Paris : Tibéri pourrait arbitrer le duel Séguin / Delanoé

L'imbroglio autour de l'investiture RPR pour la mairie de Paris est aujourd'hui bien loin dans l'esprit des électeurs parisiens. La forte majorité des électeurs de droite se sont rangés derrière la candidature du député des Vosges. Près de sept Parisiens "proches de la Droite parlementaire" sur dix estiment en effet aujourd'hui que "Philippe Séguin fait un bon candidat pour la droite pour les élections municipales qui auront lieu à Paris en mars 2001". Même si on est loin du plébiscite (les électeurs de droite sont deux fois plus nombreux à préférer le "oui, plutôt" (48%) au "oui, tout à fait (21%)), la candidature est bien accueillie. Elle fait même presque l'unanimité chez les sympathisants RPR (80% jugent que Séguin "fait un bon candidat pour la Droite", contre 13% d'avis contraire). Le soutien est en revanche nettement plus nuancé chez les proches de l'UDF.Selon le tiers des électeurs parisiens, Philippe Séguin est le candidat qui correspond le mieux à "l'image de Paris, en tant que capitale culturelle et européenne". Il devance Bertrand Delanoé, cité par 24% des électeurs, et Jean Tibéri (17% de citations). Mais 16% des personnes interrogés sont d'avis qu'aucun des candidats proposés ne correspond à l'image de Paris ainsi décrite, et 10% ne se sont pas prononcés. On constate là encore qu'aucun des candidats en lice ne suscite véritablement l'enthousiasme.

Aujourd'hui en termes de souhaits de victoire, et en cumulant les scores de Séguin et Tibéri, la droite semble avoir l'avantage. Un tiers des électeurs souhaitent la victoire de Séguin en 2001, soit exactement la même proportion que ceux qui préféreraient Bertrand Delanoé. Tibéri bénéficie quant à lui du soutien de 14% des personnes interrogées.Les deux principaux candidats peuvent s'appuyer sur un soutien fort dans leur propre camp (60% des sympathisants de droite souhaitent la victoire de Séguin, 61% des proches de la gauche plurielle celle de Delanoé). Pour l'heure, Philippe Séguin mord davantage sur l'électorat de gauche (14% des proches de la gauche plurielle souhaitent sa victoire) que son rival socialiste (4% des sympathisants de droite préféreraient Bertrand Delanoé). Ce avantage est cependant susceptible de s'atténuer si les cinq mois de campagne à venir entraîne une politisation gauche/droite des débats.

Le résultat final dépendra en premier lieu du score de la gauche dans les arrondissements aujourd'hui tenus par la droite, mais susceptibles de basculer. Dans ces arrondissements "sensibles", 4ième, 12ième, 13ième et 14ième, c'est pour l'instant Bertrand Delanoé qui devance très légèrement Philippe Séguin (30% contre 27%).

Les souhaits de victoire montrent par ailleurs que la candidature de Jean Tibéri n'est pas totalement marginalisée : 14% des Parisiens dans leur ensemble, et 18% des électeurs de droite souhaiteraient voir réélu le maire sortant. Tibéri est particulièrement apprécié des retraités, des ouvriers, ou des proches du Front National. Il doit ce score honorable à un bilan plutôt bien perçu de ses concitoyens. Pour mémoire, en avril dernier, 60% des électeurs parisiens de droite interrogés par Ipsos pour l'hebdomadaire Le Point déclaraient avoir "une opinion favorable de l'action municipale de Jean Tibéri en tant que maire de Paris." Pour autant, le maire sortant est aujourd'hui accumulé trop de retard sur Philippe Séguin pour espérer renverser la tendance et être réélu. Notablement, la majorité des électeurs de droite (57%) souhaitent même "vraiment qu'il soit battu".

En l'état actuel des choses, il serait aujourd'hui particulièrement hasardeux de se risquer à un pronostic sur la victoire finale. L'état d'esprit des parisiens à l'égard des candidats montre qu'aucun des prétendants ne s'impose véritablement dans l'esprit des électeurs. A gauche, les supporters de Bertrand Delanoé sont aussi nombreux à souhaiter "réellement sa victoire" (39%) qu'à estimer "qu'il vaut mieux que ce soit lui plutôt qu'un autre" (39%). A droite, la candidature Séguin s'impose encore plus difficilement (34% "souhaitent réellement sa victoire", 48% (et 55% des proches de l'UDF) se disent "qu'il vaut mieux que ce soit lui plutôt qu'un autre").Cette question met en revanche en évidence le pouvoir de nuisance que peut avoir Jean Tibéri sur la candidature Séguin. En effet, la moitié des 14% souhaitant la victoire du maire sortant, souhaitent aussi "vraiment que Séguin soit battu". La "haine" des pro-Tibéri peut jouer un vilain tour à Philippe Séguin dans la perspective, plus que probable, d'un deuxième tour particulièrement serré. La stratégie de rupture du député des Vosges avec l'équipe Tibéri peut donc paraître relativement risquée, Séguin ne disposant pas forcément d'une marge suffisante pour se passer du soutien des fidèles du maire sortant au second tour. L'affaire Méry en revanche ne devrait pas lui faire trop d'ombre. Même si aujourd'hui 42% des parisiens, et 30% des proches de la droite parlementaire estiment que cette affaire constitue "un handicap important" pour sa candidature, a contrario 48% des électeurs, 62% des électeurs de droite, sont d'avis contraire, et ceux alors même que les confessions posthumes de Jean-Claude Méry sont encore au cœur de l'actualité.