Fast and furious

La société se recompose pour ressembler de plus en plus à la structure de l’Internet : elle est passée d’une forme pyramidale à un réseau horizontal sans centre, et sans frontières. Alors, si j’avais à choisir une image, ce serait une myriade de connecteurs en lien les uns avec les autres, mobiles en fonction de leurs intérêts réciproques.

C’est l’étape actuelle de phénomènes que nous identifions depuis des années :

 - La défiance à l’égard de tous ceux qui sont au sommet de toutes les pyramides (gouvernement, entreprises, instances politiques ou autres), défiance née de l’impression qu’aucun n’est armé ni compétent pour apporter la moindre réponse à une crise qui dure et s’amplifie. Défiance qui s’est aggravée avec le sentiment qu’en revanche, chacun des sommets profite de sa situation personnelle pour satisfaire uniquement ses intérêts,

 - Et le sentiment d’être enfermés dans des structures rigides et codifiées, qui ne permettent pas la ré-invention de soi quand celle-ci devient parfois vitale, en période de crise notamment.

On a tellement parlé d’arbitrages. C’est de sécession qu’il faut parler maintenant, avec des modalités simples… Nous y voilà :

 - Sur ce qu’il est impossible de contester – en fait toutes les dépenses contraintes qui émanent de la sphère publique (impôts, prix des transports, de l’énergie, etc.), soumission.

 - Sur tout le reste, dissidence, pour se réallouer un espace privé, reprendre son individualité, trouver des marges de manœuvre. Tout ce qui a l’air d’une contrainte devient insupportable, la famille n’y échappe pas. Oui, c’est un refuge, mais c’est aussi un lieu qui peut fabriquer de l’aliénation. Les foyers solos explosent d’ailleurs, en passe d’être la première structure de foyer en France en 2030.

Internet est une machine à fabriquer de la sécession. Où trouver un espace équivalent de solutions alternatives ? Comment mieux sortir des structures de décision dans lesquelles les Français se sentent enfermés ?

Plus le registre de la contrainte s’accompagne d’un sentiment de non-accomplissement personnel, voire de recul des conditions de vie, plus il encourage le désir de sécession, le besoin d’autonomisation, le refus des cadres et des injonctions.

Internet donne à chacun les moyens d’être une mini-nation, avec sa monnaie locale, sa diplomatie, sa constitution, sa culture, et même sa « défense », avec les milices privées ! Mais absolument pas dans les formes précédentes de l’idée de nation.

TROIS EXEMPLES

La monnaie :
Dans la logique de l’argent, on  cherche une activité complémentaire, en plus du travail salarié (louer sa voiture, son logement…). Si on en sort, on se met d’accord sur une valeur, un contrat. Il ne s’agit plus de spéculer, mais de s’approprier une valeur juste, pour que chacun vive mieux. Ce n’est pas une nouvelle économie, mais une réorganisation des échanges, de mini-nation à mini-nation.

La culture :
Elle ne sert plus le lien social, mais l’autonomisation (le « savoir pour faire »), ce sont les applications collaboratives pour apprendre avec des tutoriels, les réseaux, au service de l’accès à l’information utile, utilisable immédiatement, sans validation académique et sans intermédiaire.

La diplomatie :
Autrement dit les interactions. Aujourd’hui, la clef est l’hyperpersonnalisation. Trouver la personne dont j’ai exactement besoin pour le moment, où j’en ai besoin et également rendu possible par l’Internet. C’est ce qui déconstruit l’identité collective, mais génère des alliances pragmatiques fondées sur des intérêts tangibles.


À mesure que l’identité se déconstruit dans sa dimension collective, elle se recompose autour de ce que je fais et de ce que vis plutôt qu’autour de ce que je suis. Elle se fait sur la base de la communauté de ceux qui partagent la même expérience. Elle produit des recompositions libres et chaotiques, au sens de « mobiles et mouvantes », qui désarçonnent les acteurs du monde « structuré » : gouvernement, marques, institutions.

Tout fonctionne dans un maillage avec des interactions qui se lient, se relient, se délient dans un système d’alliances ponctuelles et dynamiques.

L’objectif unique est de se passer progressivement des structures officielles et traditionnelles pour trouver des partenaires de croissance, gagner et profiter plus en utilisant toutes les ressources possibles.

Lesquelles structures sont tentées de dominer, légiférer, taxer, interdire (on l’a vu avec UberPop) pour repousser la déferlante de l’individu-entrepreneur. Résultat, la sécession se radicalise.

Certaines sont cependant conscientes qu’il y a d’autres manières de gérer cette situation, comme pactiser, voire imiter le nouveau citoyen sécessionniste.

Une formidable injonction au mouvement est adressée aux institutions publiques et privées : l’occasion pour elles de se renouveler et de faire preuve de l’autonomie créative que leurs clients, leurs salariés ou leurs administrés mettent déjà en œuvre.

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