Les Verts : bilan contrasté après trois ans au pouvoir

A la veille de leur congrès, l'enquête d'Ipsos pour le Figaro permet de dresser le bilan de trois ans de participation des Verts au gouvernement. Si le bilan d'ensemble de Dominique Voynet suscite des jugements contrastés, l'image des Verts reste bonne dans l'opinion.

Auteur(s)
  • Jean-François Doridot Directeur Général Public Affairs
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Selon l'enquête, la participation gouvernementale semble globalement satisfaire l'électorat écologiste mais la Ministre de l'Environnement est pourtant loin de faire l'unanimité au sein de son camp comme possible candidate à la prochaine élection présidentielle.
Le bilan de Dominique Voynet suscite une appréciation d'ensemble partagée. 46% des personnes interrogées le jugent positif, 42% émettant un jugement inverse. Bien perçu au sein de son électorat (61% contre 22%) et des sympathisants du PS (63% contre 29%), ce bilan suscite un jugement plus contrasté au sein des sympathisants du PC (50% contre 38%)- effet du nombre de chasseurs au sein de l'électorat du PC ?- et une critique franche de la droite. Par domaine d'actions, le bilan de la Ministre de l'Environnement est tout aussi contrasté. Son action en matière de lutte contre la pollution de l'air (54% de jugements favorables) et, à un degré moindre, en matière de sécurité nucléaire (44% de jugements favorables contre 34%) sont mis à son crédit. En revanche, son action en matière de sécurité alimentaire (47% de jugements défavorables) et surtout de sécurité maritime (58% d'opinions négatives) est jugée avec plus de sévérité, même si, ces deux domaines ne relèvent pas directement de ses prérogatives ministérielles. S'il faut sur la question de la sécurité maritime probablement tenir compte de la conjoncture de ce sondage, réalisé pendant le naufrage du chimiquier italien au large des côtes normandes, il n'en demeure pas moins que la communication hésitante de Dominique Voynet lors du naufrage de l'Erika n'est pas encore oubliée, y compris au sein de son électorat. Une majorité relative des sympathisants Verts (47% contre 37%) jugent en effet de manière négative le bilan de Dominique Voynet dans ce domaine.

On peut trouver là une des raisons de la fragilité d'une éventuelle candidature de Dominique Voynet à l'élection présidentielle de 2002 à l'intérieur même de son camp. En effet, invités à choisir qui de Dominique Voynet ou de Noël Mamère ferait le meilleur candidat pour la prochaine élection présidentielle, 42% des Français et 47% des sympathisants Verts choisissent le député-maire de Bègles, respectivement 30% et 36% optant pour la Ministre de l'Environnement.

Dominique Voynet paie là probablement le prix de sa position institutionnelle. On voit bien en effet dans ce choix que les sympathisants écologistes -même s'ils se sentent tenus par solidarité militante d'approuver le bilan de celle qui les représente au gouvernement- lui préfèrent en fait une personnalité libérée des contraintes de la gestion gouvernementale quotidienne et pouvant ainsi plus facilement porter leurs attentes.

L'enquête sur les familles politiques, réalisée pour le Figaro Magazine en mai dernier, montre en effet clairement que les sympathisants Verts souhaitent aller beaucoup plus loin que ne l'a fait le gouvernement de Lionel Jospin sur des questions comme l'immigration, la chasse ou encore le nucléaire. Ils se montrent par exemple majoritairement favorables à l'abandon de l'énergie nucléaire, à l'application des directives européennes restreignant la chasse, à la régularisation de tous les sans papiers ou encore à l'interdiction des OGM, toutes questions dont aujourd'hui Noël Mamère peut beaucoup plus facilement que Dominique Voynet être le porte-parole.

Si l'exercice du pouvoir a ainsi pu fragiliser le positionnement de Dominique Voynet, particulièrement au sein de son propre camp, il n'a pas entamé la crédibilité des Verts. Les Verts disposent aujourd'hui sans conteste d'une bonne image. 54% des Français (contre 40%) considèrent ainsi qu'ils sont proches de leur préoccupation. On leur prête également au sein de la gauche plurielle une influence bien supérieure à celle du PC : 47% des Français, et 66% des sympathisants écologistes estiment que les Verts pèsent plus que le PC sur les décisions gouvernementales, respectivement 26% et 18% ayant une opinion opposée. Sur ce point, l'opinion ne paraît pas partager le sentiment des principaux dirigeants du parti écologiste !

Proches, influents, les Verts, ne sont pourtant toujours pas considérés comme un parti "généraliste". La nomination d'une seconde personnalité écologiste, Guy Hascoët, à un poste non lié à l'environnement, n'a pour l'instant pas modifié les représentations collectives. 56% des Français considèrent que "le rôle des Verts est d'abord et avant tout de se consacrer aux questions d'environnement", 37% estimant à l'inverse "qu'ils se doivent d'avoir un programme politique qui ne se limite pas à ces questions". Ce jugement est partagé, dans des proportions identiques, par les sympathisants des Verts, soit qu'ils considèrent que l'écologie est un projet politique en soi, soit qu'ils estiment qu'avant de porter d'autres aspirations, les Verts doivent déjà mettre en pratique leurs idées et leurs convictions en matière d'environnement. En tous cas, les trois ans d'exercice du pouvoir n'ont pas réussi, aux yeux des Français, à faire définitivement passer les Verts du rang de parti ad hoc, c'est-à-dire fondé sur une revendication spécifique, au rang de parti "omnibus", capable de porter un projet politique global.

Auteur(s)
  • Jean-François Doridot Directeur Général Public Affairs

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