Médecine : l’exigence de transparence

L'enquête réalisée par Ipsos pour le CISS montre que la nécessité d’une amélioration de l’information médicale fait consensus dans l’opinion. Près d’un Français sur deux déclare avoir souffert d’un manque d’information lors d’un traitement ou d’une maladie et un sur cinq s’est déjà vu refuser l’accès à son dossier médical. Dans ce contexte, l’opinion se prononce très largement en faveur d’une loi de modernisation du système de santé, à laquelle le gouvernement réfléchit depuis de longs mois, même si la création d’un fonds public d’indemnisation de l’aléa thérapeutique, financé par les citoyens, suscite des avis plus partagés, notamment au sein des catégories modestes.

Auteur(s)
  • Etienne Mercier Directeur Opinion et Santé - Public Affairs
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En matière de santé, l’exigence de transparence est forte. Elle concerne d’abord le dossier médical. Sept Français sur dix jugent ainsi primordial d’avoir un accès direct à l’ensemble des informations concernant leur santé, 27% estimant cela non primordial mais souhaitable; et seulement 3% considérant cela comme « secondaire ».

Elle concerne ensuite les relations avec l’ensemble des personnels de santé, et particulièrement le fait d’être associé aux décisions. 95% des personnes interrogées jugent important (dont 70% « primordial ») que leur médecin les informe des difficultés qu’ils peuvent rencontrer dans le diagnostic ou le choix de traitement de leur maladie. De même, la très grande majorité des Français (95%) estime important - et 68% même primordial- que leur médecin donne la totalité des informations dont il dispose au patient si celui-ci veut obtenir un deuxième avis médical ou encore, que leur médecin les informe préalablement s’il consulte un confrère (85% dont 51% l’estime primordial). Par ailleurs, les Français préfèrent presque à l’unanimité (93%) un médecin qui, s’ils le souhaitent, leur explique précisément la situation, leur présente les choix possibles et les associe à la décision plutôt qu’un médecin qui leur explique seulement l’essentiel sans les associer à la décision (5%) ou encore qui ne leur donne pas d’explication et qui prend seul les décisions (1%).

Dans ce contexte de forte demande sociale en faveur de plus de transparence, la très grande majorité de la population (83%) considère que le vote d’une loi de modernisation du système de santé concernant notamment l’information des patients, leur consentement et l’indemnisation des accidents médicaux est urgent, 32% estimant même qu’une telle réforme est très urgente. Cet avis est partagé par l’ensemble des Français quel que soit également l’intensité de leur contact avec le système de santé ou encore leur sympathie politique.

Cette exigence est d’autant plus forte qu’elle se fonde pour partie sur le constat de dysfonctionnements au sein du système de soins :

- 45% des personnes interrogées affirment avoir déjà constaté pour eux mêmes ou pour un de leurs proches une (25%), ou plusieurs fois (20%), une mauvaise organisation du service du médecin, de l’hôpital ou de la clinique. Ce taux, en lui même déjà très révélateur, s’élève à 53% quand il est question des personnes ayant eu un contact récent important avec le système médical (les personnes ayant suivi - elles-mêmes ou l’un de leurs proches- un traitement de longue durée ou subi une opération chirurgicale).

- 40% des Français estiment également avoir déjà souffert (eux-mêmes ou l’un de leurs proches) d’un manque important d’information sur leur maladie, le traitement associé ou ses conséquences. 49% font ce constat parmi les personnes ayant eu un « contact récent important » avec le monde médical.

- 24% des Français déclarent avoir déjà fait l’expérience (lui-même ou l’un de ses proches) d’un refus d’accès à son dossier médical. Là encore, ce pourcentage grimpe légèrement (28%) chez les personnes directement ou indirectement concernées par des opérations chirurgicales ou des traitements de longue durée.

- 23% de la population et 30% de ceux ayant eu un « contact récent important » avec le monde médical déclarent avoir souffert (eux-mêmes ou l’un de leur proches) d’un accident médical.

- 19% des interviewés vont jusqu’à dire qu’ils ont (eux-même ou l’un de leurs proches) été l’objet d’un non respect de leur volonté en tant que patients.

Au total, 69% des Français affirment avoir fait l’expérience d’au moins l’un des dysfonctionnements cités précédemment. Ce taux est légèrement supérieur chez  les hauts revenus (76%), les plus diplômés (74%) et notamment chez les personnes directement ou indirectement concernées par une opération chirurgicale ou un traitement de longue durée (78%).

La question de l’indemnisation de l’aléa thérapeutique par un fonds public financé par tous suscite des avis plus partagés. Une courte majorité des Français (54%) accepterait de verser annuellement une somme inférieure ou égale à 100 francs afin de financer un fonds public qui servirait à aider et à indemniser les personnes victimes d’accidents médicaux pour lesquels aucune faute d’un médecin, d’un établissement de soin ou du patient ne peut être retenue. Il reste que 40% de la population s’y déclare opposée, l’opposition étant logiquement la plus forte au sein des catégories à faible pouvoir d’achat : employés (50% contre 46% qui y sont favorables) ou revenus modestes (45% contre 48%) par exemple. En revanche, une telle initiative suscite une forte adhésion chez les cadres supérieurs (69%), les plus diplômés (63%) ou encore les hauts revenus (64%). En revanche la possibilité d’agir en justice pour les associations d’usagers fait très largement consensus : 81% des Français  sont favorables à ce que les associations de défense des usagers du système médical puissent agir en justice en leur nom propre pour défendre les personnes victimes d’actes médicaux. Cette prérogative est plébiscitée par l’ensemble des Français quelle que soit la catégorie socio-démographique considérée et elle atteint des scores d’adhésion spécialement élevés chez les moins de 35 ans (85%), les femmes (85%), les employés (87%), les ouvriers (85%), les inactifs (85%) ou encore les personnes pour qui la réforme du système médical est quelque chose d’urgent (86%).

Auteur(s)
  • Etienne Mercier Directeur Opinion et Santé - Public Affairs

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