Municipales 2001 : les maires sortants sont confiants

La troisième vague de l'étude Ipsos / Courrier des Maires réalisée parallèlement auprès des élus et de leurs administrés montre que les maires sont, à l'approche des municipales, de plus en plus nombreux à vouloir se représenter. Par ailleurs, l'instauration de la parité hommes / femmes dans les communes de plus de 3500 habitants ne semble pas poser de problèmes particuliers.

Des maires de petites communes plus enclins à se représenter à l'approche des élections municipales

L'enquête réalisée l'an passé auprès des maires français avait mis en lumière deux phénomènes marquants s'agissant de leur intention de solliciter un nouveau mandat.D'une part, les maires de communes de plus de 10 000 habitants étaient de plus en plus nombreux à compter se représenter (59 % étant même à l'époque certains de le faire). D'autre part, les maires des plus petites communes semblaient frappés d'une lassitude à l'égard de leur fonction, 11 % (contre 20 % en 1998) seulement étant certains de se représenter et 51 % ne pensant pas le faire (34 % étant même certains de ne pas se représenter).

L'enquête réalisée au mois d'octobre de cette année laisse apparaître une confirmation de l'intention des maires des communes de plus de 10 000 habitants de solliciter un nouveau mandat. En effet, aujourd'hui, 71 % de ces maires déclarent être certains de le faire. Par conséquent (indépendamment de la possibilité d'une alternance politique dans ces villes), le taux de renouvellement naturel des maires dans les grandes communes risque d'être limité, 12 % seulement d'entre eux étant certains de ne pas se représenter.Cependant, l'évolution la plus marquante concerne les communes de moins de 2 000 habitants. En effet, la lassitude et le souhait de ne pas se représenter, éléments très forts l'an passé, s'estompent. A six mois des élections municipales, 28 % d'entre eux sont certains de se représenter (contre 11 % l'année dernière). Au total, ils sont 43 % à penser le faire, "certainement ou probablement".

Mécaniquement, les maires ne comptant pas se représenter sont nettement moins nombreux : 33% (-18 %) n'envisagent pas de solliciter un nouveau mandat, 25 % (-9 %) étant certains de ne pas le faire.Outre cette évolution importante, il est à noter qu'un quart d'entre eux n'a pas encore pris de décision en ce qui concerne les prochaines échéances électorales, signe du trouble que provoque chez eux la perspective de se représenter.

Si la progression de la part des maires des grandes communes comptant se représenter s'explique aisément, en termes de pouvoir et d'enjeu politique, le fait que les maires des plus petites communes comptent également le faire de plus en plus traduit plusieurs phénomènes.

D'une part, ces maires, sans doute parfois lassés par leur travail, y trouvent néanmoins une certaine satisfaction et, à l'approche des élections, décident ainsi de "rempiler".

Mais cette évolution doit également s'expliquer par la difficulté que rencontrent ces maires à trouver des successeurs suffisamment compétents pour assurer la relève (cette difficulté étant soulignée plus loin dans cette enquête). Face à la difficulté voire l'impossibilité de trouver des personnes compétentes ou tout simplement des volontaires prêts à assurer la fonction de maire, nombre d'entre eux semblent se résigner à se représenter.

Des raisons de ne pas se représenter très dépendantes de l'âge des maires

Logiquement, les raisons de ne pas solliciter un nouveau mandat sont très étroitement liées à l'âge des maires sortants. Ainsi, pour les maires âgés de plus de 65 ans, c'est leur âge (73 %) qui constitue la principale, sinon l'unique, raison de ne pas se représenter, très loin devant les autres explications.En revanche, pour les maires les plus jeunes (âgés de moins de 55 ans et donc exerçant pour la plupart une activité professionnelle parallèlement à leurs fonctions de maire), les raisons invoquées en priorité sont étroitement liées aux difficultés qu'ils rencontrent pour concilier leur deux activités. En effet, ils citent comme principales raisons à la fois "la difficulté de concilier leur fonction de maire avec une activité professionnelle (42 %) et l'importance du temps consacré à cette fonction (37 %)".Les maires âgés de 55 à 65 ans, catégorie vieillissante, s'ils invoquent également leur âge (21 %), privilégient des considérations d'ordre technique telles que "la complexité croissante de la fonction mais aussi les risques croissants de responsabilité pénale" (39 % chacun) devant "l'importance du temps consacré à la fonction (26 %)".

