Perceptions et attentes des dirigeants de PME vis-à-vis de l’Union Européenne

Ipsos et l’Ordre des Experts Comptables ont interrogé plus de 1400 dirigeants de PME dans 7 pays emblématiques de l’Union Européenne (la France, la Grande-Bretagne, l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne, la Suède et la Pologne), pour évaluer les perceptions et les attentes sur l’UE. Même si des disparités subsistent d’un pays à l’autre, les avis sont loin d’être négatifs ; au contraire, l’UE suscite beaucoup d’espoir, en tant qu’espace qui pourrait leur permettre de développer l’activité.

Auteur(s)
  • Etienne Mercier Directeur Opinion et Santé - Public Affairs
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I- L’Europe est une source d’espoir et même de confiance pour les dirigeants de PME européens…

Lorsqu’on leur demande aux dirigeants de PME les mots qui résumeraient le mieux leur état d’esprit vis-à-vis de l’Union Européenne, c’est « l’espoir » qui est le plus souvent cité, par près de 6 personnes sur 10 (58%). Ce sentiment arrive en première position partout, avec toutefois une intensité différente d’un pays à l’autre : 78% de citations en Italie, 71% en Allemagne, 63% en Espagne, 58% en Pologne et 55% en France. Les réponses des Britanniques sont plus dispersées, mais l’espoir est tout de même en tête (36%).
Sur l’ensemble de l’échantillon, « la confiance » arrive en seconde position (37%), devant l’indifférence (18%), l’enthousiasme (17%) et la méfiance (16%). La crainte (11%) et l’hostilité (3%) sont citées loin derrière.
Ainsi, la grande majorité des chefs d’entreprise européens affichent aujourd’hui des perceptions globalement positives vis-à-vis de l’Union Européenne (79% ont cité des sentiments positifs contre seulement 26% de sentiments négatifs). Si les chefs d’entreprise britanniques sont les moins enthousiastes (52% de sentiments positifs), ce sont les Français qui expriment le plus de craintes (49% de sentiments négatifs contre 44% pour les Britanniques). Les chefs d’entreprise de l’hexagone ressentent beaucoup plus que les autres de la méfiance (32%) et de la crainte (27%).

II – …alors même que la majorité des dirigeants de PME européens considèrent que les choses vont le plus souvent mal dans leurs pays respectifs

L’espoir et la confiance que les chefs d’entreprise placent dans l’Union Européenne est-elle la conséquence directe de l’opinion très négative qu’ils ont de la situation dans leur pays ? 
Pour de nombreux domaines, la majorité des chefs d’entreprises n’ont pas le sentiment que les choses vont bien dans leur pays. Nous avons ainsi testé « la création d’entreprises » (seulement 49% des entrepreneurs considèrent que les choses vont bien), « l’encouragement à l’innovation » (41%), « la transmission et la reprise d’entreprise » (35%), « les aides au financement » (34%) ou encore « l’accès aux marchés publics » (32%). Ils se montrent encore plus critiques en ce qui concerne le manque de flexibilité et notamment les règles d’embauche et de licenciement (seulement 31% pensent que les choses vont bien dans leur pays), l’adéquation du système éducatif avec le monde du travail (25%) et tout à fait logiquement le niveau des charges sociales et des impositions (14%).
Là encore, les disparités sont fortes d’un pays à l’autre. La Suède, la Grande-Bretagne et l’Allemagne affichent ainsi des niveaux de satisfaction beaucoup plus élevés que les autres. On note aussi que plus la taille des entreprises est importante, plus le niveau de satisfaction exprimé par les dirigeants interrogés est important.

III- Pour une majorité de chefs d’entreprise, l’herbe est plus verte dans les autres pays de l’Union Européenne

La plupart des chefs d’entreprises interrogés ont le sentiment que les choses vont mieux dans les autres pays, et ce pour la totalité des domaines testés. Et plus ils sont mécontents de la situation nationale dans un domaine particulier, plus ils ont l’impression que les choses vont mieux ailleurs en Europe.
Ces résultats traduisent tant un mécontentement par rapport à la situation dans leur propre pays qu’un manque d’information. Dans tous les pays par exemple, on estime que les choses vont moins bien qu’ailleurs en matière de charges sociales et d’impositions. 

