Les jeunes se préoccupent des Droits Humains

L'étude Ipsos-Les clés de l'actualité confirme l'intérêt des jeunes pour les questions relatives aux droits humains. L'enquête dévoile même un véritable potentiel de mobilisation des adolescents pour la défense de ces droits, en France comme dans le reste du monde.

Auteur(s)
  • Jean-François Doridot Directeur Général Public Affairs
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Les adolescents se montrent aujourd'hui extrêmement préoccupés par les atteintes aux droits humains dans le monde, mais également en France. Près des trois-quarts des 13-17 ans interrogés se déclarent préoccupés par les atteintes aux droits humains (72%), les plus âgés étant les plus impliqués. 61% des adolescents jugent d'ailleurs que les violations des droits humains sont fréquentes en France, contre seulement 6% d'avis contraire.La critique à l'égard des pratiques d'Etat, notamment en matière de police et de justice, est très sévère. Ainsi, la grande majorité des adolescents interrogés estime qu'au cours de ces dernières années : - "des mauvais traitements ont été infligés à des prévenus ou à des prisonniers par des membres des forces de police ou de gendarmerie" (81%)- -qu'il y a eu "mise en détention provisoire de personnes de façon totalement injustifiée" (80%), - qu'il y a eu une "utilisation abusive d'armes à feu par les forces de police ou de gendarmerie" (64%)- qu'il y a eu enfin "expulsion de personnes vers des pays étrangers où elles risquaient l'emprisonnement, la torture ou la mort pour des raisons politiques ou religieuses" (59%).

Sur toutes ces questions, l'Etat français est montré du doigt. Les jeunes ont certes le sentiment que les atteintes aux droits humains sont plus fréquentes dans le reste du monde (88%), mais estiment néanmoins que de telles situations sont intolérables "au pays de la Déclaration des Droits de l'Homme". Ils se montrent de plus pessimistes quant à l'évolution des choses, près d'un sur deux jugeant que tout va aller en s'aggravant (46%). Plus de la moitié d'entre eux (51%, plutôt les plus âgés) estime que les responsables politiques français ne se préoccupent pas assez de ces problèmes (contre 41% qui pensent le contraire). Peut-être encore plus préoccupant pour la classe politique, la grande majorité des adolescents a le sentiment qu'aujourd'hui, des Etats comme la France ont une part de responsabilité dans le non-respect des Droits Humains (80%). Ils souhaiteraient que les Etats en général, et la France en particulier, s'implique davantage sur ces questions. Par exemple, les jeunes sont nettement favorables à une plus grande sévérité face aux personnes impliquées dans des actes de torture.

L'enquête nous apprend par ailleurs que les jeunes ont une conception relativement large de la notion de droits humains. Ainsi, la très grande majorité d'entre eux considère que "la vente d'armes à des dictatures" (86%) ou "les inscriptions ou propos racistes ou antisémites" (78%) constituent des atteintes aux droits humains.

Plus généralement, ils englobent également pour la plupart "les inégalités dans le travail entre les hommes et les femmes" (76%),"la surpopulation dans les prisons" (73%), "la mise en détention provisoire prolongée d'une personne avant son jugement" (69%), "la suppression des indemnités chômage aux chômeurs longue durée"(62%), "l'expulsion des étrangers sans papiers" (57%) voire, de façon plus minoritaire, le fait pour un objecteur de conscience de devoir faire un service civil de 20 mois à la place du service militaire normal de 10 mois (52%). Cette conception plutôt large des droits humains est aussi très certainement l'illustration du décalage que les adolescents perçoivent entre les aspirations des responsables politiques et les leurs : ils ont aujourd'hui une perception beaucoup moins restrictive et placent dans la sphère de droits humains des sujets qui ne sont pas toujours considérés comme tels par les élus.

Même si leur conception des droits humains est comme on l'a vu relativement large, certains sujets les touchent davantage, et notamment les violations des Droits spécifiques aux enfants et aux adolescents. Ainsi, pour 80% d'entre eux, c'est en priorité sur "l'esclavage et le travail des enfants" que les Etats doivent agir. Juste après par ordre de priorité, 55% des adolescents estiment que les Etats doivent agir contre "l'enrôlement des jeunes comme soldats pour aller faire la guerre". Viennent ensuite la torture (28%), ainsi que la peine de mort (22%) et enfin le non-respectt des libertés politiques, syndicales ou religieuses (13%).

Les prises de position des 13-17 ans sur des sujets d'actualités sont très intéressantes. Ainsi, la majorité des jeunes se déclare contre l'application de la peine de mort (66%), alors que dans l'ensemble, les Français sont plus partagés. En ce qui concerne la torture, 73% des jeunes interrogés pensent qu'elle est toujours inacceptable, "contre quiconque et quelles qu'en soient les circonstances", contre 24 % qui estiment que "dans certains cas exceptionnels, on peut accepter le recours à des actes de torture".

Les jeunes ne se disent pas seulement préoccupés par les droits de l'homme, ils le prouvent par des actes. En effet, beaucoup se sont déjà mobilisés d'une façon ou d'une autre, au cours des deux dernières années, en faveur d'une cause ou d'une personne victime selon eux d'atteintes aux Droits Humains. Ainsi, 55% des jeunes ont déjà eu "des discussions avec des proches sur les Droits Humains" (et 73% des adolescents de 17 ans), 41% ont déjà fait "un exposé sur le sujet" (51% des adolescents de 17 ans), 31% ont déjà "envoyé une lettre de protestation ou signé une pétition" (49% des jeunes de 17 ans), 24% ont "donné de l'argent à une association ou à une ONG", 23% ont "participé à une manifestation pour défendre les Droits Humains" (39% des jeunes de 17 ans), 22% ont déjà "écrit dans un journal de leur collège ou de leur lycée à ce sujet" et 10% ont "créé ou rejoint une association dans le but de défendre ces droits". Au final, 71% ont entrepris au moins l'une de ces actions en faveur des Droits Humains. Surtout, 24% (soit près du quart) ont déjà fait plus de trois de ces actions (35% des adolescents de 17 ans). Une mobilisation intéressante pour une jeunesse que l'on dit souvent désabusée.

Auteur(s)
  • Jean-François Doridot Directeur Général Public Affairs

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