LA FISCALITE SELON LES CHEFS D’ENTREPRISES DE DIX PAYS DE L’UNION EUROPEENNE
Dans un contexte marqué par la crise financière internationale et ses conséquences économiques et sociales de plus en plus tangibles, Ipsos a réalisé pour le compte de la CCIP la quatrième vague de l’enquête sur la fiscalité auprès de chefs d’entreprise de dix pays de l’UE. Comme tous les ans, cette étude comporte une partie barométrique reprenant un certain nombre d’indicateurs mis au point en octobre 2005 et portant sur l’attractivité des différents pays en termes de fiscalité des entreprises. Cette année, le dispositif inclut également un volet thématique consacré à la question de la fiscalité en faveur de la recherche et de l’innovation.
Les résultats de cette étude confirment les différences significatives de perception observées les années précédentes, en matière de pression fiscale sur les entreprises dans les dix pays étudiés et mettent également en lumière quelques évolutions importantes. La Pologne et le Royaume-Uni restent toujours parmi les plus compétitifs aux yeux des entrepreneurs européens mais semblent désormais de plus en plus concurrencés par les Pays-Bas. A l’autre extrême, l’Italie, mais aussi la France, et dans une moindre mesure la Belgique, apparaissent toujours comme des pays moins séduisants que leurs voisins européens. Enfin, la plupart des indicateurs de cette enquête se dégradent cette année en Hongrie, pays qui figurait jusqu’à l’an dernier parmi les plus attractifs. L’enquête révèle par ailleurs que seule une faible minorité des entreprises européennes a perçu des aides fiscales en faveur de la recherche et l’innovation, aides pourtant jugées importantes voire indispensables pour pouvoir investir en la matière et, plus largement, pour améliorer la capacité à attirer des investissements étrangers.
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- Le premier groupe, celui des pays jugés attractifs, à la fois dans le pays même et à l’étranger, est toujours constitué de la Pologne, du Royaume-Uni - même s’ils semblent, notamment ce dernier, en relative perte de vitesse - et des Pays-Bas qui, à l’inverse, y ont consolidé leur place. Ces trois pays ont par ailleurs pour point commun d’avoir un TPOE (taux de prélèvement obligatoire sur les entreprises) objectivement inférieur à la moyenne européenne.
- Le deuxième groupe est composé des pays considérés comme pas attractifs, aussi bien par leurs propres chefs d’entreprise que par l’ensemble des chefs d’entreprise européens. La France, dont le TPOE est effectivement le plus lourd de l’UE-15, la Belgique et l’Italie, dont les résultats sont particulièrement mauvais cette année, appartiennent toujours à cette deuxième catégorie.
- Enfin, l’Espagne, la Suède et l’Allemagne restent à un niveau intermédiaire entre les deux groupes précédents et sont désormais rejoints par la Hongrie, qui affiche cette année une dégradation de l’ensemble des indicateurs présents dans l’enquête. Dans ce groupe cohabitent des pays à TPOE élevé voire très élevé, comme la Suède ou l’Espagne, et des pays dont le taux de prélèvement obligatoire sur les entreprises est sensiblement inférieur à la moyenne européenne : c’est le cas de l’Allemagne.
- Les prélèvements obligatoires
- Les aides fiscales en faveur de la recherche et de l’innovation
Après deux années consécutives d’amélioration, la perception de la pression fiscale en Europe se dégrade légèrement
Pour la première fois depuis la mise en place de ce baromètre en 2005, la perception de la pression fiscale exercée sur les entreprises en Europe se dégrade. Certes, la proportion de chefs d’entreprise estimant que les prélèvements obligatoires (impôts, taxes, cotisations sociales) pratiqués dans leur pays sont élevés diminue légèrement par rapport à 2007, passant de 94% à 91% cette année. Mais, plus significatif, la part des entrepreneurs qui jugent cette pression fiscale « très élevée » est en hausse de 2 points pour se situer désormais à 37%, contre 35% il y a 12 mois.
