Personnalités de droite : le temps de l'impopularité

-27 pour Nicolas Sarkozy, -24 pour Charles Pasqua, -13 pour Philippe Séguin et Michèle Alliot-Marie, -9 pour Alain Juppé, -4 pour Edouard Balladur et Alain Juppé, +1 pour François Bayrou et Philippe Douste-Blazy : les indices de popularité (différence entre les jugements positifs et négatifs) sont sévères pour les principales personnalités de l'opposition.

Auteur(s)
  • Jean-François Doridot Directeur Général Public Affairs
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Alors que les périodes d'opposition sont traditionnellement des moments de reconstruction de crédibilité et de légitimité, aucun des grands leaders de la droite n'est parvenu aujourd'hui à reconquérir un capital de sympathie auprès des Français. Depuis plus de deux ans, ces popularités sont en effet au mieux stables à de bas niveaux ou au pire, comme celle de Philippe Séguin, fortement orientées à la baisse. Dans la hiérarchie des personnalités politiques du baromètre Ipsos/Le Point, la première personnalité de droite, Edouard Balladur, n'arrive ainsi qu'au neuvième rang, derrière certes les poids lourds de la gauche (Kouchner, Guigou, Aubry, Lang) mais aussi par exemple derrière…. Arlette Laguiller. La crise de la droite est bien aussi une crise de personnel politique. La comparaison avec le niveau de popularité des principales personnalités de gauche est ainsi éloquente.

La popularité, en indice, des principaux leaders de l'opposition depuis octobre 1999

La popularité, en indice, des leaders de gauche depuis octobre 1999

Toutes les personnalités de l'opposition ne sont cependant pas dans la même situation d'impopularité. On distinguera ainsi les " totalement impopulaires " des " partiellement impopulaires ". Les totalement impopulaires sont ceux qui ne sont populaires dans aucune catégorie sociale de la population française. Michèle Alliot-Marie, la présidente du RPR et Nicolas Sarkozy rentrent dans cette catégorie.

Chez les jeunes comme chez les personnes âgées, chez les cadres comme chez les ouvriers ou retraités, les jugements négatifs à leur encontre sont majoritaires. Ils ne parviennent, et encore de justesse, à recueillir une majorité d'avis positifs qu'auprès des sympathisants de droite : +11 en indice pour Michèle Alliot-Marie et +7 pour Nicolas Sarkozy. Depuis son mauvais résultat des européennes, Nicolas Sarkozy reste massivement impopulaire, son indice oscillant autour de -25. Quant à Michèle Alliot-Marie, pourtant présidente du parti gaulliste, elle continue de souffrir d'un réel manque de notoriété : seuls 63% des Français expriment un avis à son égard, les opinions négative (38%) dominant les positives (25%).

Sur l'année 2000, la dégradation de sa popularité est en outre sensible. L'exemple de la présidente du RPR est assez révélateur d'une droite, qui lorsqu'elle ne cristallise pas de forte opposition, indiffère finalement les Français.

Popularité de Michèle Alliot-Marie depuis janvier 2000

Les partiellement impopulaires sont ceux qui conservent un niveau de popularité correct ou élevé auprès du noyau dur de l'électorat de droite (indépendants, retraités et personnes âgées, hauts revenus et sympathisants de droite). C'est notamment le cas des anciens Premiers ministres RPR, Alain Juppé et Edouard Balladur, et des leaders de l'UDF, François Bayrou, Alain Madelin et Philippe Douste-Blazy.Depuis sa défaite à l'élection présidentielle de 1995, Edouard Balladur n'a jamais retrouvé les niveaux de popularité qui étaient les siens lorsqu'il était à Matignon. Son indice de popularité oscille sans grande évolution depuis de longs mois en dessous de zéro. Il reste néanmoins l'une des personnalités les mieux implantées au sein des catégories traditionnelles de soutiens de la droite : il est ainsi la personnalité la plus populaire auprès des sympathisants de droite (indice de 38) et des retraités (22). La situation est différente pour Alain Juppé. Ce dernier avait lorsqu'il était Premier ministre battu des records d'impopularité, avec un niveau de satisfaction descendu à l'étiage de 18%. Il se reconstruit depuis doucement une popularité. Si les jugements négatifs continuent de prédominer à son égard, les jugements positifs sont tout de même revenus à un niveau plus décent, autour de 35% au long de l'année 2000. S'il reste fortement impopulaire auprès des moins de 59 ans et des catégories salariés, l'ancien Premier ministre est quand même parvenu à regagner une crédibilité auprès de l'électorat de droite : un indice de popularité à +28 en témoigne.

