Qu’est ce qu’être parent en 2011 ?
La perception critique des Français à l’égard des parents est telle qu’elle semble rejaillir sur la perception que les parents ont d’eux même, ces derniers ayant tendance à se dévaloriser et se juger relativement sévèrement dans un certain nombre de domaines. Au delà de critiques qu’ils formulent à leur égard, les parents semblent parfois désemparés et font état d’un réel désarroi face aux responsabilités leur incombant et aux craintes qu’ils ressentent à l’égard de leur enfant. Pour autant, les parents font preuve de beaucoup de dynamisme pour s’adapter aux évolutions de la société et de leurs enfants, dynamisme que les non-parents semblent paradoxalement (et injustement) peu percevoir. En effet, même si la mère reste un référent, il y a une tendance au rééquilibrage des tâches entre père-mère, les deux parents s’investissant conjointement dans de nombreux domaines liés à l’éducation de leur enfant. Par ailleurs, si l’émancipation de leur enfant semble rapide, les parents restent des garde-fous efficaces en faisant attention à faire respecter des âges moyens d’émancipation faisant sens.
Un bilan d’image mitigé à l’égard des parents d’aujourd’hui envers qui les Français se montrent globalement assez critiques
Le statut des parents d’aujourd’hui n’est pas vraiment valorisé par la société française, les Français se révélant assez partagés en ce qui concerne l’image qu’ils en ont. Ils ne sont qu’une faible majorité à déclarer en avoir une bonne image (53%) tandis que 47% des sondés déclarent en avoir une mauvaise image. Parmi une liste de 29 termes proposés, une très large majorité des répondants estime que le « manque d’autorité » est celui qui caractérise le mieux les parents d’aujourd’hui (71%). D’autres termes à connotation négative viennent compléter le haut du classement et témoignent de l’image critique et du désarroi que renvoient les parents à la société française : ainsi, les mots « stress » (40%), « difficulté » (38%), « fatigue » (34%), « conflit » (28%), « besoin d’aide » (27%), « incompréhension » (24%) et « manque de connaissance » (23%) trustent les autres places du top 10. Il faut attendre respectivement les 7ème et 9ème places du top 10 pour que les mots à connotation neutre (« responsabilité », 25%) et surtout positive (« tendresse », 24%) fassent leur apparition. Les autres termes à connotation positive viennent se placer en milieu et fin de classement. Notons toutefois que les mots « dialogue » (22%), « complicité » (20%), « écoute » (20%) sont cités par plus d’un répondant sur cinq. "Le manque d'autorité" est au final largement en tête des citations chez les "non-parents" de l'échantillon (73%) comme chez les "parents" (67%).
L'enquête montre également qu'une large majorité de Français a le sentiment que les parents d’aujourd’hui manquent cruellement d’autorité puisqu’ils les jugent à la fois trop laxistes (76%), trop copains (66%), trop tolérants (61%) et pas assez sévères (81%) avec leur enfant. Les répondants sont aussi critiques à l’égard des parents eux-mêmes puisqu’ils estiment qu’ils sont trop stressés (70%), craintifs (42%) et protecteurs (41%) et qu’ils ne sont pas assez disponibles (77%), vigilants (71%), pédagogues (68%), équilibrés (58%) et à l’écoute (57%). Les sondés ne remettent pas pour autant en question le fait que les parents d’aujourd’hui puissent avoir de bonnes relations avec leur enfant : ils sont jugés être suffisamment tendres (57%), ouverts (46%) et complices (40%) avec leur progéniture.
A la décharge des parents, 3 Français sur 4 (75%) estiment qu’il est plus difficile d’élever des enfants aujourd’hui que cela l’était pour la génération de leurs parents (dont 33% qui estiment que c'est beaucoup plus difficile.