Ce retournement de la tendance observée depuis deux ans est bien évidemment à relier à la crise financière internationale et à son impact sur l’économie européenne. Le bref retour de la croissance dans l’Union européenne en 2006-2007 a été suivi d’un ralentissement net perceptible dès le deuxième trimestre 2008, ralentissement qui s’est fortement accentué au cours du trimestre suivant, juste avant la réalisation de cette enquête. La très faible croissance mesurée pour le troisième trimestre 2008 (0,6% pour l’Europe des quinze et 0,8% pour l’Union européenne, contre, respectivement, 2,1% et 2,5% pour le dernier trimestre 2007) ne pouvait ainsi avoir qu’un impact négatif sur le moral des chefs d’entreprise, ce qui explique pour beaucoup les évolutions ici observées.
Cependant, cette tendance globale masque des évolutions contrastées selon les pays. En Italie, pays dont les chefs d’entreprise apparaissaient déjà en 2007 comme les plus critiques à l’égard de la pression fiscale pratiquée in situ, la situation se dégrade encore : 68% des dirigeants d’entreprise transalpins (+5 points par rapport à 2007, +16 points en deux ans) jugent désormais la pression fiscale de leur pays très élevée, soit presque deux fois le score moyen européen. L’arrivée au pouvoir de la coalition de droite Popolo della Libertà (PDL) menée par Silvio Berlusconi ne semble donc pas avoir changé la donne dans ce pays qui affiche, pour le troisième trimestre 2008, la plus faible croissance (-0,9%) des dix pays concernés par cette enquête. La tendance est également à la dégradation en Belgique (66% des entrepreneurs jugent les prélèvements obligatoires opérés comme « très élevés », en hausse de 5 points par rapport à 2007) et surtout en Hongrie qui, avec 58% de chefs d’entreprise très critiques en la matière, fait un bon de 20 points par rapport à l’an dernier (+26 points depuis deux ans) pour occuper désormais la troisième place de ce classement, juste devant la France. Le moral semble ainsi être au plus bas chez les entrepreneurs de ce pays fragilisé par sa dette publique (65 % du PIB) et touché de plein fouet par la crise financière. Rappelons que la Hongrie a été le premier pays de l’Union européenne à solliciter l'aide du Fonds monétaire international, de l'UE et de la Banque mondiale, qui lui ont accordé un prêt total de 20 milliards d'euros.
A l’autre extrême, seuls 18% des chefs d’entreprise britanniques (malgré une hausse de 9 points par rapport à l’an dernier), 16% des dirigeants suédois et 8% des néerlandais considèrent que les prélèvements obligatoires pratiqués dans leur pays sur les entreprises sont très élevés. Au Pays-Bas, cette proportion est en baisse depuis trois ans (- 1 point par rapport à 2007 mais -31 points depuis 2005). L’effet conjugué de la réduction de l’impôt sur les sociétés (étalée de 2004 à 2007) et d’une meilleure résistance à la crise (croissance du PIB de 1,8% au troisième trimestre 2008, soit trois fois le taux moyen de l’Europe des 15) semble ici être à l’origine de cette évolution.
Une tendance à l’allègement de la pression fiscale est également ressentie en France. Si la proportion de chefs d’entreprise jugeant le niveau des prélèvements obligatoires très élevé reste nettement supérieure à la moyenne européenne (48% contre 37% en Europe), elle est néanmoins en recul de 13 points en un an, après la hausse mesurée en 2007. L'exonération partielle des heures supplémentaires adoptée en 2007 ainsi que les toutes premières mesures d’un plan de relance axé sur l’investissement (plan d'aide aux PME, exonération de la taxe professionnelle en 2009 pour les nouveaux investissements, rachat de programmes immobiliers en cours, encouragement aux banques pour qu’elles continuent à accorder des crédits) ne sont certainement pas étrangères à cette évolution. Enfin, la pression fiscale semble aussi moins lourde cette année aux entrepreneurs allemands qui ont bénéficié en 2008 d’une baisse importante de l’impôt sur les sociétés (19% jugent la pression fiscale très élevée contre 35% l’an dernier) ainsi qu’à ceux de la Pologne (24%, contre 35% en 2007), ce dernier pays affichant encore au troisième trimestre 2008 une croissance presque « insolente » (5,6%) dans le contexte de crise économique actuel.
