Bon départ pour Raffarin et son équipe
Après quatre mois à Matignon, les Français interrogés par Ipsos pour Le Point et France 2 dressent un premier bilan du gouvernement Raffarin. Majoritairement confiants quant à la réussite des actions entreprises, notamment en matière de lutte contre l'insécurité, ils restent toutefois plus inquiets lorsque l'on aborde les questions économiques et sociales.
Dans l'ensemble, les débuts du gouvernement laissent une bonne première impression : près de 60% des personnes interrogées estiment que le nouvel exécutif a "plutôt pris un bon départ". Les avis sont résolument enthousiastes chez les sympathisants de Droite, beaucoup plus sévères chez les proches de la Gauche parlementaire (57% d'entre eux penchent plutôt pour "un mauvais départ", contre 33% d'avis contraire). Globalement, les Français soutiennent dans une assez large majorité les premiers pas du gouvernement, sans pour autant lui signer de chèque en blanc. Rares sont en effet les personnes estimant que la nouvelle équipe a pris un "très bon départ" (6%). Sur l'ensemble des interviewés et même chez les seuls sympathisants de droite, on préfère largement l'item plus nuancé "plutôt un bon départ" (53% sur l'ensemble de l'échantillon, 80% à droite).
Les quatre mois de pouvoir ont suffi aux Français pour noter une rupture dans la politique menée. Sur les questions économiques et sociales, les deux tiers des interviewés jugent que la politique de Jean-Pierre Raffarin est "différente" de celle de son prédécesseur, contre 26% d'avis contraire. Le changement semble même assez net, puisqu'une personne sur cinq n'hésite pas à qualifier de "très différente" la politique du Premier ministre par rapport à celle de Lionel Jospin.
Ils apprécient en particulier la façon dont le gouvernement s'attaque au problème de l'insécurité. Sur ce thème très attendu (la préoccupation majeure des électeurs pendant la campagne électorale de mai-juin dernier), Raffarin peut compter sur la confiance des trois-quarts des Français, de la quasi-totalité des sympathisants de Droite, et même des deux-tiers des proches de la Gauche. La "création de centres d'éducation fermés pour les mineurs délinquants" est d'ailleurs une mesure jugée "efficace pour réduire la délinquance des jeunes" par deux personnes sur trois, et par la moitié des sympathisants de gauche.
Une majorité de Français fait encore plutôt confiance au gouvernement pour mener à bien "l'assouplissement de la loi sur les 35 heures" (65%, dont 51% des sympathisants de Gauche), la "lutte contre l'immigration clandestine" (61%), "la décentralisation" (59%). Les avis sont plus partagés, mais la majorité croit encore à l'efficacité de l'action gouvernementale dans les domaines de "l'amélioration de fonctionnement de la justice", du "système de santé", ou en ce qui concerne la "modernisation de la fonction publique".
A contrario la défiance est majoritaire lorsque l'on aborde la baisse des impôts et des taxes, la réforme du système de retraite, et surtout les questions relatives à l'emploi et au pouvoir d'achat. Surtout, deux Français sur trois ne font pas confiance au gouvernement pour les actions visant à "réduire les inégalités entre les Français", pour "la lutte contre le chômage", ou "l'augmentation du pouvoir d'achat". Sur ces deux derniers points, la défiance est majoritaire jusque chez les sympathisants de droite.
Au-delà des grands chantiers déjà ouverts par le gouvernement, la hiérarchie des projets du gouvernement pour lesquels les Français aimeraient en savoir plus tranche d'avec les principales thématiques abordées pendant la campagne électorale. En tête des citations, les "solutions envisagées pour sauvegarder les retraites" préoccupent un tiers des personnes interrogées, devant "l'amélioration de la situation des hôpitaux" (31%). En retrait, 15% des sondés (20% des proches de la Gauche) attendent des éclaircissements sur "la réforme du SMIC", et 13% aimeraient en savoir plus sur "la poursuite de la baisse des impôts sur cinq ans". Sur l'ensemble des sujets proposés, les faibles scores enregistrés témoignent toutefois encore de la confiance accordée à la nouvelle équipe gouvernementale.
Cette confiance est certainement en bonne partie due au capital-sympathie dont bénéficie personnellement Jean-Pierre Raffarin. On le juge "proche des préoccupations des Français" (65%), on apprécie son sens de la pédagogie ("il sait bien expliquer ses décisions", 61%), on le trouve "plutôt clair dans ce qu'il fait" (58%). Les traits de caractère qu'on lui associe sont la plupart du temps positifs : près d'une personne sur trois lui reconnaît de la détermination, un sur quatre de l'honnêteté et de l'attention ("honnête", 28%, "proche des gens", 27%). Un sondé sur cinq l'estime encore "modeste", juge qu'il "inspire confiance". Les traits négatifs proposés sont moins souvent choisis pour qualifier l'image Premier ministre. Tout au plus, 14% des interviewés déplorent un côté "démagogue", 13% le trouvent parfois "hésitant", 12% "mou". Au total, les traits positifs l'emportent largement sur les aspects négatifs, sur l'ensemble de l'échantillon comme chez les sympathisants de gauche. Raffarin devrait pouvoir compter sur sa popularité au moment de lancer de grandes réformes. D'ailleurs, la moitié des personnes interrogées lui conseille "d'accepter de ne pas contenter tout le monde, quitte à provoquer des situations de blocage" (surtout les hauts revenus et les catégories socioprofessionnelles supérieures), plutôt que de "repousser des réformes si on ne dispose pas du plus grand nombre" (solution préférée par les bas revenus, les ouvriers et les employés).