Le dopage dans le cyclisme ne choque plus l'opinion

L'enquête Ipsos/L'Equipe réalisée en France, en Allemagne, en Espagne et en Italie, révèle l'ambiguïté de l'opinion face à la question du dopage dans le cyclisme. Pour une large majorité des personnes interrogées le problème est connu, généralisé, et discrédite le sport. La lutte anti dopage est encouragée, et on demande à ce que les cas de dopage soient systématiquement rendus publics. Mais dans le même temps, on estime majoritairement que les médias parlent trop des affaires. Surtout, pour deux personnes sur trois, "avec ou sans dopage, les coureurs restent de grands champions".

Auteur(s)
  • Jean-François Doridot Directeur Général Public Affairs
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"Quels sont à votre avis les sports les plus touchés par le dopage" ? L'athlétisme (46% de citations) et le football (42%, 73% en Italie) sont montrés du doigt. Mais on loin des scores qu'atteint le cyclisme, cité spontanément par 80% des interviewés, et 97% des Français. Sur cette question comme sur les autres, l'Allemagne est plus en retrait (62% de citations), la popularité du champion Jan Ullrich expliquant à chaque fois des réponses plus mesurées.

Le dopage dans le cyclisme n'est plus aujourd'hui perçu comme un phénomène marginal. "Une majorité de coureurs" seraient concernés selon deux Français sur trois, 40% des Italiens et des Espagnols ; les autres hésitent entre "une minorité d'entre eux" (23%) et "seulement quelques exceptions" (26%, 50% en Allemagne). Mais sur l'ensemble des quatre pays, 45% des sondés voient dans le dopage un phénomène banalisé.
Dès lors, les révélations sur le dopage de Lance Armstrong, légende de la discipline et vainqueur des 7 derniers Tour de France, n'ont pas franchement choqué. Elles ont "laissé indifférent" un bon tiers de l'échantillon (43% en France), "déçu mais pas surpris" une personne sur quatre (40% en France). Seulement 18% des interviewés ont été "déçus et surpris" (24% en Allemagne), et 12% "n'y croient pas" (5% en France). La proportion d'indifférents est un peu plus forte si on ne retient que l'avis des personnes déclarant s'intéresser au tour de France, la proportion de "surpris" également, mais on reste dans les mêmes ordres de grandeur.

Plus globalement, la perception du cyclisme dans l'opinion n'a pas radicalement changé depuis les premières affaires révélées. Si tout de même 21% des interviewés déclarent s'intéresser "plutôt moins qu'avant" aux grandes épreuves cyclistes, pour les trois quarts des Français et des Allemands, les deux tiers des Italiens et des Espagnols, cela n'a rien changé. L'opinion publique soutient pourtant massivement la lutte contre le dopage : 80% des personnes interrogées souhaiteraient que les cas soient systématiquement rendus publics, et les deux tiers sont pour l'analyse rétroactive des anciens échantillons avec les nouvelles méthodes de dépistage, du type de celles qui ont permis de confondre Lance Armstrong. La crédibilité du cyclisme de haut niveau, entachée selon une personne sur deux - 66% en France - serait à ce prix.
Mais dans le même temps, le dopage est perçu comme une fatalité. En France surtout, où la majorité des sondés pense qu'il est "impossible de bien figurer au classement du Tour de France sans se doper" (71%). Du coup, en parfaite contradiction avec la demande d'information sur les cas de dopage, la majorité des sondés dans chaque pays, et 60% des Français, estiment que "les médias parlent trop des affaires". Le dopage serait presque devenu un mal nécessaire. Et les coureurs cyclistes, "avec ou sans dopage, restent de grands champions", selon les deux tiers des Français, des Allemands et des Espagnols, et 54% des Italiens.

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  • Jean-François Doridot Directeur Général Public Affairs

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