Popularités : l'opinion sanctionne les battus
L'enquête Ipsos conduite pour le Monde avait montré que les Français considéraient globalement que les municipales étaient une forme de match nul entre Jacques Chirac et Lionel Jospin, aucun des deux ne sortant renforcés du scrutin par rapport à l'autre. Le baromètre Ipsos/Le Point, réalisé au lendemain du 18 mars, le confirme. L'évolution de leurs popularités respectives est en effet strictement similaire : la popularité du président enregistre un recul de 6 points par rapport à février, celle du Premier ministre de 5 points. Les deux hommes continuent ainsi de disposer d'un niveau de popularité équivalent, à 56% d'opinions favorables. De manière assez logique à la suite d'une élection où le combat droite-gauche, en tous cas dans les villes, a été intense, leurs popularités se "déconsensualisent". Le président de la République perd 13 points d'opinions favorables auprès des sympathisants de gauche, le Premier ministre 10 auprès des sympathisants de droite. Mais les deux têtes de l'exécutif accusent des pertes également au sein de leur propre camp : baisse de 5 points pour Jacques Chirac auprès de l'électorat de droite, recul de 5 points pour Lionel Jospin auprès de l'électorat de gauche. Une partie -certes très minoritaire- de leur soutien leur fait ainsi clairement porter la responsabilité, pour l'un des échecs de la droite (Paris et Lyon), pour l'autre des échecs de la gauche (perte de nombreuses villes de Province). Du point de vue de l'opinion, les municipales ont été pour l'exécutif un combat sans vainqueur.
En ce qui concerne les personnalités politiques, les battus sont sanctionnés par l'opinion alors que les gagnants connaissent d'importantes hausses de popularités. A gauche, la popularité de Jack Lang perd 10 points (47%), celle d'Elisabeth Guigou 4 (46%). A droite, Philippe Séguin enregistre une chute de 8 points, qui le fait plonger dans l'impopularité (26% d'opinions favorables contre 59% d'opinions défavorables). L'électorat de droite sanctionne fortement sa défaite parisienne. Alors qu'en décembre, il était la personnalité politique la plus appréciée à droite, il n'est aujourd'hui plus qu'en douzième position. En trois mois, les jugements positifs des sympathisants de droite à son encontre se sont effondrés de… 32 points. Du côté des gagnants, Philippe Douste-Blazy (43%, +10 points), François Hollande (41%, +10 points) et Alain Juppé (41%, + 5 points) connaissent les plus fortes hausses.
Au final, ces évolutions modifient assez sensiblement la hiérarchie des personnalités. Bernard Kouchner, dégagé de toutes contingences électorales, trône toujours en tête avec 67% de jugements favorables. Il précède Martine Aubry qui, élue maire de Lille, progresse de 3 points (54%) et retrouve sa deuxième place, Jean-Pierre Chevènement (51%, +2 points), Jack Lang, désormais 4ème, Elisabeth Guigou, qui recule à la 5ème place, Laurent Fabius, Arlette Laguiller, et Philippe Douste-Blazy, première personnalité de droite désormais dans ce baromètre. Son succès à Toulouse lui permet aussi d'occuper désormais la première place auprès de l'électorat de droite.
De manière générale, le succès électoral de la droite dimanche dernier ne rejaillit pas sur la popularité de ses leaders : à l'exception de Philippe Douste-Blazy et d'Alain Juppé, dont les popularités progressent en raison de leur triomphe personnel, les personnalités de droite sont créditées d'une popularité stable à un bas niveau. Succès électoraux locaux mais déficit continu de popularité de ses leaders nationaux : tel est le paradoxe auquel est aujourd'hui confrontée l'opposition, la réciproque s'appliquant, elle, parfaitement à la majorité plurielle.
Enfin, pour les commentateurs et la majorité des Français (voir l'enquête Ipsos/Le Monde), les Verts constituent les grands vainqueurs des municipales. Ils en tirent un bénéfice net en terme d'images, avec une progression de 5 points des jugements positifs à leur égard. (61%). En conclusion, il reste à savoir si toutes ces fortes évolutions sont de nature uniquement conjoncturelles et se corrigeront au fil des mois ou si elles sont porteuses pour certaines personnalités (Philippe Séguin, Jack Lang, Elisabeth Guigou, Philippe Douste-Blazy notamment) de tendances plus lourdes.