des logements apparait également relativement importante : la troisième mesure envisagée est ainsi de rendre les logements plus économes en énergie (29%). Une mesure qui permettrait en outre de réaliser des gains financiers pour les ménages à long terme
Viennent ensuite la construction de davantage de logements (26%) et le fait de favoriser la mixité sociale des quartiers en diversifiant les types de logement (25%).
Le souhait de voir se développer le logement social est plus faible (19%) tout comme la volonté d’accroître la mixité fonctionnelle des quartiers (15%).
Une volonté de changement en matière de politique du logement limitée par la conscience de l’absence de marge de manœuvre du gouvernement
Dans ce contexte morose, pas étonnant que les Français en appellent à une profonde modification de la politique en matière de logement : 76% d’entre eux disent vouloir que le président de la République et le gouvernement changent les choses en profondeur, 10% seulement à la marge, soit 86% souhaitant du changement. Si les sympathisants de gauche sont quasi unanimes sur la nécessité de ce changement en profondeur (80%), cette opinion est également largement partagée par les sympathisants de l’UMP (67%) et du Modem (63%).
En même temps, les Français sont convaincus de la faible marge de manœuvre dont dispose le gouvernement en ces temps de crise, et le réalisme – voire le pessimisme - l’emporte visiblement sur l’idéalisme. Ainsi, seuls 16% pensent que le Président et le gouvernement POURRONT changer les choses en profondeur et 30% qu’ils pourront le faire mais seulement à la marge. A l’inverse, ils sont 51% à penser qu’ils ne pourront pas changer grand-chose. De la même façon, 53% des Français pensent que le Président et le gouvernement ne VONT pas changer grand-chose.
D’ailleurs, la confiance dans le gouvernement en ce qui concerne la politique du logement est relativement faible : seuls 39% des Français lui font confiance pour mener une politique efficace (dont 24% pas du tout confiance), 41% pour une politique inscrite dans la durée, 44% pour une politique compréhensible. C’est la confiance pour une politique juste qui est la plus élevée, accordée par 44% des Français. Sans surprise, cette confiance, très marquée par le clivage gauche/droit, s’avère d’autant plus forte que l’on est proche du PS.
Incarnée par Cécile Duflot et par des mesures plus concrètes, la politique du logement menée par le gouvernement suscite néanmoins quelques espoirs, dans des domaines qui sont toutefois plutôt éloignés des priorités appelées de leurs vœux par les Français.
Certes, le fait que la ministre de l’Egalité des Territoires et du Logement soit membre d’Europe Ecologie Les Verts semble indifférer une majorité de Français, 61% pensant que cela ne change pas grand-chose pour la politique du logement, la confiance qui lui est accordée pour mener une politique qui soit conforme à son étiquette politique est bien réelle.
En effet, c’est avant tout pour développer la construction de logements neufs plus respectueux de l’environnement et pour favoriser la rénovation des logements anciens pour les rendre plus respectueux de l’environnement que les Français font confiance à Cécile Duflot (respectivement 66% et 58%). La confiance pour améliorer l’accès au logement social (52%) d’une part et pour soutenir la construction de logements (51%) d’autre part, quoique légèrement inférieure, est également majoritaire. En revanche, les Français sont assez partagés sur la confiance accordée à Cécile Duflot pour construire davantage de logements étudiants (48% lui font confiance, 43% ne lui font pas confiance) et pour permettre l’accès au logement pour tous (45% contre 49%). Enfin, les Français ne lui font que minoritairement confiance pour favoriser l’accession à la propriété (34%).
Ce sont les 25-34 ans, les cadres et les Franciliens qui se déclarent les plus confiants en Cécile Duflot pour l’ensemble de ces projets. A noter également que les sympathisants du PS ont davantage confiance en elle que ceux des Verts.
Les premières mesures et les projets annoncés par le gouvernement bénéficient d’un bon accueil dans l’opinion, mais les Français semblent résignés quant à la fin de la crise du logement
Les Français jugent plutôt positivement les annonces de Cécile Duflot en matière de politique du logement, mais là encore ils se montrent plutôt mesurés et estiment que leur effet sur la crise du logement sera surtout à court terme ou à la marge, sans croire (ni espérer) qu’elles permettront de résoudre cette crise à long terme.
Dans le détail, ce sont les mesures concernant les logements sociaux qui sont jugées les plus efficaces, dans un contexte où, rappelons-le, 80% des Français pensent qu’il est difficile de trouver un logement social :
- la cession des terrains de l’Etat pour construire des logements sociaux reçoit l’accueil le plus favorable : 74% des Français pensent que ceci permettra de résoudre ou tout au moins améliorer la situation en matière de logement, avec des nuances : 18% pensent que cela va résoudre la crise du logement à long terme, 55% que cela améliorera seulement la situation, dont 34% à court terme et 21% à la marge.
