Observatoire des besoins et des attentes des jeunes actifs dans sept pays européens Ipsos / Mondial Assistance – Synthèse des résultats
Entre l’âge de 25 et de 39 ans, les jeunes actifs traversent une période charnière de leur existence. Ces années sont en effet marquées par une succession d’événements de premier ordre : ils débutent leur carrière professionnelle et deviennent indépendants financièrement, acquièrent parfois leur premier bien immobilier et fondent souvent une famille. Parfois même se pose la question de la prise en charge de leurs parents. Autant de situations nouvelles auxquelles ils doivent parfois simultanément faire face, et qui peuvent être source de tracas, voire de réelles difficultés. C’est pour mieux comprendre la manière dont les jeunes actifs appréhendent cette étape de leur vie que Mondial Assistance a souhaité leur donner la parole. Ipsos a ainsi réalisé une enquête du 30 janvier au 14 février 2008 auprès de 3508 jeunes actifs âgés de 25 à 39 ans issus de sept pays européens (France, Grande-Bretagne, Allemagne, Italie, Espagne, Pays-Bas, Portugal).
Les jeunes actifs européens ont plutôt le moral mais ils considèrent que leur situation est aujourd'hui plus difficile à vivre que celle de leurs parents au même âge
A priori, les jeunes actifs des sept pays investigués affichent un assez bon moral : 79% le déclarent. Cet état d’esprit est toutefois assez modéré, puisque les jeunes actifs ayant un « assez bon moral » sont beaucoup plus nombreux (64%) que ceux qui affichent un « très bon moral » (15%).
On décèle pourtant derrière cet apparent bon moral un fatalisme latent : 61% des jeunes actifs interrogés estiment en effet que par rapport à la génération de leurs parents, leur vie quotidienne est devenue plus difficile, et même « beaucoup plus difficile » pour un tiers d’entre eux (32%). Le constat dressé par les jeunes de cette enquête va donc à l'encontre du schéma traditionnel, qui veut que chaque nouvelle génération soit normalement appelée à avoir une vie meilleure que celle de ses parents.
Ce qui manque le plus aux jeunes actifs : le temps devant les opportunités et l’énergie
Quand on leur demande ce qui leur manque le plus aujourd’hui, la réponse des jeunes actifs est sans appel : 60% d’entre eux affirment manquer de temps, une réponse qui arrive loin devant toutes les autres. Ainsi, 38% déplorent un manque d’opportunités et 30% un manque d’énergie. Dans des proportions moindres, ils estiment également manquer d’aide (14%), d’idées (10%) et de conseils (8%).
Ce manque de temps, d’opportunités et d'énergie a des répercussions sur l’ensemble des domaines de leur vie. L'observatoire Ipsos/Mondial Assistance a ainsi demandé aux jeunes actifs de se mettre en situation sur un certain nombre de sujets touchant leur vie professionnelle, le droit et les finances, la santé, le temps libre et la vie quotidienne, et force est de constater qu'un grand nombre de situations testées posent aujourd'hui problème aux jeunes actifs.
Des manques qui génèrent de nombreuses difficultés dans la vie des jeunes actifs
En ce qui concerne leur vie professionnelle, de nombreux jeunes actifs estiment qu’il leur serait particulièrement difficile de négocier au mieux leurs augmentations de salaire (64%), de prendre un congé sabbatique (60%), mais aussi de gérer leur stress (45%). Ces situations qui relèvent du quotidien de la vie professionnelle leur semblent ainsi plus difficiles à gérer que des situations plus extrêmes comme faire face à une situation de harcèlement au travail (43%) ou agir au mieux de leurs intérêts en cas de conflit avec leur employeur (42%).
Pour ce qui est du droit et des finances, la situation jugée la plus difficile concerne le choix d'un emprunt aux meilleures conditions (41% disent que c’est difficile): une situation emblématique pour cette génération qui s'installe et aspire probablement à acquérir un bien immobilier, une voiture ou tout autre achat conséquent, et se trouve démunie face à l'emprunt. La recherche d'un logement à louer ou à vendre est également la situation qui leur apparaît la plus compliquée à gérer (50%) dans le domaine de la vie quotidienne.