Comme lors des vagues précédentes de ce baromètre, pour la majorité des chefs d’entreprise européens (57%), la pression fiscale dans leur pays est non seulement élevée dans l’absolu mais elle est aussi perçue comme étant plus forte que généralement ailleurs en Europe. Ce score global enregistre cependant une baisse de 5 points par rapport à 2007 et se situe ainsi à son niveau le plus faible depuis la mise en place de cet observatoire en octobre 2005. Le caractère international et généralisé de la crise et de ses conséquences contribue certainement à tasser le sentiment traditionnellement prédominant selon lequel la situation est toujours meilleure ailleurs…
Dans le détail, un seul pays voit la proportion d’entrepreneurs jugeant leur pays pénalisé en termes de fiscalité progresser fortement. Il s’agit de la Hongrie qui, là encore, réalise un bond de 11 points par rapport à 2007 pour se situer désormais en tête de ce classement avec 77%. Juste derrière mais en légère baisse, 71% des chefs d’entreprise français estiment que les prélèvements obligatoires sur les entreprises pratiqués en France sont plus élevés que généralement ailleurs en Europe (en recul de 5 points par rapport à 2007). La Suède (71%), la Belgique (68%) et l’Italie (67%, malgré une baisse significative par rapport à l’an dernier) se situent également à un niveau nettement supérieur à la moyenne des dix pays concernés par l’enquête.
A l’inverse, moins de la moitié des entrepreneurs polonais (48%), néerlandais (46%, en forte baisse de 11 points par rapport à 2007 et de 22 points depuis trois ans), britanniques (43%) et espagnols (25%) se considèrent pénalisés par la fiscalité qui leur est appliquée.
Ces perceptions sont globalement cohérentes avec les taux de prélèvement obligatoire sur les entreprises (TPOE) effectivement pratiqués dans les différents pays européens. En effet, la France reste le pays dont le taux global de prélèvements sur les entreprises est le plus élevé d’Europe (TPOE correspondant à 19% du PIB), suivie de la Suède avec 17,5%. Dans une moindre mesure, les TPOE hongrois, belge et italien sont également plus forts que la moyenne européenne. De même, si les chefs d’entreprise néerlandais, polonais, britanniques et allemands se montrent ici moins critiques, c’est parce que, dans les faits, les taux de prélèvements appliqués dans ces pays sont effectivement plus faibles que généralement ailleurs en Europe. Seul décalage significatif entre perceptions et réalités, les chefs d’entreprise espagnols qui font l’objet de prélèvements élevés par rapport à la moyenne du continent sont peu nombreux à exprimer ici leur mécontentement.
La Pologne et le Royaume-Uni confirment leur leadership en matière d’attractivité fiscale ; les Pays-Bas apparaissent de plus en plus attractifs
D’une manière générale, la perception que les chefs d’entreprise ont de l’attractivité de leur propre économie en matière de prélèvements obligatoires (« attractivité vue par soi-même ») est, comme l’illustre le tableau ci-après, très similaire à la vision qu’ont l’ensemble des entrepreneurs européens de l’attractivité de chacun des pays étudiés dans le cadre de cette enquête (« attractivité vue par les autres »). Comme lors des vagues précédentes de ce baromètre, on n’observe donc pas ici de forts décalages entre, d’une part, l’image que les chefs d’entreprise se font de leur propre réalité fiscale et, d’autre part, l’image véhiculée par leur pays dans ce domaine dans le reste de l’Europe.
