Les pharmaciens sont aussi des "éducateurs de santé"
Dans un contexte de préoccupation grandissante à l’égard de la santé et de recherche pour en diminuer les coûts, l’éducation santé – ou comment apprendre aux patients à modifier leurs comportements pour améliorer leur santé – apparaît comme un enjeu d’avenir. A l’occasion du salon Pharmagora placé cette année sous le thème "Pharmacien Educateur de Santé", Ipsos a mené l'enquête auprès des pharmaciens et du grand public, afin de mesurer les réactions vis-à-vis de ce rôle. Cette étude montre que les pharmaciens sont largement disposés à accomplir cette mission d’éducation santé, qui leur est également conférée par le grand public.
L'éducation santé est considérée comme une des missions naturelles des pharmaciens …
L'éducation santé est une activité largement pratiquée qui devrait l'être encore davantage à l'avenir. Le constat des pharmaciens est en effet quasiment unanime : l'éducation santé fait d'ores et déjà partie de leur quotidien, et cela ne va que s'amplifier dans les années à venir. Ils ont le sentiment que depuis quelques années les patients les interrogent davantage sur les sujets de santé publique (88% dont 32% « beaucoup plus »), le bien-être et la santé (88% dont 31% « beaucoup plus ») et les pathologies lourdes et chroniques (84% dont 26% « beaucoup plus »).
Les rares sujets sur lesquels les pharmaciens n'observent pas de hausse de la demande concernent les nouveaux médicaments sortis de la réserve hospitalière : seuls 38% des patients les interrogent plus à ce sujet, dont 9% « beaucoup plus ». Cela s'explique sans doute par la plus grande technicité de ce sujet, qui concerne davantage les professionnels de la santé que les patients eux-mêmes.
Il semble par ailleurs que cette évolution soit appelée à s'amplifier dans les années à venir. De manière quasiment unanime (93%) les pharmaciens estiment que dans les prochaines années ils assureront davantage ce rôle d'éducateur santé auprès des personnes venant dans leur pharmacie, dont une très nette majorité (61%) indique même qu'ils y seront « beaucoup plus » amenés.
Ce sentiment est probablement d'autant plus fort que les personnes qui viennent dans leurs pharmacies leur semblent attentives (90% d'entre eux estiment que cet adjectif correspond plutôt bien) et en demande (90%). Ils ne sont qu'une minorité à estimer que les patients sont méfiants (29%), non intéressés (26%) ou sur info rmés (26%). Pour la majorité des pharmaciens, il semble que les patients disposent désormais d'une ouverture d'esprit suffisante pour recevoir une éducation santé de leur part.
En ce qui concerne la prévention et le dépistage, 16% des pharmaciens interrogés affirment en faire déjà, auprès de la plupart de leurs patients, et près des trois quarts (72%) le font mais seulement auprès de certains patients quand cela leur semble indispensable. Au total 88% qui font d'ores et déjà de la prévention et du dépistage auprès de leurs patients. Et parmi les 11% qui déclarent ne pas en faire, 8% aimeraient le faire, soit un potentiel de développement pour l'avenir.
… dont la légitimité va de soi, pour les pharmaciens
Une chose est de constater ou d'anticiper des évolutions, une autre est de les approuver sans réticence. Or c'est bien ce que l'on observe chez les pharmaciens. Alors que cette mission, qui suppose une plus grande implication auprès du patient, pouvait leur sembler contraignante ou hors de leur domaine de compétence, tous considèrent que cela fait partie de leur rôle. Cette mission leur est d'ailleurs reconnue par les Français dans leur ensemble puisque 79% d'entre eux estiment également que l'éducation santé est du ressort du pharmacien.
Interrogés sur les moyens dont disposent les pharmaciens pour mener à bien cette mission, pharmaciens et grand public s'accordent à penser que la confiance des patients est suffisante (92% des pharmaciens et 87% des Français), tout comme les compétences professionnelles des pharmaciens (92% et 85%) ou la confidentialité au sein de l'officine (81% et 74%). Les pharmaciens semblent bénéficient d'une bonne image et d'une confiance en leurs compétences pour prodiguer des conseils, même si certaines catégories de personnes – les moins de 35 ans - sont plus réservées, notamment sur la confidentialité.
Certains éléments suscitent toutefois une plus grande réserve du grand public, comme la connaissance du patient et de son historique, jugée suffisante par 87% des pharmaciens mais seulement par 56% des patients. Cette difficulté qui pourrait se réduire par l'intégration d'un Dossier Pharmaceutique dans le Dossier Médical Personnel dont la généralisation est prévue en 2007.
Par ailleurs, quand le pharmacien propose à un client de modifier son comportement pour améliorer sa santé, il est écouté dans 43% des cas, par des personnes qui ont suffisamment confiance en lui. Mais une proportion légèrement supérieure de Français (45%) en parlerait d'abord à son médecin, tandis que 11% ne l'écouteraient pas vraiment à moins qu'un médecin ne leur en reparle par la suite. Ainsi, les personnes qui pourtant considèrent que l'éducation santé est du ressort du pharmacien sont quasiment aussi nombreuses à en référer d'abord au médecin (44%) voire à ne pas vraiment les écouter (9%).
Du côté des pharmaciens, on relève surtout un soucis de disponibilité : si le grand public a le sentiment que les pharmaciens ont du temps pour faire de l'éducation santé (78% estiment que la disponibilité dont ils disposent est suffisante), les pharmaciens ne sont que 66% à partager ce point de vue. La disponibilité constitue le principal obstacle à la pratique de l'éducation santé pour les pharmaciens, ce qui explique probablement en partie que si 64% d'entre eux jugent qu'il est facile d'en faire, cette affirmation est très mesurée : 58% déclarent que c'est « plutôt facile » et seulement 6% que c'est « très facile ».
Des pharmaciens prescripteurs ?
Interrogés en dernier lieu sur l'élargissement de leurs responsabilités, les pharmaciens dans une très large majorité accepteraient de prescrire des médicaments pour des pathologies à petits risques (91%), un acte qui serait également accepté par 73% des Français. En revanche, les pharmaciens sont moins nombreux – mais néanmoins toujours majoritaires – à se déclarer prêt à rédiger une ordonnance après le diagnostic du médecin (68%) et modifier ou adapter le traitement en fonction de l'évolution de la maladie (55%), deux actes que les Français ne sont pourtant pas encore prêts à accepter : ils ne sont aujourd'hui que 39% et 37% favorable à cette évolution des prérogatives du pharmacien.