IV- Des attentes très fortes vis-à-vis de l’Union Européenne et extrêmement différenciées selon les pays : d’abord et avant tout l’harmonisation fiscale

Citée par la moitié des interviewés (51%), l’harmonisation fiscale est de loin la mesure la plus attendue, particulièrement dans les pays où la pression fiscale est traditionnellement plus forte : Allemagne, 67% de citations, devant l’Italie (65%), la France (62%) et la Suède (60%).  A l’opposé, rares sont les Britanniques qui souhaitent une harmonisation fiscale (17%).

La facilitation de l’accès au financement est la seconde attente la plus citée (32%), surtout en Pologne (46%) et en Espagne (40%). Vient ensuite le soutien à l’innovation (25%) et presque au même niveau l’harmonisation sociale (24%). En ce qui concerne cette dernière, on note que les entrepreneurs allemands et français sont ceux qui souhaitent le plus voir l’Union Européenne agir en priorité sur ce sujet (respectivement 46% et 50%).

V- L’Union Européenne, un espace très attractif pour de nombreux dirigeants de PME européens

L’espoir et la confiance affichés par les chefs d’entreprise à l’égard de l’Union européenne trouvent une traduction très concrète dans l’intention, pour 44% d’entre eux, de développer certainement (21%) ou probablement (23%) leurs ventes dans les deux ou trois prochaines années dans des pays de l’Union au sein desquels ils ne sont pas présent aujourd’hui. Assez logiquement, ce projet est encore plus répandu (53%) dans les plus grandes structures (entreprises de 100 à 250 salariés)      
Près de 2 dirigeants sur 10 ont également l’intention de s’implanter dans d’autres pays de l’Union Européenne dans les deux ou trois prochaines années (17%). Là encore cette proportion augmente avec la taille et passe à 26% pour les  entreprises de 50 à 99 salariés et à 28% pour celles ayant entre 100 et 250 salariés.  

VI- La France, un pays malade ?

Les résultats de l’enquête menée par Ipsos et l’Ordre des Experts Comptables ont fait apparaître un certain nombre de « warnings » assez alarmants. Tout d’abord, lorsqu’on demande aux entrepreneurs européens quel est le pays le plus attractif sur le plan économique pour une entreprise, ils citent en premier l’Allemagne et la Grande-Bretagne (respectivement 20%), loin devant la Pologne (13%), l’Espagne (12%) et la Suède (11%). La France est reléguée en queue de peloton (2%), avec l’Italie (3%). Notre pays est cité en dernier par les Français, les Britanniques, les Espagnols et les Suédois.
De même, lorsque l’on demande aux chefs d’entreprise dans quel pays européen en dehors du leur ils estiment qu’il est le plus agréable de vivre, la France n’arrive qu’en 3ème position, ex aequo avec l’Allemagne (13%), loin derrière l’Espagne (21%) et la Suède (20%). Même en ce qui concerne la douceur de vivre, l’hexagone n’est pas aujourd’hui perçu comme le pays le plus agréable.
Les signaux d’inquiétude sont apparus tout au long de l’enquête. Les « petits patrons » français sont ainsi ceux qui éprouvent le plus de sentiments négatifs vis-à-vis de l’UE. Ils sont les seuls qui pensent majoritairement que les chefs d’entreprise ont une mauvaise image dans leur pays (55%, partout ailleurs la majorité des personnes interrogées considère que leur profession est bien vue de la population). Ils font partie de ceux qui disent le plus souvent ne pas avoir l’intention de développer leurs ventes dans des pays de l’Union Européenne (31%, en avant dernière position). Et ils figurent parmi ceux qui ont le moins l’intention de s’implanter dans d’autres pays de l’Union Européenne (14%, avant dernière position). On notera enfin que les dirigeants de PME Français sont ceux qui avouent le niveau de connaissance le plus faible en ce qui concerne la législation d’origine européenne applicable dans leur pays aux PME.


Auteur(s)
  • Etienne Mercier Directeur Opinion et Santé - Public Affairs

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