La Réunion tient à rester un DOM
La réforme de la décentralisation engagée par Jean-pierre Raffarin inquiète une part de classe politique réunionnaise, qui craint pour le statut de l'île. Une étude réalisée par Ipsos Océan Indien pour Radio Freedom, Le Journal de l'Ile et Antenne Réunion montre que la population souhaite très majoritairement rester un Département d'Outre Mer, et ne revendique ni l'indépendance, ni même la possibilité d'évoluer vers un statut d'autonomie de type Territoire d'Outre Mer.
Le "projet de loi constitutionnel relatif à l'organisation décentralisée de la République", et surtout les articles 72 à 74, qui visent à transférer des compétence aux autorités locales, et ouvrent des passerelles entre les statuts de département et de territoire d'outre mer, suscite l'inquiétude d'un certain nombre de personnalités politiques réunionnaises, de gauche mais aussi de droite (*). L'état de l'opinion sur ce débat est pourtant aujourd'hui très clair. Près d'une personne sur deux (48%, +13 points en un mois), estime que "le statut actuel, sans changement, paraît le plus adapté pour la Réunion dans les quinze ans à venir" tandis que 38% (-12 points) opteraient pour "conserver le statut actuel, avec plus de responsabilités aux assemblées locales (région et département)". Seulement 6% des répondants jugent "qu'un statut d'autonomie, avec des lois spécifiques décidées par les assemblées locales" serait préférable, et 4% penchent plutôt pour "l'indépendance". En un mois, le taux de sans réponse à cette question a chuté de 9 à 3%. Très attaché à la métropole, les Réunionnais ne veulent donc pas, dans une très large majorité, entendre parler de changement radical de statut. D'ailleurs près de huit personnes sur dix (79%) ne souhaite même pas "que soit inscrite dans la constitution française la possibilité pour la Réunion de passer du statut de département d'outre mer à celui de territoire d'outre mer, c'est à dire à un statut d'autonomie".
Très "intéressés" (73%) par un débat qu'ils jugent "important" (80%), bien que "difficile à comprendre" (67%), les Réunionnais regrettent "un niveau d'information disponible insuffisant" (82%). Ils ne font finalement majoritairement confiance qu'aux "associations" (49% contre 40% de défiants), au "gouvernement et au ministère de l'outre-mer" (48% leur font confiance contre 44% d'avis contraire), voire "aux entreprises et à leurs représentants" (47% / 46%) pour "prendre les bonnes décisions sur le statut des DOM en général, et de la Réunion en particulier". Les interviewés se méfient davantage des partis politiques locaux, que ce soit "Freedom" (53% ne lui font pas confiance), la Droite réunionnaise (54% de défiants) ou les socialistes réunionnais (53%). La cote de confiance du Parti Communiste Réunionnais est encore plus faible (20%), le PCR s'étant il est vrai désolidarisé du PCF en 1959 pour justement revendiquer l'autonomie de l'île.
(*) Cf. en particulier les amendements que Paul Virapoullé, sénateur-maire centriste de Saint-André, veut imposer au gouvernement. Le texte adopté en Conseil des ministres trace pourtant clairement une ligne de démarcation entre les Dom et les Tom, et rappelle "qu'aucun passage" de l'un à l'autre des régimes ne peut intervenir sans le consentement des populations concernées. Mais à ce droit de veto populaire, il veut ajouter un verrou constitutionnel, en excluant la Réunion de ce "droit de passage", ce qui bloquerait tout glissement de l'île vers le statut d'autonomie. Il redoute par ailleurs qu'un transfert de compétences accru - le texte prévoit qu'une collectivité locale pourra non seulement adapter des dispositions nationales, mais édicter également des règles dans des matières relevant de la loi - débouche à terme, sur "un pouvoir législatif local déguisé", et que la Réunion s'écarte trop du droit commun, notamment en matière de droit du travail, d'éducation ou d'aides sociales.
Fiche technique :
Pour répondre aux objectifs d’étude ainsi définis, nous avons mené une étude quantitative par téléphone auprès d’un échantillon de 509 individus, représentatifs des 15 ans et plus à la Réunion, par la méthode des quotas sur le sexe, l’âge et la situation professionnelle du répondant, après stratification des appels par commune.
Dates du terrain : du 24 au 26 octobre 2002. Marge d’incertitude sur l’ensemble = +/- 4.5 %.
Résultat arrondis au pourcent le plus proche (risque de cumul différent de 100%, cumul d’arrondis)