L’hypovigilance, danger méconnu de la route

Au delà du point d’opinion sur les comportement des Français en matière de sécurité routière, l’observatoire de la conduite responsable réalisé par Ipsos pour la Fondation Vinci Autoroutes révèle à quel point l’hypovigilance est un facteur d’accident que les Français ont du mal à appréhender. Alors même qu’une grande majorité d’entre eux a déjà été confronté à une situation d’endormissement au volant, les risques sont clairement sous-estimés. Les raisons et les mécanismes de l’hypovigilance sont ainsi méconnus par une bonne part de nos concitoyens, qui estiment que résister au sommeil lorsque l’on conduit une voiture est plus aisé que lorsque l’on regarde la télévision. Pour un conducteur sur quatre, il est aussi parfaitement possible de lutter contre l’hypovigilance en utilisant certains « trucs » (fenêtre ouverte, volume de la radio...). A tort, la lutte contre l’endormissement est considérée comme une affaire de volonté.

Pour une majorité de Français, être passé en 2010 sous la barre symbolique de 4000 personnes tuées en une année est encore insuffisant : 55% considèrent que le nombre de tués peut encore baisser de façon très importante. Ils ne sont qu’une minorité à se montrer fatalistes, considérant qu’il sera difficile de faire baisser beaucoup plus le nombre de personnes tuées, la route étant nécessairement dangereuse. Cette opinion est néanmoins majoritaire chez les plus jeunes (54% des 18-24 ans), qui sont aussi ceux qui ont les comportements les plus dangereux.
Une réduction plus importante de la mortalité sur la route passe certainement par une meilleure connaissance des facteurs d’accident. Si la conduite sous l’emprise d’alcool ou de stupéfiants est bien identifiée comme une des principales causes d’accidents mortels sur la route en France (72%), avec la vitesse (44%), le rôle de l’inattention (27%) ou de la fatigue (18%) paraît sous-estimé. Selon l’association Prévention Routière, la fatigue causerait en effet jusqu’à 30% des accidents sur autoroute. Cette sous-estimation est particulièrement préoccupante, puisque 62% des conducteurs ont déjà eux-mêmes rencontré des problèmes d’hypovigilance.

Ils en méconnaissent toutefois les mécanismes. Si les trois quarts des sondés  considèrent qu’il ne faut jamais conduire en état de fatigue, ils sont trop souvent enclins à surestimer leur capacité à rester éveillés : 21% considèrent que c’est dangereux, mais qu’on peut le faire si on est extrêmement prudent (24% des moins de 35 ans) et 5% pensent que ce n’est pas vraiment dangereux car on peut utiliser des astuces pour ne pas s’endormir (boire du café, écouter la radio très fort). La majorité des personnes interrogées considère aussi qu’il est plus facile de lutter pour rester éveillé lorsqu’on commence à s’endormir en conduisant, que lorsque l’on commence à s’endormir devant la télévision (54%) alors que le phénomène d’endormissement est le même dans les deux cas.
En réalité, il est très difficile de lutter contre le sommeil en voiture. Le chiffre est là encore inquiétant : un conducteur sur trois a déjà eu l’impression de s’être assoupis durant quelques secondes au volant (dont 11% « plusieurs fois ») ou a eu le sentiment d’être sur le point de s’endormir. Enfin, 5% des conducteurs disent avoir déjà eu un accrochage ou un accident parce qu’eux-mêmes ou un autre conducteur était trop fatigué. La règle du repos toutes les deux heures est pourtant assez peu appliquée. La moyenne calculée par rapport aux déclarations des interviewés est un arrêt après 2 heures et 36 minutes de conduite ; seuls 57% de l’échantillon respectent les deux heures, quand 14% avouent dépasser les 3 heures de conduite avant de réaliser la première pause.

En marge de l’hypovigilance, d’autres types de comportements à risque persistent, bien qu’ils soient mieux connus pour leur dangerosité. Sur les longs trajets (au moins 3 heures), 86% des Français avouent dépasser de quelques kilomètres/heures la limitation de vitesse indiquée (dont 20% « fréquemment »), 64% reconnaissent qu’ils ne respectent pas les distances de sécurité et 50% qu’il leur arrive de doubler en oubliant de mettre leur clignotant. Moins souvent cités mais un peu inquiétant, 21% des interviewés paramètrent leur GPS en roulant, 12% envoient des mails ou des SMS en conduisant (27% des moins de 35 ans).

Plus généralement, les Français jugent assez négativement l’attitude des autres conducteurs : 44% les voient « stressés », 38% les considèrent « irresponsables », 29% « agressifs » et même 25% « dangereux ». Plus de 3 Français sur 4 auraient même déjà eu peur (fréquemment, parfois ou rarement) du comportement agressif d’un autre conducteur (78%, dont 19% « fréquemment »).
Ils ont en revanche plus de mal à faire leur autocritique : lorsqu’il s’agit de juger leur propre attitude au volant, seuls 12% citent un adjectif négatif (« stressé » le plus souvent). Au contraire, ils ont le sentiment d’être vigilants (80%), calmes (58%) et courtois (38%). En insistant, une personne sur deux Français reconnait toutefois qu’il lui arrive « d’injurier un autre conducteur » (53%, dont 10% « fréquemment »), 42% avouent « klaxonner de manière intempestive les conducteurs qui les énervent », 24% confessent « coller délibérément le véhicule d’un conducteur qui les énerve », 20% « doubler à droite sur l’autoroute » et 16% (une personne sur 6) expliquent qu’il leur est déjà arrivé de « descendre de leur véhicule pour s’expliquer avec un autre conducteur »...

Auteur(s)

  • Etienne Mercier
    Etienne Mercier
    Directeur Opinion et Santé - Public Affairs
  • Amandine Lama - Directrice de Clientèle, Département Politique et Opinion, Public Affairs
    Amandine Lama
    Directrice de Clientèle, Département Politique et Opinion, Public Affairs

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