La Communication Prédictive

La blague est connue de presque tout le monde: quelle est la meilleure façon de perdre tout son argent : le jeu, les femmes ou les ingénieurs? Je vous laisse la fin de l’histoire ainsi que mon choix de réponse, préférant poser une nouvelle question.

Auteur(s)
  • Brice Teinturier Directeur Général Délégué France, Ipsos (@BriceTeinturier)
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Quelle est la meilleure manière d’anticiper, donc de prévoir, le résultat d’une élection? Il s’agit ici du scrutin présidentiel américain du 2 novembre prochain. Soit Bush ou Kerry.Trois indicateurs sont en compétition : les intentions de vote des électeurs inscrits, la confiance des consommateurs, l’évaluation de l’impact et l’agrément des communications publicitaires des candidats en lice.

La querelle oppose les politologues et autres spécialistes des opinions publiques. Pour la majorité (écrasante) d’entre eux les sondages sont des instantanés, des photographies qui, à aucun moment, n’ont de valeur prédictive. Ma position est inverse ; considérées comme des prévisions, les intentions de vote le deviennent du fait même de leur impact dans l’univers de réflexion des électeurs. C’est la crédibilité des sondages qui pousse à en faire une prévision et c’est parce que cette anticipation du résultat à venir est fiable que les électeurs peuvent la démentir! Paradoxe du sondage qui, parce qu’il prédit juste, devient parfois faux ! Plus les sondages indiquent que Bush va largement gagner, plus les électeurs peuvent le retenir.

La confiance des consommateurs est un outil plus qualitatif. Peut-on voter pour un Président sortant si l’on est pessimiste quant à son futur personnel, celui de la région que l’on habite, celui du pays où l’on vote ? Et oui, pour peu que l’agenda des préoccupations privilégie d’autres enjeux. C’est ainsi que les américains jugent davantage prioritaire la lutte contre le terrorisme que leur propre confort économique et financier. La confiance des consommateurs devient alors un indicateur secondaire !

On pourrait dire de la communication publicitaire américaine qu’elle coûte beaucoup trop d’argent pour ce qu’elle apporte, puisque le niveau de l’abstention est stable tandis que progressent les investissements ! Soit, mais les millions de dollars dépensés donnent un climat d’ambiance ; celui dont la ‘com’ est jugée plus efficace et meilleure que celle de l’autre, a toute les chances de l’emporter.

Tout ça pour ça ? Après tout, Kerry talonne Bush dans les votes anticipés, la confiance des consommateurs est très moyenne, et la communication ultra-négative a, elle aussi, choisi son vainqueur.

A ne rien comprendre donc, si John Kerry l’emporte. Damned !

Jean-Marc Lech a commencé sa carrière en 1970 à l’IFOP (Institut Français d’Opinion Publique) dont il est devenu PDG en 1980. En 1982, il rejoint Ipsos en qualité de Coprésident aux côtés de Didier Truchot. Spécialiste de l’opinion publique, Jean-Marc Lech a publié plusieurs ouvrages relatifs à la société et la vie politique françaises, notamment La Politique à l’Affiche et Sondages Privés.

Auteur(s)
  • Brice Teinturier Directeur Général Délégué France, Ipsos (@BriceTeinturier)

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