Europe : de la France qui rit à l’Italie qui pleure

Le dernier baromètre Ipsos-Afp " Tendances des Opinions Publiques Européennes " met en évidence des évolutions contradictoires d’un pays à l’autre. L’optimisme domine en France et en Grande-Bretagne alors que le pessimisme ronge l’Allemagne et l’Italie.

Auteur(s)
  • Jean-François Doridot Directeur Général Public Affairs
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Alors que l’horizon de la monnaie commune se rapproche, les opinions publiques européennes vivent des situations économiques et politiques très contrastées. Si l’optimisme domine en France ou en Grande-Bretagne – où les gouvernements en place sont majoritairement appréciés – l’Allemagne et l’Italie sont en proie à de fortes interrogations. Comme par hasard, le premier de ces deux pays vient de connaître une alternance électorale ( quelques jours après la réalisation de cette enquête Ipsos-Afp) tandis que le second vit actuellement une crise politique ouverte.

Le gouvernement italien de centre-gauche dirigé par Romano Prodi voit son existence menacée par la décision des communistes de lui retirer leur soutien. Réalisé bien avant l’événement, le baromètre Ipsos-Afp donne une dimension explicative à cette actualité. C’est en Italie que le pessimisme sur l’évolution de la situation économique et sociale est le plus accentué. L’indice de confiance en la matière y a même reculé de 44 points depuis le baromètre précédent datant de mai 1998 – ce qui constitue un mouvement d’ampleur exceptionnelle. L’Italie deviendrait-elle " l’homme malade " de l’Europe ?

Ses habitants semblent fort mécontents de leur gouvernement. Seulement 36% d’entre eux (contre 59%) lui font confiance pour " faire face aux principaux problèmes du pays ". Il n’y a que le gouvernement Kohl en Allemagne, à la veille de son renvoi par les électeurs, qui obtenait un pire résultat en Europe. Cet indice de confiance politique a reculé de 17 points en Italie depuis mai dernier. Très logiquement, le " souhait d’alternance " n’est majoritaire que dans la Botte et Outre-Rhin.

En Allemagne, ce souhait est devenu réalité. Le pessimisme économique des Allemands, même s’il s’est atténué par rapport au baromètre précédent, ainsi que la défiance manifestée à l’égard du gouvernement dirigé par l’ancien chancelier ont produit leurs effets dans les urnes le 27 septembre.

A l’autre bout du spectre européen se trouvent les opinions britanniques et française. Des cinq pays observés par ce baromètre, la Grande-Bretagne est celui où le pessimisme économique est le moins répandu, mais cet indice chute de 15 points et son solde devient négatif. C’est cependant, avec la France, le seul où une majorité de personnes interrogées accorde sa confiance à l’exécutif. Le gouvernement de Tony Blair semble même le plus solide de tous : une majorité absolue de Britanniques souhaiterait, en cas d’élections, " la victoire de la majorité en place ". Il est cependant à noter que ces deux indices de satisfaction politique sont, comme leur homologue économique, orientés à la baisse.

A cet égard, la France se distingue par un mouvement psychologique ascendant. Le pessimisme sur la situation économique et sociale du pays demeure le fait de deux tiers des sondés mais cet indicateur est orienté à la hausse. On remarque que la confiance relative au niveau de vie fait l’objet d’un retournement spectaculaire : le solde des personnes optimistes en la matière passe de –8 à +25 d’une enquête à l’autre.

Le gouvernement en place tire profit de ces évolutions du climat économique. Le gouvernement de Lionel Jospin est celui qui recueille le taux de confiance le plus élevé des cinq pays observés. Cet indice progresse même de 18 points par rapport au printemps. Le souhait d’alternance, très minoritaire, recule encore en France.

L’image de l’euro fait apparaître une toute autre hiérarchie des opinions publiques européennes. Du côté des " euro-enthousiastes ", on trouve toujours l’Italie et l’Espagne et du côté des " euro-sceptiques " l’Allemagne et la Grande-Bretagne. Mais on note surtout que l’indice de perception de la future monnaie unique recule en France (-16), Allemagne (-10) et en Italie (-7) tandis qu’il progresse fortement en Grande-Bretagne (+15). Globalement, l’image de l’euro se détériore sensiblement dans l’ensemble de ces cinq pays après la forte progression enregistrée par l’enquête précédente. Et l’Europe reste une zone où de bonnes anticipations en matière de niveau de vie coexistent avec la persistance d’un pessimisme économique et social dominant.

Auteur(s)
  • Jean-François Doridot Directeur Général Public Affairs

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