Popularité d'Alain Juppé depuis octobre 1999

Enfin, les deux leaders de l'UDF, François Bayrou et Philippe Douste-Blazy, tous deux dotés d'un indice à +1, font légèrement mieux que leurs homologues du RPR, essentiellement parce qu'ils sont sensiblement moins impopulaires auprès de l'électorat de gauche. Si la popularité de François Bayrou est restée globalement stable en 2000, celle de Philippe Douste-Blazy est en revanche depuis quelques mois dans une tendance sensible à la baisse, à la suite notamment de son prétexte mensonger pour quitter le congrès de l'UDF lors du débat sur l'inversion du calendrier électoral.

Popularité de Philippe Douste-Blazy
depuis octobre 1999

Ces popularités quasiment uniquement partisanes peuvent toutefois suffire pour remporter des batailles municipales. C'est le cas notamment pour Alain Juppé, bien implanté dans une ville, Bordeaux, traditionnellement de droite. Même si les rapports de force paraissent plus serrés, Edouard Balladur devrait également pouvoir " sauver " le XVème arrondissement de Paris grâce à son assise auprès de l'électorat de droite. En revanche, la dégradation de la popularité de Philippe Douste-Blazy fait planer une réelle hypothèque sur sa capacité à succéder à Dominique Baudis à Toulouse.

Dans cet ensemble, la popularité de Philippe Séguin est atypique. Atypique par son évolution, puisque elle est celle qui enregistre la baisse la plus violente depuis trois mois. Atypique par sa structure puisque l'ancien président est le seul leader de droite à être plus populaire auprès des moins de 35 ans que des plus de 35 ans et auprès des ouvriers que des retraités, structure de popularité handicapante pour espérer mobiliser pleinement l'électorat de droite parisien dès le premier tour.

En mal de projet, la droite est aussi en manque de leader. Au pire, ses " poids lourds " sont discrédités au sein même de leur camp, au mieux ils ne disposent que d'une popularité rétrécie à leurs seules catégories de soutien, leur assise sur leur électorat étant cependant moins solide que celle des leaders de gauche. On l'a vu, avec un indice de +38, Edouard Balladur est le responsable politique le plus apprécié des sympathisants de droite. Ce niveau de soutien est bien inférieur à celui recueilli par les leaders de gauche auprès de leur propre électorat : +65 pour Jack Lang ou +60 pour Martine Aubry par exemple. Aucun des leaders de droite ne possède aujourd'hui la moindre capacité de rassemblement et n'est en mesure de s'attirer le soutien des catégories actives et dynamiques de la société française. Il est ainsi symptomatique que pas une personnalité de droite ne soit populaire auprès des salariés (des ouvriers aux cadres en passant par les classes moyennes) et des générations les plus jeunes (de 18 à 49 ans).Dans ce contexte général, le président de la République fait bien sûr figure d'exception avec son profil populaire et rassembleur. A un an de l'élection présidentielle, on ne voit vraiment pas qui, à droite, pourrait contester sa candidature, et ce même en cas de défaite pour la droite à Paris.

Auteur(s)
  • Jean-François Doridot Directeur Général Public Affairs

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