La perception du développement durable chez les habitants des Pays de la Loire

A l’occasion des 4èmes Assises Nationales du Développement Durable, Ipsos Public Affairs a réalisé pour le compte du Conseil régional des Pays de la Loire une enquête auprès de ses administrés sur leurs connaissances, perceptions, pratiques et attentes en matière de développement durable. Il en ressort que le concept est connu même s'il se résume souvent à la protection de l'environnement, que les citoyens y sont attachés même au prix d'un coût élevé, qu'ils attendent beaucoup en la matière des collectivités locales, tout en étant déjà prêts à s'investir personnellement.

Le développement durable : un concept connu mais encore flou…

Apparu dans un cercle d’experts vers la fin des années 80, le concept de "développement durable" est aujourd’hui, moins de vingt ans plus tard, relativement bien connu du grand public. Cette enquête, réalisée auprès des habitants des Pays de la Loire, révèle que presque deux tiers des Ligériens (64%) ont déjà entendu parler de ce concept, relativement récent et complexe. Parmi ces derniers, seulement 30% déclarent avoir une idée précise de sa signification. A l’inverse, 36% de l’ensemble des répondants n’ont jamais entendu parler de cette notion. Certaines catégories de la population revendiquent un niveau de connaissance plus élevé que la moyenne. C’est notamment le cas des personnes les plus diplômées –traditionnellement mieux informées quel que soit le sujet abordé - mais aussi, plus révélateur, celui des jeunes : trois quarts des 18-24 ans déclarent avoir déjà entendu parler de développement durable.

… et souvent réduit à la protection de l’environnement

Cependant, les Ligériens peinent à cerner ce concept dans toute sa complexité et l’associent presque systématiquement à la protection de l’environnement. Interrogés sur les actions concrètes que peut faire un citoyen qui agit en faveur du développement durable, deux tiers des répondants (67%) citent des actions qui concernent la protection de l’environnement telles que la gestion des déchets (et en particulier la pratique du tri sélectif), les économies d’énergie et d’eau ou encore l’utilisation plus fréquente des transports doux et en commun au détriment de la voiture. 13% des personnes interrogées citent des actions s’inscrivant dans un autre registre que celui de l’environnement, comme l’achat de produits issus du commerce équitable (9%). Ce dernier résultat témoigne de la notoriété grandissante du commerce équitable, comme le souligne le Baromètre Max Havelaar, réalisé par Ipsos depuis l’an 2000 (10% de notoriété en 2004, 74% aujourd’hui).
Plus significatif, le résultat est identique lorsqu’ils sont invités à citer des politiques ou des actions concrètes menées par des pouvoirs publics qui agissent en faveur du développement durable. Là encore, les actions concernant l’environnement arrivent très largement en tête, à commencer par celles visant à développer les énergies propres et renouvelables, développer le tri sélectif ou favoriser les transports en commun. Pourtant, les champs d’intervention potentielle des pouvoirs publics en faveur du développement durable sont nettement plus nombreux et variés que ceux du citoyen à titre individuel.  
Cette association spontanée du développement durable avec la protection de l’environnement ne signifie pas pour autant que les Ligériens excluent de ce concept des politiques d’ordre social ou économique. Ainsi, interrogés sur ce point, 84% des répondants estiment que les politiques favorisant la solidarité et la cohésion sociale dans des domaines comme la santé, le logement et l’éducation relèvent complètement (41%) ou partiellement (43%) du développement durable. Même constat pour celles visant à concilier croissance économique et bonnes conditions de travail pour les salariés (76%, dont 29% de réponses "oui, complètement").

Un fort attachement des citoyens au développement durable, malgré un coût jugé élevé

La très grande majorité des Ligériens (80%) considère par ailleurs que la mise en place, par les pouvoirs publics, de politiques visant à assurer un développement durable, entraîne de façon générale des dépenses élevées, voire très élevées (pour un quart des répondants). Cet avis est partagé par l’ensemble des catégories socio-démographiques.
Or, le niveau des impôts et des taxes est aujourd’hui l'une des principales préoccupations des Ligériens et des Français en général. Pourtant, une très large majorité des personnes interrogées (86%) estime que la mise en place de ces politiques est une nécessité, même si cela a un coût pour les contribuables.

