Les Français reprennent vigoureusement espoir

L'époque de la "sinistrose" est bien révolue, d'après une enquête Ipsos-le Point qui révèle une spectaculaire amélioration du climat économique et politique. Le gouvernement Jospin en tire tout naturellement profit.

Les humeurs économiques et politiques sont souvent cousines. Lorsque les affaires reprennent et que la situation de l'emploi s'en ressent, le pouvoir en place est rapidement regardé d'un meilleur oeil. C'est ce qui se passe, de manière très spectaculaire, aujourd'hui. L'enquête Ipsos-le Point sur le climat politique, économique et social en France montre que celui-ci s'est considérablement amélioré dans la dernière période.

La reprise de la croissance à un rythme soutenu et les premières statistiques de baisse significative du chômage commencent à être perçues par les Français. Pour la première fois depuis des lustres, plus nombreuses sont les personnes interrogées qui ont "l'impression que la situation économique s'améliore" que celles qui ressentent subjectivement une détérioration. Le solde positif n'est que de trois points, mais il était encore négatif de 15 points en septembre 1997 et de 51 points en février de l'année dernière, près de la fin du gouvernement Juppé.

Mieux, les anticipations sont plus favorables que le constat. Une majorité, absolue cette fois, de sondés pensent que la situation économique du pays va s'améliorer "dans les mois qui viennent". Sur cette question, le solde positif des opinions est de 17 points aujourd'hui, contre seulement 5 points en septembre dernier et une balance négative de 21 points en février 1997 !

Cet optimisme économique se traduit par un prudent mais réel espoir de baisse du chômage. Le fléau numéro un de la société française semble, pour la première fois, moins menaçant. Une nette majorité relative de personnes interrogées (39% contre 26%) prévoient que "le nombre des chômeurs va baisser dans les mois qui viennent". Sur ce point, le sentiment des Français était encore largement négatif en septembre et véritablement catastrophiste sous le gouvernement précédent.

Dans ce contexte, presque euphorique par contraste avec la "sinistrose" de la période antérieure, la politique du gouvernement Jospin est applaudie de bon coeur. Une majorité absolue de sondés croient "que la politique économique du gouvernement réussira". Cet indice est en hausse de dix points par rapport à l'enquête précédente. Environ quatre électeurs de droite sur dix parient sur la réussite économique du pouvoir de gauche...

Au bout d'un an à l'hôtel Matignon, 59% des Français jugent positivement le bilan de Lionel Jospin. Les réponses opposées ne recueillent que 29%. Les réponses ne sont franchement négatives que parmi les sympathisants du FN. Ceux du RPR ne sont que très mollement mécontents de l'actuel premier ministre tandis que les proches de l'UDF ont plutôt tendance à l'approuver.

Par secteurs, la crédibilité des politiques gouvernementales est également fort enviable. Le taux de confiance est même maximal (72%) à propos de "la mise en place de l'euro" alors que la naissance de la monnaie unique européenne était supposée susciter peurs et inquiétudes dans l'opinion. Les principales réformes de la première année du gouvernement Jospin (35 heures, emplois pour les jeunes) sont quasiment plébiscitées. Le pouvoir actuel ne fait moins bien que son prédécesseur, sur les mêmes questions, que dans deux domaines (la lutte contre l'immigration clandestine et la réduction des impôts) dans lesquels la majorité ne fait "pas confiance" à la gauche gouvernante. Le scepticisme de l'opinion est également très net dans quatre autre secteurs: la réduction des inégalités, l'amélioration des conditions de vie en banlieue, la réduction des déficits publics et même la diminution du chômage. Les Français n'osent toujours pas croire vraiment que leur vie quotidienne, particulièrement celle des moins favorisés, puisse vraiment s'améliorer grâce à l'action des pouvoirs publics. Relevons toutefois le bon niveau de "confiance" obtenu au sujet de la "sécurité des Français", un thème où la gauche a longtemps manqué de crédibilité.

Le jugement favorable sur le bilan de Jospin est naturellement d'abord la conséquence de l'amélioration de la conjoncture. Il est d'ailleurs estimé positivement par 81% des sondés qui ont l'impression que la situation économique s'est améliorée, contre seulement 38% chez ceux qui croient en sa détérioration. De même, le gouvernement est-il approuvé par 70% des personnes qui anticipent une baisse du chômage, au lieu de 41% parmi les tenants de l'opinion inverse.

Si Jospin est bel et bien porté par le nouvel optimisme ambiant, un autre résultat de cette enquête est plus accablant pour l'opposition. Moins d'un Français sur cinq pense que la situation économique de la France serait "meilleure qu'aujourd'hui si la droite avait gagné les élections législatives de 1997". Une majorité relative (39%) estime, à l'inverse, qu'elle serait "moins bonne". Même dans l'électorat de droite, la croyance en une performance meilleure d'une autre majorité est très peu assurée. La traditionnelle image de la droite, socialement contestée mais économiquement efficace, n'est plus de saison.

Et si la gauche gouvernante était, à son tour, meilleure sur le terrain économique que dans le domaine social ? Le retour de la croissance ne fait pas oublier à l'opinion le creusement des inégalités sociales. L'analyse détaillée de cette enquête révèle que tout le monde n'est pas équitablement optimiste. Le sentiment d'une amélioration culmine chez les cadres supérieurs (62%), les personnes bénéficiaires de hauts revenus (62%) et d'un niveau d'éducation supérieur (60%). Inversement, les ouvriers (52%), les revenus les moins élevés (47%) et les personnes de niveau d'instruction primaire (55%) ressentent encore majoritairement un détérioration de la situation économique. La même topographie sociologique s'applique aux réponses concernant le bilan de Jospin. Son gouvernement a beau être de gauche, ce sont les catégories sociales favorisées qui apprécient le plus son action.

Cet effet peut s'expliquer par un retard de réaction des milieux les plus modestes. Chacun n'intègre pas au même rythme les évolutions d'une réalité économique d'abord révélées abstraitement par des indices statistiques. Mais il n'est pas impossible non plus que la dynamique économique actuelle, tout en revigorant le moral d'une majorité de la population, n'accentue l'écart entre les réussites des uns et les échecs des autres.

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