Indépendamment de l'importance que revêt l'âge des maires interrogés dans leurs réponses, celles-ci divergent également selon la taille de la commune.Ainsi, les risques croissants de responsabilité pénale sont d'autant plus avancés que la taille de la commune est réduite. Invoquée par 31 % des maires des communes de moins de 2 000 habitants n'étant pas certains de se représenter, cette raison ne l'est plus que par 18 % des maires des communes de 2 000 à 10 000 habitants et par seulement 12 % des maires de celles de plus de 10 000 habitants.Au travers de cette réponse, il apparaît clairement que l'appréhension suscitée par la responsabilité pénale est d'autant plus forte que la commune est petite et que son premier magistrat se sent plus démunis face à ce type de risques. En revanche, dans les grandes communes, cette crainte, si elle reste présente, est néanmoins plus diffuse, sans doute du fait de services municipaux, notamment juridiques, plus étoffés.De la même manière, l'importance du temps consacré à la fonction de maire est une raison plus volontiers invoquée dans les communes de moins de 10 000 habitants que dans celles de plus de 10 000 habitants. Là encore, cette différence peut s'expliquer par des services municipaux plus importants qui permettent, dans les grandes communes, d'organiser de manière plus rationnelle, le travail du maire.

Une réélection qui ne suscite pas de crainte

Quasiment aucun maire comptant se représenter en mars prochain ne manifeste d'inquiétude en ce qui concerne sa réélection.Pourtant, au-delà des résultats d'ensemble, il est intéressant de constater que si la confiance est la norme, ces maires se déclarent "plutôt confiants" et non pas "très confiants", manifestant là une certaine retenue.Ainsi, 78 % des maires des communes de plus de 10 000 habitants comptant se représenter se déclarent "plutôt confiants". Cette modestie illustre une certaine prudence, compte tenu du fait que l'alternance politique, on peut raisonnablement le supposer, ne s'appliquera pas dans 78 % de ces villes.Même si l'inquiétude est partout très marginale (et parfois totalement absente), 13 % des maires franciliens comptant se représenter se déclarent néanmoins très inquiets. Ce sentiment s'explique certainement par le fait que l'alternance politique est traditionnellement plus importante dans les communes de l'agglomération parisienne (notamment dans l'ancienne "ceinture rouge") qu'ailleurs.

Une loi sur la définition des délits non-intentionnels connue, et d'autant mieux perçue que la commune est grande

La quasi-totalité des maires interrogés a entendu parler de la loi, adoptée au mois de juin dernier, sur la redéfinition des délits non-intentionnels qui concerne, notamment, leur responsabilité pénale.Cette très forte notoriété de la loi, quelle que soit la taille de la commune, s'explique certainement par les efforts de communication des sénateurs sur le terrain, cette loi ayant été l'un des chevaux de bataille de la haute assemblée.Pourtant, si cette loi est connue, l'opinion des maires sur son efficacité diverge profondément selon la taille de leur commune. Ainsi, "cette loi permettra de limiter suffisamment les risques qu'ils courent dans l'exercice de leur fonction" pour 46 % des maires des plus petites communes, pour 56 % de ceux des communes de 2 000 à 10 000 habitants et pour 66 % de ceux des communes de plus de 10 000 habitants.Cette différence de perception sur l'efficacité et le caractère rassurant de cette loi peut, là encore, s'expliquer par le fait que les maires des grandes communes disposent de services juridiques plus importants qu'ailleurs.

Une loi suffisamment efficace qui rend moins urgente une diminution supplémentaire de la responsabilité pénale des élus pour des fautes non intentionnelles

L'an passé, les maires considéraient que la principale priorité en matière d'évolution du statut des élus locaux devait concerner prioritairement la diminution de la responsabilité pénale des élus pour des fautes non-intentionnelles (cette priorité était avancée par 80 % d'entre eux, très loin devant les autres réformes proposées).Les résultats de cette question, cette année, soulignent à quel point cette loi a marqué les esprits. En effet, si la diminution de la responsabilité pénale des maires pour ce type de fautes reste la priorité, elle n'est plus citée que par 48 % d'entre eux.Les résultats corroborent ceux de la question précédente et les divergences selon la taille de la commune. Cette réforme reste la plus citée par les maires des petites communes (49 % contre 81% l'an dernier) et par ceux des communes de 2 000 à 10 000 habitants (43 % contre 71 % en 1999).Mais c'est dans les communes plus importantes que l'évolution est la plus spectaculaire : citée l'an dernier par 77 % de ces maires, elle ne l'est plus que par 16 % d'entre eux et devient, de ce fait, la réforme la moins citée de toute la batterie proposée.