Des rôles père-mère qui ont tendance à se confondre au sein de la famille, même si la mère reste majoritairement celle en charge des tâches concernant leur enfant
Deux Français sur trois (67%) ont le sentiment que les rôles père-mère ont tendance à se confondre. Ceux constatant cette tendance ont un avis partagé à ce sujet puisqu’ils sont tout autant à considérer que c’est une bonne chose (49%) qu’une mauvaise chose (50%). L’âge et la catégorie socioprofessionnelle sont des éléments explicatifs à ce résultat clivé. En effet, les répondants les plus jeunes (moins de 40 ans, 52%) et les cadres supérieurs (61%) / professions intermédiaires (55%) plébiscitent cette répartition tandis que les répondants plus âgés (40 ans et plus, 51%) et les ouvriers (51%) / employés (50%) la déplorent. Seul un tiers des répondants (33%) estime que chacun des protagonistes conserve un rôle bien déterminé au sein de la famille, résultat davantage prononcé chez les parents (40%), les employés (41%), les ouvriers (36%) et les répondants les plus jeunes (moins de 40 ans, 41%). Parmi eux, une large majorité des répondants estime que cela est une bonne chose (75%), score logiquement plus élevé chez les parents (84%), les employés (79%), les ouvriers (76%) et les répondants les plus jeunes (moins de 40 ans, 79%).
Pour autant, la mère reste le référent en matière de gestion des tâches concernant leur enfant. Rester à la maison quand l’enfant est malade (68%), aller voir les enseignants pour parler de sa scolarité (51%), recueillir ses confidences (51%) et l’aider à faire ses devoirs (45%) sont des tâches qui incombent en effet selon une majorité de Français plus à la mère qu’au père. Ces résultats sont d’autant plus saillants chez les non-parents qui attribuent sans aucune hésitation ces tâches à la mère (respectivement 84%, 67%, 76% et 66%). En ce qui concerne l’avis des principales intéressées, les mères considèrent que la plupart de ces tâches leur incombent. Elles partagent uniquement avec le père la tâche de disputer, de punir leur enfant lorsqu’il fait des bêtises. Elles assurent toutes les autres tâches principalement seules voire à deux, le père seul n’étant quasiment jamais évoqué. Les pères quant à eux attribuent aussi une grande partie de ces tâches aux mères, sauf celles de partager avec leur enfant des activités de loisirs ou de le disputer, tâches gérées majoritairement à deux voire seul.
Des parents qui arrivent à mieux relativiser les difficultés qu’ils peuvent rencontrer que celles qui peuvent toucher directement leur enfant
Une large majorité de parents (70%) avoue avoir déjà eu des réactions trop dures par rapport à ce qu’exigeait la situation. Plus de la moitié estime aussi avoir déjà manqué de moyens financiers pour élever leur enfant comme ils le souhaiteraient (59%), avoir été complètement désemparés face à certaines de leurs réactions répétées (58%) ou d’avoir éprouvé le sentiment qu’ils passaient à coté de leur enfance / adolescence (52%). Enfin, seuls 43% des parents estiment avoir eu besoin d’une aide matérielle dans la gestion de la vie quotidienne de leur enfant. A l’inverse, les non-parents sont beaucoup plus alarmistes que les parents puisqu’ils estiment qu’ils rencontrent en moyenne 4,3 difficultés sur les 5 proposées. En effet, la quasi-totalité d’entre eux considère qu’il arrive souvent ou parfois aux parents d’aujourd’hui d’être complètement désemparés face à certaines réactions de leur enfant (96%), d’éprouver le sentiment qu’ils passent à coté de leur enfance / adolescence (90%) ou de rencontrer des difficultés d’ordre financier (91%) ou matériel (89%). Seul le fait d’avoir des réactions trop dures par rapport à ce qu’exigeait la situation est moins cité chez les non-parents que chez les parents (score qui pour rappel arrive en tête de leur palmarès). Ce dernier élément est encore révélateur du manque d’expérience et de connaissance de la parentalité par les non-parents, qui se focalisent ici plus sur des difficultés matérielles ou d’éducation mais moins émotionnelles. Les mères se sentent quant à elles plus affectées que les pères par l’ensemble de ces difficultés, surtout celles d’ordre matériel (48% des mères contre 36% des pères) et financier (64% contre 54%). Elles sont aussi plus nombreuses que les pères à s’être senties complètement désemparées face à certaines réactions répétées de leur enfant (63% contre 53%).