Comment expliquer alors un tel attachement à des politiques perçues comme ayant un impact important, voire très important, sur les finances publiques et celles du contribuable ? L’évaluation de la situation actuelle, jugée critique dans un certain nombre de domaines qui relèvent du développement durable et, surtout, la confiance dans l’amélioration de l’état des choses grâce à l’action conjointe des différents acteurs politiques, économiques et sociaux, expliquent pour beaucoup ces résultats.
En effet, les Ligériens s’accordent pour qualifier de "préoccupante" la situation actuelle en matière de réchauffement de la planète (95%, dont plus de la moitié qui la jugent vraiment préoccupante) et de raréfaction des ressources naturelles (88%), mais aussi d’inégalités sociales en France (88%), d’accès à la santé, l’éducation et le logement par l’ensemble de la population en France (82%) ou encore d’inégalités entre les pays du Nord et du Sud (82%). Dans une moindre mesure, les répondants se montrent également inquiets au sujet des conditions de travail en France (71%) et du degré de présence des services publics et d’intérêt général en milieu rural et dans les quartiers d’habitat social sur le territoire français (67%).
Mais ce constat critique s’accompagne d’une vision optimiste : plus de neuf Ligériens sur dix (92%, dont 99% de ceux ayant une idée précise de la notion de développement durable) considèrent que la mise en place de politiques de développement durable par les pouvoirs publics peut avoir un impact positif concret sur la qualité de l’environnement et du cadre de vie de leurs administrés. Pour la plupart d’entre eux (72%), les effets de ces politiques ne seront perceptibles qu’à long terme, une minorité pariant en revanche sur de plus brefs délais.
Dans le détail, environ deux tiers des personnes interrogées pensent qu’une action conjointe des pouvoirs publics, associations, entreprises et citoyens permettrait d’améliorer, pour les générations futures, la situation en matière d’accès à la santé, l’éducation et le logement par l’ensemble de la population en France (71%), de présence des services publics en milieu rural et dans les quartiers défavorisés (70%), de réchauffement de la planète (68%), de conditions de travail en France (65%), de raréfaction des ressources naturelles (65%) et d’inégalités sociales en France. Les avis sont en revanche plus partagés en ce qui concerne l’impact réel d’une telle action conjointe sur la réduction des inégalités entre les pays du Nord et ceux du Sud (53% estimant l’amélioration possible, contre 41% qui sont de l’avis contraire).   
Les Ligériens semblent ainsi avoir pris conscience de l’ampleur du défi tout en restant confiants quant à la possibilité d’améliorer l’état des choses pour les générations futures.

Les collectivités locales perçues comme des acteurs majeurs du développement durable

Interrogées sur la prise en compte du développement durable par les différents acteurs dans leurs politiques ou leurs pratiques quotidiennes, les personnes interrogées se situent elles-mêmes en haut de la hiérarchie. Ainsi, presque huit Ligériens sur dix (79%) déclarent avoir aujourd’hui des comportements tout à fait (20%) ou plutôt (59%) compatibles avec un développement durable. S’il y a très certainement ici un léger phénomène de "sur-déclaration" (une majorité relative des répondants estimant en même temps que "les citoyens en général" ne prennent pas en compte le développement durable au quotidien…), ces scores témoignent a minima d’une réelle prise de conscience des citoyens sur l’impact de leurs gestes quotidiens et d’une concrétisation de cette conscience en actions qui est loin d’être négligeable….    
Classées immédiatement après dans la hiérarchie, apparaissent les collectivités locales. Presque trois quarts des Ligériens considèrent que leur commune et/ou leur communauté d’agglomération (73%), leur département (73%) et leur région (71%) prennent actuellement en compte le développement durable dans leurs politiques. Signalons tout de même que ceux qui sont tout à fait d’accord avec ces affirmations représentent seulement entre 15 et 20% de l’ensemble des personnes interrogées. Sur ce même sujet, les avis à l’égard de l’Union européenne sont en revanche plus partagés (seuls 53% estiment qu’elle tient compte du développement durable, contre 36% qui sont de l’avis contraire) ; ils sont même majoritairement critiques en ce qui concerne l’Etat (44%, contre 50%). Ces résultats contrastés sont tout d’abord le reflet du décalage qui existe aujourd’hui, en termes d’image auprès des Français et en l’occurrence des Ligériens, entre d’une part, les collectivités locales et, de l’autre, l’Etat. Plus spécifique à l’enquête, le fait que les Ligériens associent principalement le « développement durable » à la protection de l’environnement et plus particulièrement à des politiques d’ordre local tel que la gestion des déchets et du système de transports contribue également à expliquer ce différentiel.
Enfin, les entreprises apparaissent comme l’acteur ayant le plus de retard dans la matière : seulement 41% des répondants estiment qu’elles prennent aujourd’hui en compte le développement durable dans leurs politiques et pratiques quotidiennes, contre 50% qui sont de l’avis contraire. Soulignons ici que ce dernier score grimpe à 66% chez ceux ayant une idée précise de la notion de développement durable. 
Malgré ce constat mitigé, les Ligériens se montrent là encore optimistes : trois quarts d’entre eux (75%) ont le sentiment que la prise en compte du développement durable par les pouvoirs publics est une tendance de fond appelée à se développer au cours des prochaines années. Ce sentiment est particulièrement fort chez ceux ayant aujourd’hui une idée précise de la notion de développement durable (85%). Partagé par toutes les catégories de population, il est majoritaire même chez ceux estimant que la mise en place de telles politiques n’est pas une nécessité. A l’inverse seulement 21% de l’ensemble des personnes interrogées affirment qu’il s’agit d’une mode et qu’on en parlera moins dans les prochaines années.  

