Europe : les "euro-sceptiques" de plus en plus nombreux
Les extraits de la quinzième vague du baromètre de Tendance des Opinions Publiques Européennes Ipsos / AFP montre que les Européens sont de plus en plus méfiants vis-à-vis de la monnaie unique. L'enquête montre par ailleurs que le climat économique et social se tend en Grande-Bretagne.
La faiblesse de l'euro sur le marché des changes nuit incontestablement à son image. Celle-ci se dégrade encore, particulièrement en Allemagne et en Grande-Bretagne. Pour la première fois depuis la première vague du baromètre, le solde d'image sur l'ensemble des cinq pays testés n'est plus strictement positif. Aujourd'hui, pour les deux-tiers des Allemands et 55% des Britanniques, l'euro "évoque quelque chose de négatif". Le soutien à la monnaie unique est toujours majoritaire en Europe du Sud, quoiqu'une fois encore en diminution : pour 56% des Espagnols (-9), et 57% des Italiens (-2), l'euro évoque encore "quelque chose de positif". En France, le soutien à la monnaie unique perd également de sa vigueur (évocation positive pour 53% des Français, -1, négative pour 43%, +3). Alors que la fin du franc est de plus en plus proche - le gouvernement vient d'annoncer que les francs ne seront plus utilisables dans le commerce dès le 7 février 2002 - cette tendance n'est guère encourageante.
L'inquiétude quant à la situation économique et sociale du pays se renforce, pour devenir largement majoritaire dans toute l'Europe (61%, +7 points). Les deux-tiers des Italiens et des Allemands, 55% des Britanniques, pourtant traditionnellement plus optimistes, 57% des Espagnols font aujourd'hui part de leur inquiétude. Cela étant, comme les enquêtes ont été réalisées pendant le conflit sur les prix des carburants, qui a touché à la mi-septembre toute l'Europe, on peut penser que cette inquiétude est, au moins pour partie, conjoncturelle.
En Espagne, la confiance dans "la situation économique et sociale du pays" perd 13 points (de 48% en mai dernier à 31% aujourd'hui). Le pessimisme est également particulièrement à l'ordre du jour en Grande-Bretagne, puisque aujourd'hui, plus d'un Britannique sur deux se déclarent inquiet de "la situation économique et sociale" (55%, soit 7 points de plus qu'en mai dernier). Comme parallèlement, la part des personnes "confiantes" diminue de 10 points (39% aujourd'hui, contre 49% lors de la dernière vague), la dégradation du climat, de 17 points en terme de solde, est spectaculaire. La stratégie de fermeté de Tony Blair dans le conflit sur les carburants n'a certainement pas fait l'unanimité dans l'opinion : le soutien au gouvernement, "pour faire face aux principaux problèmes du pays", chute aussi de 14 points, passant de 39 à 25%. Aujourd'hui, près des trois-quarts des Britanniques (72%) n'ont plus confiance dans leur gouvernement. Par ailleurs, une majorité assez large se dégage pour souhaiter la victoire de l'opposition dans l'hypothèse où des "élections législatives étaient organisées la semaine prochaine" (41% souhaiteraient la victoire des conservateurs, contre 34% qui préféreraient la victoire du New Labour").
Les Italiens sont également d'une humeur plutôt maussade. Plus des deux-tiers des interviewés (68%) sont aujourd'hui inquiets de la "situation économique et sociale de leur pays". Comme en mai dernier, c'est en Italie que l'exécutif est le plus sévèrement remis en cause. Moins d'un Italien sur trois fait aujourd'hui confiance au gouvernement d'Amato pour faire face aux "principaux problèmes du pays" (28%, +1 point) ; un tiers des personnes interrogées en Italie souhaiterait la victoire du principal parti d'alternance en cas de législatives, contre 26% qui préféreraient que le pouvoir en place se maintienne, et 23% "ni l'un ni l'autre".
Le climat est en revanche un peu moins tendu en Allemagne. Si la confiance dans la situation économique et sociale perd 6 points (de 38 à 31%), les Allemands soutiennent toujours le gouvernement de Gerhard Schröder, et rendent plutôt l'euro responsable de tous les maux. Les Allemands sont aujourd'hui, et de loin, les plus "euro-septiques" de tous les Européens.La France enfin fait exception à cette vague de morosité. On n'enregistre en effet qu'une très légère dégradation du niveau de confiance quant à la situation économique et sociale (43% de "confiants", inchangé par rapport à mai dernier, contre 56% "d'inquiets", +1 point), qui contraste avec les chutes enregistrées dans les autres pays d'Europe. Le gouvernement de Lionel Jospin bénéficie toujours de la confiance de la majorité des Français (51%).