Ainsi, la Pologne et le Royaume-Uni apparaissent toujours, dans les deux classements, parmi les pays les plus attractifs mais semblent de plus en plus concurrencés par les Pays-Bas. A l’autre extrême, l’Italie, la France et, dans une moindre mesure, la Belgique, restent comme lors des enquêtes précédentes tout en bas de la hiérarchie en matière d’attractivité.
« Perception de l’attractivité des différents pays »
CLASSEMENT |
L’attractivité « vue par soi-même » (1) |
L’attractivité « vue par les autres » (2) |
1er |
Pays-Bas |
Pologne |
2ème |
Pologne |
Royaume-Uni |
3ème |
Suède |
Pays-Bas |
4ème |
Royaume-Uni |
Allemagne |
5ème |
Espagne |
Hongrie |
6ème |
Belgique |
Suède |
7ème |
Hongrie |
France |
8ème |
Allemagne |
Espagne |
9ème |
France |
Belgique |
10ème |
Italie |
Italie |
(1) Perception de l’attractivité de son propre pays (Classement selon % de réponses « attractif »)
(2) Pays européen le plus attractif (Classement selon les réponses données par l’ensemble des chefs d’entreprise)
En effet, la majorité des chefs d’entreprise polonais (71%) et britanniques (56%) considère toujours son propre pays comme attractif en matière de prélèvements obligatoires pour une entreprise étrangère souhaitant s’y implanter. Soulignons néanmoins que les évolutions dans ces deux pays sont contrastées. En Pologne, pays jusqu’à présent relativement épargné par la crise, la proportion d’entrepreneurs partageant cet avis progresse de deux points par rapport à 2007 (et de 23 points par rapport à 2006). En Grande-Bretagne, l’un des pays les plus lourdement touchés par le ralentissement de la croissance, ce score est en baisse sensible de 7 points depuis douze mois.
Mais l’un des principaux enseignements de cette nouvelle vague du baromètre est la confirmation du regain de confiance des entrepreneurs néerlandais. Les chefs d’entreprise des Pays-Bas sont désormais les plus nombreux (74%, en hausse de 19 points en un an) à considérer leur pays comme attractif du point de vue des prélèvements obligatoires. La baisse du TPOE et, plus spécifiquement, la réduction de l’impôt sur les sociétés semblent ainsi porter ses fruits. Tendance à la hausse également en Suède (64%, +13 points), qui atteint ainsi la troisième place dans le classement de « l’attractivité vue par soi-même », malgré un TPOE objectivement très élevé. Les nouvelles mesures de dérégulation sociale introduites par la coalition de centre-droit à son retour au pouvoir peuvent certainement contribuer à expliquer cette évolution.
Comme lors des vagues précédentes, le fossé persiste également sur ce point avec les pays dont les entrepreneurs jugent très élevé le niveau des prélèvements obligatoires. Là encore, la situation est particulièrement critique en Italie où la proportion de dirigeants d’entreprise jugeant leur environnement fiscal attractif est dérisoire (5%, en baisse de 14 points en un an) ou encore en France où seulement 9% des entrepreneurs (-6 points par rapport à 2007) partagent cet avis. Dans une moindre mesure, les dirigeants qui considèrent que leur pays est attractif pour s’y implanter sont aussi largement minoritaires en Allemagne (27%, malgré une nouvelle baisse du TPOE), en Belgique (31%) et, fait nouveau, en Hongrie (31%, soit une baisse de dix points en un an).
Dans le classement d’attractivité établi par l’ensemble des chefs d’entreprise européens (« attractivité vue par les autres »), les pays aux modèles économiques les plus libéraux (la Pologne, le Royaume-Uni) restent en haut de la hiérarchie mais semblent en perte de vitesse.