De la prise de conscience au geste concret : un investissement significatif de la part des citoyens

En effet, les Ligériens semblent avoir pris conscience de l’ampleur du défit mais affirment également avoir des comportements quotidiens qui vont dans le sens d’un développement durable.
Ainsi, dans le détail, une très large majorité d’entre eux déclare trier systématiquement ou presque les déchets ménagers (86%). En effet, toutes les enquêtes réalisées sur le sujet montrent que les Français de façon générale ont pleinement intégré le tri à leur vie quotidienne. La limitation de sa propre consommation d’eau (73% le font systématiquement ou presque) et de sa consommation d’énergie (70%) apparaissent aussi comme des pratiques très répandues.  
Les résultats sont plus mitigés lorsqu’il s’agit d’éviter d’acheter des fruits et des légumes non saisonniers (42% des répondants le font systématiquement ou presque, 34% seulement de temps en temps, 23% ne le font jamais ou presque), d’utiliser des produits recyclés (33% ont vraiment intégré cette pratique à leur vie quotidienne), de privilégier l’utilisation des transports doux et en commun (28%) ou encore d’acheter des produits issus du commerce équitable (15%). On notera ici que les pratiques les plus contraignantes (comme la limitation de l’utilisation de la voiture) ou impliquant un coût supplémentaire (l’achat de produits "commerce équitable") sont les moins répandues.
En termes de sous catégories de population, on notera que la pratique de ces actions compatibles avec un développement durable augmente avec l’âge de la personne interrogée. Moins surprenant, ces pratiques sont également plus fréquentes chez les personnes ayant une idée très précise de ce que signifie l’expression développement durable.

De fortes attentes en matière de développement durable

Les Ligériens manifestent par ailleurs de fortes attentes à l’égard des pouvoirs publics en matière de développement durable. Rien de très étonnant au regard de leur évaluation critique de la situation actuelle, de leur confiance quant à la capacité potentielle d’une action conjointe à inverser cette tendance et du constat mitigé qu’ils font de la prise en compte actuelle du développement durable par les pouvoirs publics.  
Ainsi, une large majorité d’entre eux jugent prioritaires les mesures visant à développer les énergies renouvelables (75%), à informer les habitants sur les bons gestes quotidiens à avoir pour préserver l’environnement (71%) ou à favoriser les transports en commun (68%). Dans une moindre mesure, les politiques qui relèvent des dimensions non-environnementales du développement durable sont également soutenues par la population : 68% des répondants jugent prioritaire le développement de programmes de formation et de reconversion pour faciliter la réinsertion sociale des demandeurs d’emploi et 54% accordent une importance maximale au maintien et au renforcement des services publics et d’intérêt général en milieu rural et dans les quartiers d’habitat social.
Si les Ligériens accordent une telle importance au fait d’informer les habitants sur les bons gestes quotidiens à avoir pour préserver l’environnement, c’est certainement parce qu’ils pensent que cela peut avoir un impact concret sur le comportement des citoyens, qu’ils jugent d’ailleurs moyennement investis dans la cause du développement durable. En tout cas, en ce qui concerne leur cas personnel, ils sont massivement convaincus (84%) du fait que, s’ils étaient mieux informés, ils changeraient certainement (38%) ou probablement (46%) certaines pratiques quotidiennes. Ce sentiment est partagé par l’ensemble des catégories de population, y compris ceux qui n’ont jamais entendu parler de développement durable et ceux qui ont les comportements les moins eco-citoyens.   

Enfin, l’investissement des Ligériens en matière de développement durable et leur souhait de s’y impliquer davantage ne se limite pas à la sphère privée : plus de 80% des répondants jugent important que les pouvoirs publics impliquent directement les citoyens dans la détermination des choix en matière de développement durable par le recours à des débats publics ou des référendums. 39% d’entre eux estiment même que cela est plus important que dans d’autres domaines…

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