Outre cette évolution notoire, les maires des communes de plus de 10 000 habitants privilégient cette année davantage le fait de "faciliter l'accès des salariés du privé aux mandats électifs" (51 % contre 40 %) et "la réforme du système de retraite" (23 % contre 11 %). Plus surprenant, "la réévaluation du montant des indemnités", citée par 41 % d'entre eux l'an dernier, ne l'est plus que par 26 %, sans doute en grande partie du fait de la récente réévaluation de leurs indemnités.De manière plus générale, en ce qui concerne les maires des communes de moins de 10 000 habitants, les principales priorités restent liées, outre la diminution de la responsabilité pénale, à l'accès des salariés du privé aux mandats électifs et à la formation des élus.

L'instauration de la parité hommes / femmes ne semble pas poser de problèmes particuliers

Les maires des communes concernées par la loi et comptant se représenter ne semblent pas rencontrer de difficultés majeures pour appliquer la loi sur la parité hommes / femmes.En effet, dans les communes de 3 500 à 10 000 habitants, l'instauration de la loi est jugée facile par 63 % des maires comptant se représenter.Dans les grandes villes, son instauration est jugée encore plus facile, 23 % des maires la considérant "très facile" et 56 % "plutôt facile". Le fait que l'instauration de la parité rencontre moins d'obstacles dans les grandes villes trouve une explication logique dans le fait que la population est plus importante et que, compte tenu de la politisation plus forte du scrutin dans ces communes, les structures partisanes disposent d'un réservoir suffisant de femmes pour figurer sur les listes en mars prochain.

Un bouclage de liste qui rencontre des difficultés différentes selon la taille de la commune

Les difficultés rencontrées par les maires souhaitant se représenter et se penchant sur le problème de la composition de leur liste varient sensiblement selon l'importance de la commune.Les maires des plus petites communes rencontrent principalement des difficultés pour "trouver suffisamment de candidats compétents" (43 %) et de "femmes susceptibles de figurer sur leur liste" (30 %).Cette difficulté à trouver suffisamment de femmes pour figurer sur leur liste, dans des communes où la loi sur la parité ne s'applique pas, illustre la volonté qu'a une partie de ces maires de féminiser leur liste.

Dans les communes de plus de 10 000 habitants, la principale difficulté, soulevée par plus de la moitié des maires (58 %), consiste à "expliquer à certains sortants qu'ils ne peuvent plus être repris". L'ampleur de cette difficulté dans les grandes communes tient essentiellement au fait qu'en mars 2001, dans bon nombre de communes importantes, à gauche comme à droite, les partis risquent de se présenter unis dès le premier tour. En effet, afin d'éviter des primaires sauvages et dangereuses dans l'optique du second tour, l'UDF, Démocratie Libérale, le RPR et même le RPF s'allieront le plus souvent possible. De la même façon, afin de capitaliser dès le premier tour l'ensemble des voix de la gauche plurielle, le PC, le PS et, quand ce sera possible, les Verts s'efforceront de présenter une liste unique.Par conséquent, il n'est pas étonnant que la constitution des listes relève souvent, dans ces villes, d'un subtil dosage entre partis politiques et contraigne les maires à procéder à une alchimie électorale de plus en plus délicate afin de tenir compte de la représentativité nouvelle de partis émergeants ou en progression depuis 1995 (DL, le RPF et surtout les Verts).

Un jugement sévère à l'égard du gouvernement dans les domaines de la fiscalité locale et de l'aménagement du territoire

Une forte majorité des maires interrogés manifeste son mécontentement à l'égard de la politique du gouvernement dans les domaines de l'aménagement du territoire (62 % sont insatisfaits contre seulement 32% satisfaits) et surtout dans celui de la fiscalité locale (70 % contre 25 %).Dans le domaine de l'aménagement du territoire, ce sont les plus petites communes qui manifestent le plus leur insatisfaction, sans doute du fait qu'elles se trouvent le plus souvent en zone rurale enclavée.La politique du gouvernement perçue comme consistant à limiter l'autonomie financière des communes, trouve également une traduction concrète dans la forte insatisfaction qu'elle suscite en matière de politique fiscale (y compris auprès des maires de gauche), une grande majorité de maires s'en déclarant "plutôt pas satisfaits" voire "pas du tout satisfaits".

