Constitution européenne : le soutien à Laurent Fabius révèle les inquiétudes économiques des Français
En déclarant qu'en l'état, il voterait contre l'adoption de la Constitution européenne, Laurent Fabius réoriente un débat qui de plus en plus s'annonce équilibré. Le positionnement de l'ancien Premier ministre, en faveur de la construction européenne mais contre la constitution telle qu'elle est aujourd'hui proposée, redonne de la lisibilité au clivage gauche droite. Pour des raisons sans doute différentes, sa démarche est en tous cas soutenu par la majorité des Français, toutes tendances politiques confondues, et par les trois quarts des sympathisants socialistes.
Constitution européenne : le soutien à Laurent Fabius révèle les inquiétudes économiques des Français
En déclarant qu'en l'état, il voterait contre l'adoption de la Constitution européenne, Laurent Fabius réoriente un débat qui de plus en plus s'annonce équilibré. Le positionnement de l'ancien Premier ministre, en faveur de la construction européenne mais contre la constitution telle qu'elle est aujourd'hui proposée, redonne de la lisibilité au clivage gauche droite. Pour des raisons sans doute différentes, sa démarche est en tous cas soutenu par la majorité des Français, toutes tendances politiques confondues, et par les trois quarts des sympathisants socialistes.
Les enquêtes réalisées à la veille des élections européennes de juin dernier montraient l'attachement croissant des Français à la construction européenne. Selon l'étude Ipsos-Dell-Le Point(*) réalisée à quelques jours du vote, les deux tiers d'entre eux se déclaraient "intéressés par les élections", soit dix points de plus que ce que l'on mesurait à la veille du scrutin de 1999. Dans deux cas sur trois, l'intérêt était directement motivé par "les enjeux européens", et non les questions de politique intérieure. "La poursuite de la construction européenne" était soutenue par 75% de l'électorat.
Même si cet intérêt n'a pas trouvé sa traduction en terme de participation au scrutin, ce contexte explique certainement pour partie un rapport de force actuel assez largement favorable à l'adoption du projet de Constitution européenne. Selon l'enquête Ipsos-Le Point, si un référendum invitait les Français à se prononcer sur la question, 51% auraient aujourd'hui "plutôt tendance à voter oui". La tendance favorable au "oui" est un peu plus marquée chez les moins de 35 ans (54%), comme souvent sur les questions européennes. A l'inverse, un Français sur trois auraient "plutôt tendance à voter non". Ce rejet, majoritaire chez les proches du PC et de l'extrême droite, semble d'abord traduire les inquiétudes des citoyens vis-à-vis d'une Europe qu'il juge éloignée de leurs préoccupations.
Le positionnement de Laurent Fabius sur la question a néanmoins réorienté le débat. "Sa stratégie est de montrer qu'être opposé à la Constitution européenne n'est pas incompatible avec l'idée d'être partisan de l'Europe. Fabius recrée ainsi le clivage entre la gauche et la droite sur un sujet essentiel. (…) La gauche a besoin de matière pour s'identifier. Démontrer qu'il n'y a pas une seule construction européenne possible, qu'une Europe de gauche peut rivaliser avec une Europe de droite, est une idée déterminante pour 2007" souligne Pierre Giacometti, directeur général d'Ipsos, dans une interview accordée vendredi 10 septembre au Figaro.
Pour le moment en tous cas, et malgré la tendance favorable au projet de constitution, 61% des personnes interrogées par Ipsos approuvent la position de Laurent Fabius. Et même s'il perd six points de popularité chez les sympathisants socialistes sur la dernière vague du baromètre de l'action politique (de 59 à 53% d'avis favorables), sa position sur la constitution est tout de même soutenue par les trois quarts d'entre-eux (73%). Laurent Fabius jouera donc gros lors de la consultation des militants prévue pour décembre. Pierre Giacometti rappelle en effet "qu'il n'est pas certain d'être majoritaire au sein du PS. Le rapport des forces chez les militants est probablement beaucoup plus équilibré qu'il ne l'est dans l'électorat socialiste. Mais il peut tout à fait l'emporter. Et s'il gagne, il installe le cadre d'une confrontation Fabius-Sarkozy, et relègue les autres candidats à la marge de la confrontation entre la droite et la gauche."
(*) Enquête Ipsos-Dell-Le Point-France 2-Europe 1. 870 personnes constituant un échantillon représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus inscrite sur les listes électorales interrogées par téléphone les 4 et 5 juin 2004.