Européennes: les raisons de l’indifférence
Un mois avant le scrutin européen du 13 juin, l’opinion française demeure confinée dans une superbe indifférence. La dernière enquête Ipsos-le Point ne fait état que d’une faible poussée d’intérêt prétendu pour l’élection européenne : 65% contre 63% il y a deux semaines. Ce chiffre élevé ne doit pas faire illusion : seulement 18% des sondés se déclarent "très intéressés" par la prochaine joute électorale. Et ce chiffre n’est aucunement en augmentation depuis le début de l’année 1999.
Les sympathisants écologistes et FN sont les moins motivés par l’élection européenne. Plus étonnant, le désintérêt envers ce scrutin frappe les catégories sociologiques qu’on aurait pu croire les plus intéressées : 38% des cadres supérieurs, 46% de ceux qui déclarent gagner plus de 300 000 francs par an et même 35% des diplômés d’études supérieures avouent leur désintérêt pour l’élection de juin. Dans toutes ces catégories – habituellement les plus favorables à la construction européenne – les chiffres se situent au-delà de la moyenne des personnes interrogées.
La mayonnaise a certes pour habitude de prendre lentement et tardivement lors des campagnes européennes. Le cru 1999 cumule cependant plusieurs caractéristiques défavorables. La première est de n’offrir qu’une compétition entre des têtes de listes plutôt mineures. Quels que soient leurs talents, François Hollande et Nicolas Sarkozy sont évidemment moins connus que ne l’étaient François Mitterrand et Jacques Chirac il y a vingt ans. Deuxième handicap : cette élection européenne est, pour le moment, occultée par la crise internationale majeure qu’est la guerre des Balkans. La troisième raison qui peut rendre compte du faible intérêt des Français pour la prochaine consultation électorale tient à l’actuelle situation politique intérieure : qu’ils soient de droite ou de gauche, les électeurs n’ont pas de raisons vraiment fortes pour se rendre aux urnes. Dans le premier cas, ils ne peuvent être que décontenancés par la diversité de l’offre électorale. Dans le second, ils risquent d’être neutralisés entre leur manque d’enthousiasme à l’égard de la politique menée par le gouvernement et leur refus de la sanctionner sans plus attendre.
Les intentions de vote révèlent peu de modifications d’une enquête à l’autre. La liste conduite par François Hollande continue à dominer de six points celle de Nicolas Sarkozy. La liste des Verts gagne un point tout comme celle de Jean-Marie Le Pen et des chasseurs défendant la pêche et la tradition. A l’inverse, les listes de l’alliance LO-LCR et des "souverainistes" de droite Pasqua-Villiers perdent un point. Tous les autres mouvements sont inférieurs à 1%.