En revanche, la politique du gouvernement en matière de développement de l'intercommunalité trouve plus de grâce aux yeux des maires. Ceux-ci s'en déclarent en effet majoritairement satisfaits, les opinions positives étant d'autant plus fortes que la taille de la commune est importante (52 % de satisfaction dans les communes de moins de 2 000 habitants, 59 % dans celles de 2 000 à 10 000 habitants et 67 % dans les plus grandes). Si la politique de développement de l'intercommunalité est mieux perçue par les maires des villes de plus de 10 000 habitants, c'est sans doute parce que grâce à leur poids dominant dans les structures intercommunales, ils ont toutes les chances de les présider et donc de ne pas avoir le sentiment de perdre une partie de leurs compétences et de leurs pouvoirs.Logiquement, sur ces questions impliquant la politique du gouvernement, les réponses sont très clivées et dépendent étroitement de l'étiquette politique des maires interrogés. Les maires de gauche se déclarent toujours beaucoup plus satisfaits que ceux de droite (62 % contre 46 % pour le développement de l'intercommunalité, 56 % contre 22 % pour l'aménagement du territoire et 43 % contre 15 % pour la fiscalité locale).

Des maires de communes de moins de 10 000 habitants inquiets de l'élection des délégués intercommunaux au suffrage universel direct

Dès l'an passé, une majorité d'élus était hostile à l'élection des délégués intercommunaux au suffrage universel direct. Cette tendance est aujourd'hui confirmée et amplifiée, en tout cas dans les communes de moins de 10 000 habitants. Aujourd'hui, 59 % (+ 9) des maires des plus petites communes y sont opposés mais les plus hostiles se recrutent dans les communes de 2 000 à 10 000 habitants (65 %, +4).

Au travers de cette question, on perçoit clairement les réticences de ces maires qui craignent que l'instauration du suffrage universel direct ne privilégie les communes principales, compte tenu de leur poids démographique et signifie, le plus souvent, l'élection aux postes les plus importants de ces structures d'élus issus de la commune la plus peuplée.De façon symétrique, les maires des villes de plus de 10 000 habitants sont aujourd'hui plus favorables à un tel scrutin (51 %, +5).

Une poursuite du développement de l'intercommunalité qui suscite des craintes

Parallèlement, une large majorité de maires (72 %), et ce quelle que soit la taille de leur commune, considère que "le développement de l'intercommunalité va entraîner une trop grande diminution des pouvoirs des maires au profit des structures intercommunales."

On se trouve ici confronté à des sentiments contradictoires au sujet de l'intercommunalité. D'un côté, les maires y sont favorables (lors de l'enquête réalisée pour Le Courrier des Maires en 1998, 70% d'entre eux considéraient que "l'intercommunalité représentait avant tout une chance pour les communes en leur permettant de regrouper leurs moyens") et se déclarent majoritairement satisfaits de la politique du gouvernement en la matière.

D'un autre côté, l'intercommunalité ou du moins la poursuite de son développement leur fait craindre une remise en cause d'une partie de leurs pouvoirs. Là encore, même si la crainte est partout majoritaire, ce sentiment s'exprime avec d'autant plus de force que la taille de la commune est réduite.
Par ailleurs, signe de l'appréhension que peut revêtir l'intercommunalité, cette crainte est plus forte auprès des maires dont les communes n'appartiennent pas à une structure intercommunale à fiscalité propre (souvent de petites communes, qui risqueraient de perdre de leurs pouvoirs au profit de la commune majeure).

Ainsi, dans un domaine a priori consensuel tel que l'intercommunalité, une forte réticence mêlée de crainte se fait jour dès que les maires y voient la possibilité de perdre certaines de leurs prérogatives et de voir l'échelon municipal privé d'une partie de sa substance.

Auteur(s)

  • Stéphane Zumsteeg - Directeur Opinion et Recherche Sociale, Public Affairs
    Stéphane Zumsteeg
    Directeur du Département Opinion et Recherche Sociale, Public Affairs

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