Dans le domaine de la santé, s’il est assez logique de constater que 53% des jeunes actifs trouveraient difficile de venir en aide à un proche devenu dépendant ou atteint d’une maladie fortement invalidante, il est en revanche préoccupant de noter qu’il serait difficile pour près de la moitié d’entre eux (43%) de se faire soigner efficacement à moindre coût ou de savoir comment réagir face à une situation d’urgence médicale.
Plus grave, on note l’émergence de réels problèmes dans la gestion du temps libre. Respectivement 62% et 42% des jeunes actifs déclarent qu’il leur est difficile de prendre le temps d’avoir une activité sportive régulière et de manger de façon équilibrée, à l’heure où les pouvoirs publics soulignent qu’avoir une alimentation équilibrée et pratiquer une activité sportive régulière sont des impératifs de santé publique. La moitié des jeunes actifs (49%) considèrent également qu'il leur est difficile de prendre le temps de faire ce qu'ils aiment, signe s'il en est du malaise des jeunes actifs qui n'ont même plus le temps de s'accorder des moments de plaisir. Lorsqu’il devient difficile de faire ce que l’on aime, on peut en effet dire que la vie devient vraiment désagréable.
Notons que la présence d’enfants au foyer accroît le sentiment de manquer de temps, notamment pour faire ce qu’on aime ou pratiquer une activité sportive. L’arrivée d’un enfant constitue donc un événement capital, générateur de changements profonds et de tracas supplémentaires dans la vie quotidienne.
Au final, les deux domaines qui suscitent le plus de problèmes aux jeunes actifs sont la vie professionnelle et le bien-être : 50% ont répondu qu'ils auraient du mal à faire face à plus de la moitié des situations testées dans le domaine de la santé, et 48% ont répondu de même dans le domaine de la vie professionnelle. Ces deux secteurs sont également ceux qui arrivent en tête de la hiérarchie des tracas éprouvés actuellement par les jeunes actifs. Ainsi, et même si pour certains, cela paraîtra paradoxal au vu du jeune âge des personnes interrogées, le bien-être et la santé est le domaine qui cause le plus de tracas aux actifs européens interrogés (41%). Il arrive juste devant la vie professionnelle (38%), la vie quotidienne et ses imprévus (26%), la vie domestique (25%) ou encore les démarches administratives (18%) et le cadre de vie (18%). Ces résultats illustrent par ailleurs à quel point aujourd’hui la plupart des secteurs de la vie quotidienne sont une source de tracas pour les jeunes actifs.
Pour faire face à ces problèmes, la majorité des jeunes actifs européens s’estiment dépourvue d’aide réelle et efficace de la part de leurs proches.
Si un peu plus d’un jeune actif sur deux (54%) pense pouvoir trouver une aide réelle et efficace auprès de ses proches en cas de problème de santé, il n’en reste pas moins vrai que l’autre moitié avoue se trouver dans une situation plus précaire. Dans le domaine de la vie professionnelle, la situation semble encore plus fragile. Plus des deux tiers (68%) déclarent que leurs proches ne leur apporteraient qu’une aide limitée (48%), voire aucune aide (20%), pour gérer au mieux les difficultés qu’ils pourraient rencontrer (gestion du stress, d’un conflit, de leur évolution de carrière par exemple). De même, 58% d’entre eux estiment que leurs proches ne leur apporteraient qu’une aide limitée (44%) voire aucune aide (14%) pour les aider à régler des formalités administratives, tandis que pour 53% des jeunes actifs interrogés, leurs proches ne seraient d’aucune aide (11%) ou d’une aide limitée (42%) s’ils devaient être amenés à faire face à des imprévus de dernière minute.
Au final, près d'un jeune actif sur trois (31%) affirme ne pouvoir disposer d’aucune ou de peu d’aide dans l'ensemble des domaines de sa vie.