Ainsi, les dirigeants européens interrogés situent toujours la Pologne en tête du palmarès des pays attractifs pour y implanter son activité professionnelle (17%). Mais ce score est en recul de 6 points par rapport à 2007, de 7 points par rapport à 2006, de 9 points depuis la mise en place de ce baromètre en 2005. Autre indicateur de la relative perte d’attractivité de la Pologne aux yeux des entrepreneurs européens, ce pays est le plus cité par les chefs d’entreprise de « seulement » quatre pays sur dix (dont la Pologne) contre sept pays sur dix lors de la vague d’enquête de 2007. Même tendance à la baisse pour la Grande-Bretagne qui conserve la deuxième place avec 11% des citations mais qui cède 3 points par rapport à 2007 et se laisse ainsi rattraper par les Pays-Bas (11%, en hausse également ici, de 4 points par rapport à 2007) et l’Allemagne (11%). Le fort impact de la crise en Grande-Bretagne semble ainsi avoir terni l’image de l’ensemble de l’économie britannique à l’étranger. Signalons que la relative perte d’attractivité de la fiscalité pratiquée outre-Manche est particulièrement perceptible chez les entrepreneurs français. Pour la première fois depuis la mise en place de cet observatoire, les chefs d’entreprise de l’Hexagone relèguent la Grande-Bretagne à la deuxième place de leur classement avec 17% des citations (contre 27% en 2007 et 38% en 2005), pour la situer désormais derrière la Pologne (24%).
Tout en bas de l’échelle d’attractivité établie par l’ensemble des chefs d’entreprise interrogés on retrouve une nouvelle fois la France (5%, +1 point), l’Espagne (4% des citations, -3 points en un an), la Belgique (3%) et l’Italie, avec seulement 1%.
Ainsi, les trois ensembles de pays qui, en termes d’attractivité fiscale, se dessinaient lors des enquêtes précédentes, se confirment avec néanmoins quelques évolutions.
Une réglementation fiscale toujours de plus en plus complexe malgré une timide amélioration
Malgré une légère amélioration de cet indicateur, la très grande majorité des chefs d’entreprise européens continue à estimer que la réglementation fiscale dans leur pays est de plus en plus compliquée. Cet avis est partagé par sept entrepreneurs sur dix (70%), seuls 21% des répondants (en hausse néanmoins de 3 points par rapport à 2007) considérant à l’inverse qu’elle a tendance à se simplifier. En termes d’évolution de la complexité de la réglementation fiscale, il est ici possible d’identifier trois blocs de pays bien distincts. Le premier est composé des pays dans lesquels seule une très faible minorité de dirigeants d’entreprise se montre satisfaite sur ce point. C’est le cas de la France (11% des entrepreneurs considèrent que la réglementation fiscale est « de plus en plus simple », dont 1% seulement chez ceux qui dirigent des entreprises de 100 salariés et plus), du Royaume-Uni (9%), de la Belgique (8%) ou encore de l’Italie (7%). Nouveau signe du malaise de ses chefs d’entreprise, la Hongrie enregistre là encore la plus forte dégradation avec seulement 7% de satisfaits (-12 points par rapport à 2007) devançant désormais uniquement l’Allemagne (2% seulement, -8 points).
Dans le deuxième groupe de pays, les avis critiques sont également majoritaires mais une minorité d’environ un tiers des répondants se déclare en revanche satisfaite. L’Espagne (38%, en forte hausse de 16 points par rapport à l’an dernier), la Pologne (36%, +17 points depuis 2007) et les Pays-Bas (34%, en recul de 8 points) intègrent cet ensemble de pays.
Enfin, la Suède se démarque de plus en plus des autres pays sur ce point. En hausse pour la troisième année consécutive, la part de ceux qui considèrent que la réglementation fiscale y est « de plus en plus simple » est désormais majoritaire : 62%, soit 14 points de plus qu’en 2007 et 45 points de plus depuis l’arrivée au pouvoir de la coalition de centre-droit « Alliance pour la Suède ».
