A huit mois de la Présidentielle...
A huit mois du scrutin, Nicolas Sarkozy cumule des handicaps considérables dans une élection qui reste encore malgré tout pleine d’inconnues. L'analyse de Brice Teinturier, directeur général délégué d'Ipsos France, publiée le 1er septembre dans l'hebdomadaire Le Point et que nous reproduisons, dresse un bilan des faiblesses de la candidature de Nicolas Sarkozy à la Présidentielle 2012. Impopularité, concurrence à droite et crise économique ont fragilisé ses chances d'obtenir un second mandat. Pour autant le scrutin est loin d'être joué, et le Président conserve des atouts pour inverser la tendance.
Une impopularité historique. C’est la difficulté la plus grande pour Nicolas Sarkozy : avec 35% de jugements favorables, la cote du Président reste encalminée dans les basses eaux : elle n’a pas dépassé ce seuil de 35% depuis 15 mois avec un niveau d’hostilité particulièrement élevé : 61% de jugements défavorables, dont 30% de « très défavorable » - alors qu’à l’inverse, les « très favorable » ne sont que 4%. Très clivée, le Président ne dispose pas dans l’opposition du matelas d’indulgence traditionnellement accordée au Président en exercice par une fraction de citoyens ne se réclamant pas de sa famille politique : seul 18% des sympathisants de gauche émettent ainsi un jugement favorable et, par exemple, 27% seulement des catégories populaires. Enfin, les indicateurs de vote, même relatifs à 8 mois du scrutin, ne sont guères brillants : au 1er tour, Nicolas Sarkozy oscille entre 20 et 24% et au second tour, il est systématiquement donné perdant dans des proportions à la fois peu réalistes par leur ampleur (près de 58%) mais révélatrice du rejet.
Cette crise de confiance est avant tout une crise du résultat, tant l’espérance suscitée par la campagne de 2006/2007 a été grande. Elle s’est ensuite doublée d’une crispation à l’égard de la personne et de son exercice de la fonction présidentielle.
Une concurrence intense à droite : au-delà de l’impopularité, Nicolas Sarkozy se trouve aussi confronté à une extrême droite qu’il avait su réduire en 2007 à moins de 11% et à laquelle Marine Le Pen a su redonner des couleurs : 17%, selon la dernière vague du baromètre Ipsos Logica Business Consulting pour Le Monde, France Télévision et Radio France. Au centre droit également, l’hypothèse d’une candidature Borloo ajoute à la difficulté, même si, pour l’instant, ce dernier reste en dessous de la barre des 10%. Non seulement ces candidats pompent une partie de l’électorat UMP mais ils compliquent la ligne stratégique du candidat Sarkozy.
Une crise sans précédent, qui lamine le bilan, fragmente la cohérence du projet initial en obligeant à des retournements fondamentaux et qui accroît le scepticisme et la défiance des Français constitue la 3ème grande difficulté pour Nicolas Sarkozy. Certes, le Président aura aussi prouvé à cette occasion qu’il sait « tenir la barre », comme le disent ses supporters. Mais pour un sortant et quoi qu’on en dise, une crise économique apporte davantage d’inconvénients que d’avantages.
Enfin, Nicolas Sarkozy doit faire face à une opposition qui progressivement se structure et qui est en passe, s’agissant du PS, de se doter d’un leader après avoir accouché d’une plate forme programmatique.
Pour autant, on aurait tort d’imaginer que le scrutin est joué et le Président conserve des atouts. A ce jour tout d’abord, les primaires constituent une inconnue : elles peuvent être une formidable rampe de lancement pour le PS…ou produire des déchirements internes délétères. La crise enfin a certes des inconvénients majeurs mais elle concentre le débat sur les deux principaux partis de Gouvernement et rend inaudible, au moins provisoirement, les autres. Ajoutée au massacre de Norvège, elle peut pénaliser le FN. Le bilan du Président, même s’il est contesté, comporte par ailleurs suffisamment d’éléments et d’aspérités pour lui permettre de s’affirmer comme un Président véritablement réformateur. Le socle UMP, même affaibli, existe et solidifie le 1er tour. Enfin, tous les candidats qui se présentent en 2012 se présentent pour la 1ère fois… à l’exception de deux d’entre eux – sauf si Ségolène Royal était investie : François Bayrou et Nicolas Sarkozy ! Or, c’est là un capital d’expérience sans doute considérable.
Sur le papier donc, Nicolas Sarkozy est dans une situation pire que celle de V. Giscard d’Estaing en 1980. Mais nous ne saurons qu’en avril si cette élection s’est jouée longtemps en amont et dès les 1ers mois du quinquennat ou si la campagne sera son moment de vérité, avec tout ce que cela comporte comme inconnue et possibilités de rebond.