Les solidarités intergénérationnelles fonctionnent mal mais elles ne sont pas les seules en cause. Bon nombre de jeunes actifs européens ne semblent pouvoir compter que sur eux-mêmes face à ces problèmes de la vie quotidienne, ce qui est très probablement une circonstance aggravante décuplant le potentiel de nuisance des difficultés qu'ils rencontrent. Or ce manque d’aide s’inscrit dans le contexte d’un manque cruel de temps : ce qui leur pose problème aujourd’hui, c’est certainement de ne pouvoir disposer des soutiens et des appuis nécessaires pour leur permettre de dégager du temps.
Les jeunes actifs n’éprouvent pas la même difficulté à faire face à leurs tracas en fonction de leur pays d’origine...
L’Observatoire Ipsos / Mondial Assistance montre que ces derniers ne rencontrent pas le même niveau de difficulté face à leurs tracas dans chacun des sept pays européens étudiés.
Les Pays Bas sont incontestablement le pays où les jeunes actifs semblent faire face à leurs difficultés avec le plus de facilité. En effet, ils sont quasi-systématiquement les moins nombreux à déclarer éprouver des difficultés face aux différentes situations auxquelles ils peuvent être confrontés.
Ils sont également les moins nombreux (48% contre 61% en moyenne) à estimer que par rapport à la génération de leurs parents, leur vie quotidienne est devenue plus difficile. Mieux, leur moral est au beau fixe, puisque 96% d’entre eux déclarent avoir bon moral, dont 25% « très bon moral », un niveau qui n’est approché que par les jeunes actifs espagnols (90% ont bon moral, dont 23% « très bon moral ») et qui est largement supérieur à celui des autres pays.
...et les Français se retrouvent dans le bas du classement>
Si le niveau de difficulté rencontrés par les jeunes actifs espagnols, portugais, allemands et britanniques dans les différents domaines de leur existence les place dans une position intermédiaire qui peut varier d’une situation à l’autre, ce sont quasiment systématiquement les jeunes actifs français et italiens qui se montrent les plus fatalistes.
Ainsi, dans ces deux pays, près d’un jeune actif sur deux (47% en Italie, 43% en France, contre 29% en moyenne dans l’ensemble de sept pays étudiés) affirme qu’il lui est ou serait difficile de faire face à plus de la moitié des situations testées, tous domaines confondus (vie professionnelle, santé, temps libre, droit et finances, vie de tous les jours).
Une lecture plus détaillée des résultats souligne notamment la grande difficulté qu’éprouvent les jeunes actifs français au sein de la sphère professionnelle et notamment pour négocier au mieux leurs augmentations de salaire (cela est difficile pour 72% d’entre eux contre 64% en moyenne dans les sept pays étudiés). Cela découle pour une part de la très forte préoccupation actuelle de l’ensemble des Français au sujet de leur pouvoir d’achat mais pas seulement. Les schémas de négociation sont probablement aussi différents, peut-être plus figés qu’ailleurs.
La vie professionnelle constitue d'ailleurs la plus forte source de tracas des jeunes actifs français et italiens, suivie à un niveau similaire par la vie quotidienne et ses imprévus, spécificité de ces deux pays puisqu'ailleurs ce domaine est devancé par le bien-être et la santé. C'est dire à quel point la vie de tous les jours des jeunes actifs italiens et français est source de difficultés, de tension, et probablement de temps perdu... au point sans doute de les empêcher de prendre le temps de faire ce qu'ils aiment puisque sur ce sujet aussi les jeunes Italiens et les jeunes Français s'illustrent par une plus forte propension que leurs voisins européens à éprouver des difficultés.
Ainsi, malgré les 35 heures conventionnelles de travail hebdomadaires, les Français sont ceux qui déclarent le plus manquer de temps (64%) et qui éprouvent, avec les Italiens, le plus de mal à faire face sereinement aux difficultés de leur vie. Par ailleurs, on ne peut qu’être saisi par le désarroi des jeunes actifs français : ils se montrent en effet extrêmement désabusés, 78% d’entre eux estimant que par rapport à la génération de leurs parents, leur vie quotidienne est devenue plus difficile (contre 61% en moyenne). Ce sont les seuls à déclarer majoritairement (51%) que leur vie quotidienne est même « beaucoup plus difficile » que celle de leurs parents, signe d'un fatalisme très prononcé et inédit dans les six autres pays.