Services publics : nouvelle – légère- amélioration du rapport qualité / prix
Une courte majorité des chefs d’entreprise européens (52%) estime que le niveau des prélèvements obligatoires pratiqués dans son pays ne correspond pas à une qualité satisfaisante de service public. Néanmoins, la proportion d’entrepreneurs qui, à l’inverse, se montrent satisfaits de ce rapport qualité/prix progresse pour la deuxième année consécutive et se situe désormais à 45% (contre 43% en 2007 et 38% en 2006, soit une hausse de 7 points en deux ans). Cette évolution est observée dans la quasi-totalité des pays concernés par l’enquête.
Soulignons plus ponctuellement la très forte satisfaction mesurée aux Pays-Bas (82%, en hausse de 9 points par rapport à 2007) et en Suède (71%, stable), les deux pays dans lesquels les chefs d’entreprise sont les moins nombreux à juger les prélèvements obligatoires sur les entreprises « très élevés ». A l’inverse, c’est une nouvelle fois en Italie que le mécontentement est le plus fort (seulement 19% de satisfaits, stable), alors que la pression fiscale y est jugée particulièrement élevée.
Par ailleurs, en dépit d’une nouvelle amélioration, les entrepreneurs satisfaits du rapport qualité / prix des services publics restent très minoritaires dans les pays de l’Europe centrale (32% pour la Pologne, malgré une hausse de 10 points, 28% pour la Hongrie), les français atteignant quant à eux, pour la première fois, la moyenne européenne avec 45%, un score en hausse de 6 points par rapport à 2007 et de 8 points depuis 2006. On pourra peut-être y déceler un soutien de la part des entrepreneurs aux différentes initiatives du gouvernement en matière de « continuité de service public » en cas de grève ou de réduction du nombre de fonctionnaires.
Enfin, seuls deux pays voient la proportion de chefs d’entreprises satisfaits de la qualité des services publics diminuer. Il s’agit de la Belgique, où ce score régresse de 58% en 2007 à 38% aujourd’hui (soit -20 points), et de l’Allemagne où la proportion de satisfaits baisse de 38% à 30% seulement. Rappelons ici que la Belgique a été en grande partie paralysée en octobre dernier par une grève décrétée par les trois puissants syndicats du pays qui entendaient défendre le système d'indexation automatique des salaires. Quant à l’Allemagne, elle a été confrontée, au cours de l’année 2008, à d’importantes grèves dans le service public (hôpitaux, crèches, administration, transport urbain).
L’impôt sur les sociétés devient, de justesse, l’aspect fiscal primordial selon les entrepreneurs européens
Les chefs d’entreprise européens sont très partagés sur la question de l’aspect fiscal déterminant dans le choix d’un pays pour une éventuelle implantation à l’étranger. Pour la première fois depuis la mise en place de ce baromètre, l’impôt sur les sociétés arrive en tête au niveau européen avec 44% des citations, en hausse de 4 points par rapport à 2007 et de 12 points depuis 2005. Juste derrière, les entrepreneurs européens citent « la stabilité juridique et réglementaire » (43%, en hausse de 3 points) et « les charges sociales » (40%, soit 3 points de moins qu’en 2007).
Dans le détail, l’impôt sur les sociétés est l’aspect fiscal le plus cité au Royaume-Uni et en Espagne, deux pays dans lesquels cet impôt est plus élevé que la moyenne européenne, aussi bien en taux nominal qu’en pourcentage du PIB. De même, les entrepreneurs néerlandais le placent toujours en tête, malgré les baisses introduites dans ce pays au cours des dernières années. La France et la Belgique, malgré un IS élevé, mettent d’abord en avant les charges sociales pour ne citer qu’en deuxième position l’impôt sur les sociétés. Rappelons ici que, depuis la mise en place de ce baromètre, les chefs d’entreprise français se démarquent de la moyenne européenne en accordant aux charges sociales une importance toute singulière. Cette tendance est confirmée cette année : pour 72% des Français (en hausse de 5 points), ces charges constituent l’un des deux critères clefs dans le choix d’un pays pour une éventuelle implantation à l’étranger, ce score n’étant que de 40% pour l’ensemble des entrepreneurs européens interrogés. Enfin, la stabilité juridique et réglementaire est davantage mise en avant dans les pays de l’Europe centrale, pays qui ont connu une forte instabilité politique (la Hongrie) ou un changement de majorité gouvernementale (la Pologne, avec l’arrivée au pouvoir du PO).
