Le tourisme éthique, en voie de développement
Si l'on se fie à l'intérêt manifesté par les Français au "tourisme éthique" – une part des bénéfices engrangés par l'industrie du tourisme dans les pays pauvres serait reversée pour des actions de développement durable - ce principe devrait se développer. Les personnes interrogées par Ipsos pour l'association Tourism for Development sont prêtes à privilégier les professionnels du tourisme labellisés "éthique", par principe, mais aussi parce qu'un tel label les rassurerait quant aux conditions d'accueil dans le pays.
De part l'implantation géographique de son activité, le secteur du tourisme a un rôle à tenir dans la recherche d'équité dans les échanges Nord-Sud : les trois quarts des personnes interrogées estiment "qu'il serait légitime que l'industrie du tourisme finance des projets de développement durable dans les pays pauvres où elle s'implante", contre une minorité (19%) qui juge "que le tourisme contribue déjà beaucoup au développement du fait des retombées directes de ses investissements (apport de devises, emplois locaux)".
Outre sa justification morale, une plus forte implication de l'industrie du tourisme dans l'aide aux pays pauvres permettrait "d'améliorer l'image des touristes et de diminuer les risques de violence à leur égard", selon les trois quarts des interviewés. Parallèlement, cela inciterait aussi les "voyageurs"(1) à découvrir des destinations qu'ils délaissent pour le moment. La moitié des voyageurs interrogés (53%) déclare en effet "avoir hésité ou renoncé à visiter certains pays à cause de la violence morale ou physique qui y règne". Ceux qui ne sont partis que dans les pays "riches" au cours des trois dernières années, et les plus âgés, sont encore plus nombreux à partager cette opinion.
La quasi totalité des voyageurs souhaite donc que les professionnels du tourisme adhèrent à la démarche de "Tourism for Development" en labellisant certaines de leurs prestations. Au-delà d'une simple adhésion de principe à un concept dans "l'air du temps", l'intensité des résultats sur cette question (65% souhaitent "tout à fait"que le secteur du tourisme s'engage dans cette voie) témoigne d'une véritable attente de la part des consommateurs.
Même s'il est évident que certains critères restent importants dans le choix d'un prestataire en matière de voyage (prix, proximité, qualité de la prestation…), la mise en avant d'un label "tourisme éthique" peut donc donner un avantage concurrentiel aux professionnels qui en bénéficient. Pour 81% des voyageurs interrogés, ce label "améliorerait l'image qu'il a du prestataire" ; 78% sont encore d'accord avec la suggestion qu'un tel "label donnerait davantage envie de le choisir".
En plus des bénéfices en terme d'image, cette démarche pourrait aussi favoriser le développement du tourisme vers les pays "pauvres" : deux voyageurs sur trois considèrent que le label "les rassureraient sur les conditions d'accueil des populations locales", et "que cela leur donnerait envie de choisir une destination qu'ils avaient jusque là évité en raison de la pauvreté du pays".
Au total, si le "tourisme éthique" souffre encore d'une fort déficit de notoriété (90% des Français interrogés par Ipsos en octobre dernier (2) n'en avaient pas entendu parler), on peut penser qu'il va connaître un développement similaire au "commerce équitable". Ne serait-ce que parce que les catégories qui achètent le plus de produits issus du commerce équitable (cadres, hauts revenus, urbains) sont également celles qui choisissent le plus souvent des pays "pauvres" comme destination de vacances : dans notre échantillon, la moitié des cadres supérieurs, 41% des "hauts-revenus" et 38% des franciliens sont partis dans un pays "pauvre" au cours des trois dernières années.
(1) sont désignés comme "voyageur" dans cette étude les personnes qui se sont rendus en vacances à l'étranger au cours des trois dernières années, soit 43 % de l'échantillon
(2) enquête Ipsos - Plateforme pour le Commerce Equitable