Proche-Orient : Israéliens et Palestiniens prêts à l'affrontement

Une vaste enquête menée parallèlement auprès des Israéliens et des Palestiniens montre que, d'un côté comme de l'autre, la volonté d'un règlement pacifique du conflit s'amenuise. Les Palestiniens soutiennent massivement la lutte armée, tandis que la majorité des Israéliens se prononcent en faveur d'une "attaque totale".

Auteur(s)
  • Jean-François Doridot Directeur Général Public Affairs
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Les résultats de l'étude (1) menée au Proche Orient début juillet par le centre palestinien d'études politiques (Ramallah) d'une part, et l'institut Harry S. Truman (université hébraïque de Jérusalem) d'autre part, sont sans équivoque : Palestiniens comme Israéliens témoignent de leur incrédulité face à un éventuel retour à la paix au Proche Orient, à court, moyen ou long terme. Selon l'enquête réalisée mi-juillet, soit juste après l'accord de cessez-le-feu et l'approbation d'un rapport Mitchell pourtant soutenu dans chaque camp, 41% des Israéliens et 46% des Palestiniens estiment toujours que les chances d'atteindre un accord de paix dans les années à venir sont nulles. Près de six Palestiniens sur dix et le quart des Israéliens pensent même que les relations israélo-palestiniennes seront encore plus conflictuelles et violentes dans cinq à dix ans. Moins d'un Israélien sur trois et à peine 10% des Palestiniens voient pour le long terme "plus de paix et de coopération" entre les deux peuples. En Israël comme en Palestine, la part de pessimistes dans la population a au minimum doublé depuis la précédente vague de l'enquête, réalisée il y a un an, après le sommet de camp David.

De part et d'autre, l'opinion publique se radicalise chaque jour un peu plus. Alors qu'il y a quinze jours, la majorité relative des Israéliens (44%) était pour des "représailles militaires modérées pour laisser la porte ouverte à de futures négociations" si les attaques palestiniennes ne s'arrêtaient pas suite au cessez-le-feu, une autre étude réalisée une semaine plus tard, après la série de représailles et contre-représailles menées de part et d'autre, montrait que près de la moitié des Israéliens étaient à présent favorables à "une attaque totale sur l'Autorité palestinienne, ses dirigeants et ses infrastructures", contre seulement 30% qui préféraient la poursuite de la politique actuelle de riposte ciblée (2). Comme de leur côté, les Palestiniens soutiennent toujours massivement la lutte armée et l'Intifada (à plus de 70%), qu'ils jugent plus efficaces que les négociations pour atteindre les objectifs politiques de la nation (70%), on voit mal comment les tensions pourraient s'apaiser.

Pourtant, violence et tension au Proche Orient semblent davantage se nourrir de vengeance conjoncturelle que d'une haine viscérale entre peuples. Sous l'improbable hypothèse "qu'un accord de paix soit obtenu, incluant la création d'un Etat palestinien reconnu par Israël", près des trois quarts des Palestiniens, des Israéliens dans leur ensemble et même plus des deux-tiers des juifs-israéliens, en particulier, encourageraient les efforts de réconciliation entre les deux Etats. Les Palestiniens encourageraient notamment assez largement l'ouverture des frontières et la coopération économique, les Israéliens étant pour leur part plus favorables à une réconciliation culturelle et sociale. 

Par ailleurs, la majorité des juifs-israéliens, soutient d'ailleurs le démantèlement des colonies dans les territoires occupées si cela pouvait conduire à un accord de paix. Dans les territoires palestiniens toutefois, on ne croit majoritairement plus "qu'une paix durable soit un jour possible". Les affrontements meurtriers de ces derniers jours ne sont certainement pas de nature à les faire changer d'avis.

(1) Etude réalisée du 5 au 11 juillet 2001, conjointement par le centre palestinien d'études politiques (Ramallah) d'une part, et l'institut Harry S. Truman (université hébraïque de Jérusalem).1318 Palestiniens interrogés dans 120 lieux de la bande de Gaza et de Jérusalem-Est interrogés en face à face1019 Israéliens interviewés par téléphone (519 Juifs et 500 Arabes).Les mêmes questions ont été posées aux Israéliens et au Palestiniens

Les résultats de l'étude sont consultables sur le site de l'Institut de recherche Harry S. Truman pour l'avancement de la paix : cliquer ici

(2) Enquête Gallup-Maariv réalisée auprès d'un échantillon représentatif de 600 adultes Israéliens.

Auteur(s)
  • Jean-François Doridot Directeur Général Public Affairs

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