L’impôt sur le revenu (cité par 27% des entrepreneurs européens), la qualité des relations entreprises-administrations fiscales (21%) et la fiscalité locale (18%) apparaissent toujours loin derrière dans le classement.
Moins d’une entreprise européenne sur cinq a bénéficié d’aides fiscales en faveur de la recherche et de l’innovation
Presque trois quarts (73%) des chefs d’entreprise européens déclarent qu’il existe dans leur pays des aides fiscales en faveur de la recherche et de l’innovation. Ce score est majoritaire dans chacun des dix pays concernés par cette enquête mais on observe des écarts importants entre les différentes zones étudiées. Ainsi, une très large majorité des entrepreneurs espagnols (90%), belges (89%) et britanniques (80%) sont de cet avis, contre « seulement » 63% des suédois, 59% des allemands ou encore 59% des polonais. La France se situe ici très légèrement au-dessus de la moyenne européenne avec 75% des répondants se prononçant dans ce sens, mais ce chiffre atteint 94% chez les dirigeants des établissements de plus grande taille en termes de nombre de salariés (100 salariés et plus).
Si ces aides fiscales en faveur de la recherche et de l’innovation semblent bien répandues géographiquement en Europe, seulement 18% des entrepreneurs déclarent que leur propre entreprise en a déjà bénéficié. Là encore, Espagnols et Belges se démarquent du reste : ils sont, respectivement, 29% et 24% à les avoir déjà perçues. A eux s’ajoutent les chefs d’entreprise néerlandais (28%) et surtout hongrois (33%), avec des scores largement supérieurs à la moyenne européenne. La situation est tout autre au Royaume-Uni et en France, les deux autres pays où, certes, les entrepreneurs sont plus nombreux que la moyenne à déclarer que ces aides fiscales existent dans leur pays, mais dans lesquels seule une très faible minorité (respectivement 10% et 11%) en a déjà bénéficié. En France, cette proportion n’est que légèrement plus élevée chez les entreprises de plus grande taille (14%).
De même, la perception de ce type d’aide fiscale à l’étranger par les entreprises qui y sont implantées reste minoritaire : seulement 15% d’entre elles disent les avoir perçues, dont 28% des entreprises britanniques et 22% des hongroises.
Les entrepreneurs se déclarent satisfaits des aides fiscales en la matière mais sont nombreux à juger plus avantageux les dispositifs existant chez leurs voisins
Malgré le fait que seulement une faible proportion d’entreprises a effectivement perçu ces aides fiscales, les entrepreneurs européens ne semblent pas pour autant remettre globalement en cause les dispositifs existants. Une large majorité d’entre eux (72%) porte en effet un jugement positif sur les aides fiscales en faveur de la recherche et de l’innovation actuellement en vigueur dans leur pays. Signalons néanmoins que, pour la majorité d’entre eux, le dispositif fiscal existant est « plutôt positif » (61%), seulement 11% qui le qualifiant de « très positif ». Dans le détail, les jugements favorables sont plus nombreux chez les dirigeants d’établissements ayant déjà bénéficié de ces aides fiscales (83%). On notera par ailleurs que les pays dans lesquels les entrepreneurs sont les plus nombreux à déclarer avoir perçu ces aides se situent, soit tout en haut, soit tout en bas dans le classement de satisfaction. Ainsi, les jugements favorables atteignent 91% aux Pays-Bas (en tête du classement) et 75% en Espagne (3ème place), alors que les Belges (67% de jugements positifs) et les Hongrois (57%) apparaissent parmi les moins enthousiastes. Quant à la France, elle se situe là encore à un niveau très proche de la moyenne européenne (71%).
