Le Brexit vu de France : « le plus vite sera le mieux »

« Choc », « tragédie », « éclatement du Royaume-Uni et de l’Europe », « domino infernal », « cataclysme », voilà quelques-uns des mots suite au “Brexit”, ce fatidique 23 juin quand 51,9% des Britanniques (17,4 millions de personnes) ont exprimé leur souhait de sortir de l'Union européenne. Depuis, le Premier ministre (qui avait simultanément organisé le référendum et milité pour le maintien) a démissionné, remplacé par Theresa May et les médias suivent le feuilleton des futures négociations, ou d’un « Breversal » : un nouveau référendum pour le retour ! 

Est-ce aussi grave et préoccupant pour les opinions publiques européennes, notamment en France ?  
Ipsos Global @dvisor (1) permet d’y répondre sans ambiguïté.

Ce n’est pas un sujet en France, mais ce n’est pas une raison pour faire des cadeaux aux Anglais.
C’est une vraie préoccupation pour les nouveaux entrants et ceux qui pensent que le Royaume-Uni impulsait une dynamique libérale et atlantiste à laquelle ils étaient favorable.
Et personne ne pense que le Brexit fera du bien à l’Europe, ni qu’elle en sortira renforcée.

Seuls 41% des Français s’inquiètent de l’impact du Brexit sur l’Union Européenne, loin derrière l’Italie (51%), la Belgique (55%) et l’Allemagne (56%). En revanche, les plus inquiets des conséquences sur l’UE sont les Suédois (68%) les Polonais (65%), les Espagnols (64%) et les Hongrois (63%).

Pensez-vous que le Brexit était une bonne ou une mauvaise décision pour l'Union européenne ?

Les Français ne se sentent pas non plus spécialement affectés par le Brexit. Près des deux tiers ne ressent rien quand on leur demande si la décision britannique les rend heureux (14%), tristes (25%) ou ni l’un l’autre (60%). La différence avec les pays les plus « attristés » est flagrante, notamment en Suède (48%), Hongrie et Espagne (40%) ou encore en Pologne (38%).
De même, si on leur demande dans quelle mesure le Brexit les préoccupe à l’égard de l’avenir, on va retrouver les Français en dernière place, avec seulement 31% qui se déclarent plus inquiets suite au référendum, 13% plus optimistes et 56% que le Brexit ne trouble pas. À l’inverse, les Suédois vont se manifester comme les plus pessimistes (53%), suivis des Hongrois (51%) et des Polonais (49%).

À propos des conséquences du Brexit sur l’Europe, les Français sont aussi les moins persuadés qu’elle en ressortira affaiblie (37%), à l’opposé de 64% des Polonais ou de 62% des Suédois et des Hongrois. À ce sujet, seulement 11% (sur la base du total des neuf pays européens du panel) envisagent que le Brexit renforcera l’Union Européenne.

Ces scores montrent la fracture à l’œuvre entre la vieille Europe des pays fondateurs, et les pays qui regardent le Royaume-Uni comme une locomotive économique dont ils peuvent tirer profit.

Les Britanniques eux-mêmes se sentent un peu perdus, entre ceux qui estiment que le Brexit a été une mauvaise décision (51%), les 49% qu’il rend tristes ou les 61% qui s’inquiètent de son impact sur l’UE et les 64% qui déclarent qu’il va affaiblir l’économie du Royaume-Uni. On notera le score de ceux qui pensent que la situation économique est bonne dans leur pays : il perd onze points de juin à juillet, de 48% à 37% (2).

C’est sur la manière de gérer les négociations que les Français sont les plus durs : 19% seulement sont d’accord avec l’idée que l’Union Européenne doit offrir des conditions de sortie favorables au Royaume-Uni, et 36% s’opposent à des accommodements avec le Royaume-Uni suite au Brexit.
Les autres pays, comme par hasard la Hongrie (36%), la Pologne (31%) et la Suède (28%) souhaitent au contraire que la pilule ne soit pas trop amère pour les Anglais.

Le traditionnel désintérêt des Français pour les questions internationales, les inquiétudes liées au terrorisme (3) et leur pessimisme habituel peuvent aussi expliquer le faible impact du Brexit : c’est un élément de plus qui nourrit leur défaitisme, 13% estimant que la situation économique est actuellement bonne et 6% qu’elle va s’améliorer dans les six mois, la dernière position du tableau sur les vingt-cinq pays interrogés (2).

Pour une fois, c’est peut-être François Hollande qui a le mieux résumé l’opinion publique française à l’égard du Brexit : « le plus vite sera le mieux ». Quant à la nomination de Michel Barnier, elle devrait faire plaisir à 19% des Français, eu égard aux réactions des médias britanniques…

(1) Étude réalisée par Ipsos dans 16 pays, du 24 juin au 8 juillet, sur 12 525 individus constituant un échantillon représentatif de la population âgée de 16 à 64 ans, via l’Ipsos Online Panel system. Les pays interrogés sont : Allemagne, Afrique du Sud, Australie, Belgique, Canada, Espagne, Etats-Unis, France, Hongrie, Inde, Italie, Japon, Pologne, Royaume-Uni, Russie, Suède. Les neuf pays européens représentent plus des ¾ du total de la population.
(2) The Economic Pulse of the World July 2016. Citizens in 25 Countries Assess the Current State of their Country’s Economy for a Total Global Perspective.
(3) La perception et les implications du terrorisme islamiste feront l’objet d’une autre note.

Auteur(s)

  • Yves Bardon
    Yves Bardon
    Directeur du programme Flair, Ipsos Knowledge Centre

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