Etats-Unis : progrès électoraux des Démocrates
L’Amérique, qui votait le 3 novembre pour des élections intermédiaires, n’a pas sanctionné Bill Clinton aux prises avec l’affaire Lewinsky. Les Démocrates progressent à la Chambre des représentants dans un scrutin marqué par le succès des sortants et des modérés.
Démentant les calculs de ses adversaires, les Américains n’ont pas sanctionné Bill Clinton lors des élections intermédiaires du 3 novembre. Bien au contraire, ce scrutin se solde par un progrès des Démocrates à la Chambre des représentants. Ceux-ci y demeurent minoritaires mais gagnent cinq sièges. C’est la première fois depuis 1934 que le parti détenteur de la Maison Blanche accroît le nombre de ses représentants à la Chambre à l’occasion des élections de mi-mandat.
Les appétits républicains ont également été déçus au Sénat. Les opposants au président des Etats-Unis avaient comme objectif de conquérir une majorité de 60 sièges qui leur aurait permis de légiférer à leur guise. Las, le scrutin de mardi laisse inchangé le rapport de forces entre les deux partis au Sénat : 55 Républicains contre 45 Démocrates.
Les élections aux postes de gouverneurs des Etats n’ont pas été plus fastes pour les Républicains. Ceux-ci enregistrent une perte symbolique d’importance avec leur défaite en Californie où le démocrate Gray Davis a triomphé, avec 58% des voix, du républicain Dan Lungren. Le parti du président conquiert l’Etat le plus peuplé et le plus riche des Etats-Unis qui était détenu par ses adversaires depuis seize années. Les positions extrémistes du sortant républicain, notamment à propos de l’avortement, ont sans doute joué un rôle prépondérant dans sa défaite.
La victoire est généralement allée, le 3 novembre, aux sortants et aux modérés des deux partis. La victoire des deux fils de l’ancien président Georges Bush en constitue une illustration. En Floride, Jeb Bush a remporté le poste de gouverneur de cet Etat démocrate avec 55% des suffrages. Au Texas, le pragmatique et modéré George Bush junior s’est fait réélire triomphalement avec 69% des voix. Il s’était, au cours de la campagne, préoccupé des minorités ethniques, contrairement à d’autres candidats républicains. La frange la plus droitière de ce parti a souvent essuyé des revers, ce qui n’était pas le cas dans la période précédente. Le centre de gravité de l’Amérique s’est visiblement déplacé vers le centre.
C’est sans doute ce qui explique le très faible écho, dans les urnes, de la croisade moraliste menée contre Clinton au travers de l’affaire Lewinsky. Les Américains n’ont pas été impressionnés par les multiples révélations du procureur Kenneth Starr et n’ont visiblement pas appréciés l’acharnement de la majorité républicaine du Congrès. C’est en vain que les Républicains ont dépensé, quelques jours avant l’élection, dix milliards de dollars dans une campagne publicitaire centrée sur les aventures sexuelles du président. Seulement 5% des électeurs citent l’affaire Clinton-Lewinsky comme le sujet qui a le plus influencé leur vote, selon une enquête réalisée pour ABC-News auprès de 5000 personnes venant de voter. Les votants ont d’abord pensé à l’éducation (20%), aux questions éthiques (19%) et à l’économie (14%). Incontestablement, la bonne santé actuelle de l’économie américaine a joué en faveur des Démocrates. Une majorité des électeurs (55%) approuve d’ailleurs la manière dont Clinton agit comme président. Seulement 34% d'entre eux, toujours selon la même enquête, pensent qu’il devrait être destitué, une forte majorité (61%) désapprouvant l’attitude des Républicains au Congrès dans cette affaire. Les sondages réalisés à la sortie des bureaux de vote montrent que les femmes et les bas revenus sont les plus opposés à une destitution de Clinton.
Le président a naturellement été soulagé par ces résultats qui laissent penser que la procédure de destitution à son encontre n’ira pas jusqu’à son terme. Clinton s’est déclaré " encouragé " par le vote des Américains. Et Hubert Védrine, ministre français des Affaires étrangères, s’est félicité de l’absence d’efficacité des " pressions " exercées sur le président américain au nom d’une sorte de " maccarthysme " des mœurs.