Pour une majorité relative de dirigeants européens (40%), les aides fiscales en faveur de la recherche et de l’innovation existant dans leur pays ne sont ni plus ni moins avantageuses que généralement ailleurs en Europe. Il reste qu’un quart d’entre eux (25%) estime que leur propre système fiscal est moins favorable sur ce point que ceux des autres pays européens, proportion trois fois supérieure à celle de ceux qui s’estiment à l’inverse privilégiés (8%). Les Pays-Bas font ici exception, 19% de ses entrepreneurs jugent les aides néerlandaises plus avantageuses, 11% seulement étant de l’avis contraire. Sur cette question, les dirigeants français ne dérogent pas à l’opinion majoritaire en Europe.
Mais il y a bien des points sur lesquels la France se démarque clairement de ses voisins européens. 83% des entrepreneurs français ayant perçu des aides fiscales en faveur de la recherche et de l’innovation déclarent que ces aides leur ont permis de faire une économie importante sous forme de baisse d’impôts ou de remboursement par l’Etat, contre seulement 48% en moyenne en Europe. Si les entrepreneurs français se montrent ici nettement plus enthousiastes que leurs collègues européens, c’est certainement en partie parce qu’ils sont plus nombreux que la moyenne à déclarer que les aides fiscales qu’ils ont perçues n’étaient pas à leur connaissance plafonnées (56%, contre seulement 28% au niveau européen). Assez logiquement, les dirigeants français sortent du lot également lorsqu’ils sont 87% à dire que les aides reçues les ont conduits à augmenter leurs dépenses de recherche et d’innovation. Au niveau européen, les avis sont là encore bien plus partagés, seuls 45% des entrepreneurs rejoignant le point de vue des dirigeants français, contre 52% qui sont de l’avis contraire.
Ces aides fiscales sont jugées importantes voire indispensables pour développer les investissements de recherche et d’innovation…
Indépendamment du nombre de bénéficiaires et du niveau de satisfaction mesuré dans chaque pays, une très large majorité de chefs d’entreprise européens (83%) s’accorde pour considérer important (pour 49% d’entre eux) voire indispensable (34%) le fait de percevoir des aides fiscales en faveur de la recherche et de l’innovation pour pouvoir développer les investissements en la matière. Seulement 15% des répondants considèrent en revanche qu’il s’agit de quelque chose de secondaire. Les entrepreneurs espagnols (97%), allemands (93%) et italiens (90%) sont particulièrement nombreux à adhérer à la thèse majoritaire. Les dirigeants français se situent ici à un niveau proche de la moyenne européenne, 45% d’entre eux jugeant ces aides importantes et 37% indispensables (soit un total de 82%, dont 88% des chefs d’entreprises de plus de 100 salariés). Enfin, les néerlandais sont ici quelque peu en retrait (71%), peut-être parce qu’ils sont particulièrement satisfaits du dispositif en vigueur dans leur pays et ressentent donc moins le besoin de rappeler l’importance de ces aides pour l’investissement en recherche et innovation.
… ainsi que pour renforcer la capacité à attirer des investissements étrangers
De l’avis des entrepreneurs européens, les aides fiscales en faveur de la recherche et de l’innovation ne sont pas importantes uniquement pour permettre aux entreprises d’investir en la matière. Selon trois quart d’entre eux (74%), elles renforcent de façon plus générale l’attractivité du pays qui les accorde aux yeux des potentiels investisseurs étrangers. Cet avis est majoritaire dans chacun des dix pays étudiés. Les entrepreneurs belges (84%) et, là encore, allemands (82%) et italiens (81%) apparaissent ici en tête du classement, les français se situant dans la moyenne (75%). Les néerlandais, une nouvelle fois, arrivent en queue de peloton (60%), juste devant les entrepreneurs du Royaume Uni (61%), pays qui, paradoxalement, est aujourd’hui importateur de recherche et développement, à l’inverse de l’Allemagne, la France étant quant à elle à l’équilibre*.
* Source : Booz & Company, Le Monde, 20 novembre 2008.