- L’obligation pour les communes de plus de 3500 habitants situés dans des agglomérations de plus de 50 000 habitants d’avoir 25% de logement sociaux au lieu de 20% : 64% de jugement positif dont 14% pensant que cela va résoudre la crise du logement à long terme.
La hausse des prix des loyers est pointée du doigt par les Français et ils sont conséquemment en attente d’un encadrement des prix. Aussi, il n’est pas étonnant qu’une majorité d’entre eux pense que l’encadrement de ces loyers permettra d’améliorer la situation : 33% à court terme et 21% à la marge 13% vont même jusqu’à penser que cela permettre de résoudre la crise du logement à long terme.
Face à un manque d’offre de logements, l’augmentation de la taxe sur les logements vacants et le durcissement des conditions pour en être exonéré serait également plutôt bénéfique aux yeux Français. 11% pensent que cela va résoudre à long terme la crise du logement et 47% que cela améliorera la situation dont 28% à court terme et 19% à la marge.
Le relèvement du plafond du livret A semble en revanche plus anecdotique, peut-être parce que le lien avec le logement social reste méconnu des Français : 45% pense que cela vous résoudre la crise ou du moins améliorer la situation, quand 49% pensent que cela ne va rien changer.
Enfin, concernant les dispositifs du gouvernement précédent qui vont être modifiés, ceux-ci recueillent également des avis plutôt favorables.
L’année dernière, notre baromètre montrait que le prêt à taux zéro était jugé efficace par une majorité de Français (63%). Le projet de modification du gouvernement semble aller dans le sens de la volonté des Français, qui sont 82% à penser que ce nouveau PTZ (recentré sur les ménages les plus modestes et amélioré dans les zones géographiques où les besoins sont les plus importants) serait une bonne chose pour faciliter l’accession à la propriété et 77% pour lutter contre la pénurie de logements. Une mesure qui semble contenter les sympathisants de gauche comme ceux de droite. Ainsi, 87% des sympathisants PS pensent que c’est une bonne chose pour faciliter l’accès à la propriété, pour 75% des sympathisants UMP.
L’inversion de la fiscalité sur la revente de terrains nus constructibles recueille des avis plus mitigés : 47% pensant que ce serait une mesure efficace pour favoriser la construction de logements neufs, 46% que ce ne serait pas efficace, quand 7% ne peuvent se prononcer.
Enfin, dans un contexte de pénurie de logement et de crise économique, le soutien à la construction apparait important aux yeux des Français, avant tout pour préserver l’emploi dans le secteur du bâtiment (86% jugent que c’est prioritaire ou important) mais également pour résoudre la crise du logement (82%). Une large majorité y voit aussi un levier pour favoriser la croissance française : 73%.
A la question, « que faire prioritairement pour favoriser cette construction ? », les Français répondent avant tout aider l’accession à la propriété (35%) devant libérer des terrains appartenant à l’Etat (23%), une mesure qui leur semblait également efficace pour améliorer la situation en matière de logement. Les incitations fiscales à l’investissement immobilier et l’accélération des procédures administratives pour l’obtention des permis de conduire leur apparaissent plus secondaires, respectivement citées par 15% et 14% de la population interrogée.
Les Français sont donc en attente de davantage d’encadrement de la part de l’Etat, sans toutefois aller jusqu’à un financement total de la construction de logement par de l’argent public : 8% seulement le jugeant prioritaire pour favoriser la construction de logements.
Enfin, ils sont assez partagés sur la capacité du gouvernement à atteindre l’objectif de 500 000 constructions par an, sachant que le rythme depuis 2007 est de 370 000 : 47% pensent que c’est possible, quand 50% pensent le contraire.
Dans un contexte particulièrement sombre, les Français se montrent donc plutôt résignés sur la situation du pays : s’ils appellent de leurs vœux un changement profond de la politique du logement pour tenter de sortir de la crise dans laquelle le pays est endigué depuis plus de 4 ans, ils n’ont que guère d’illusion sur une sortie prochaine de la crise. Leur confiance dans le gouvernement est plutôt faible, et si les premières mesures annoncées sont plutôt bien accueillies, ils sont très peu à croire qu’elles suffiront à résoudre durablement la crise du logement.
Fiche technique :
Méthodologie : étude réalisée par téléphone du 14 au 17 septembre 2012 auprès de 959 personnes constituant un échantillon représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus. L’échantillon est construit selon la méthode des quotas (sexe, âge, profession du chef de famille, catégorie d’agglomération et région).