Le niveau de craintes ressenti par les parents à l’égard de leur enfant est très fort puisqu’ils déclarent éprouver en moyenne 4,6 craintes sur les 7 proposées, signe là aussi du réel désarroi qu’ils peuvent éprouver à l’égard de leur enfant. La première crainte ressentie par une très large majorité des parents est celle que leur enfant se fasse agresser ou qu’il ait de mauvaises fréquentations. En effet, plus de 7 parents sur 10 avouent avoir peur que leur enfant se fasse agresser ou racketter (79%), ait de mauvaises fréquentations (76%) ou se fasse agresser sexuellement (74%). Viennent ensuite les craintes de voir leur enfant en situation d’échec ou de dépendance. Une majorité des parents ont peur que leur enfant connaisse l’échec scolaire ou professionnel (71%), qu’il soit rejeté par les autres enfants (61%) ou qu’il tombe dans la dépendance (56%). Seuls 40% d’entre eux craignent que leur enfant n’ait pas accès à une alimentation saine et équilibrée, chiffre qui s’explique peut-être par le fait que c’est la seule crainte sur laquelle les parents pensent pouvoir agir et aura peut-être le moins de répercutions sur l’avenir de leur enfant. Les mères sont ici aussi globalement plus anxieuses que les pères et ressentent davantage l’ensemble de ces craintes. Elles sont d’autant plus préoccupées par les mauvaises fréquentations de leur enfant (81% des mères contre 71% des pères) que par le rejet qu’il pourrait subir par les autres enfants (66% contre 54%).
Un bulletin de note attribué aux parents qui varie selon que l’on soit soi-même parents ou non-parents
Les parents s’octroient sur l’ensemble des items proposés de meilleures notes que ne le font les non-parents. En effet, les parents s’attribuent au global une note de 7,1 / 10 tandis que les non-parents, beaucoup plus sévères à leur encontre, leur octroient tout juste la moyenne (5,0 / 10). Les parents s’attribuent en effet des notes relativement bonnes sur l’ensemble des items proposés, aucune d’entre elles ne descendant en dessous de la barre des 6,5 / 10.
Dans le détail, les parents s’octroient les meilleures notes pour leurs capacités à encourager et stimuler leur enfant (7,6 / 10), à être complices avec lui (7,6), à écouter et comprendre ses problèmes et difficultés (7,5) ainsi qu’à l’aider à faire ses devoirs et à lui expliquer ce qu’il ne comprend pas (7,4). Ils s’attribuent ensuite des notes toujours supérieures à 7 / 10 en ce qui concerne leur capacité à montrer et faire respecter leur autorité (7,3 / 10) et à résoudre les conflits avec leur enfant (7,0). Ils s’octroient toutefois des notes plus sévères en ce qui concerne le temps qu’ils accordent à leur enfant (6,8 / 10), leur capacité à le punir (6,8) et à être patient (6,6) ou rester calme avec lui (6,5). On retrouve ici des situations vécues par les parents et qui engendrent peut être chez eux un léger sentiment de culpabilité.
Même s’ils se notent sévèrement sur ces derniers items, une majorité des parents ne remet pas en doute le fait qu’ils réussissent à remplir leur mission de parent dans un grand nombre de domaines. Notons tout de même que 17% des parents ne se considèrent pas être de « bon parent » (note globale octroyée inférieure ou égale à 5 / 10), où on retrouve là des parents complexés et désemparés, à l’image que s’en font les non-parents.
Les non-parents dressent en effet un bulletin de note beaucoup plus sévère à l’encontre des parents, ne leur octroyant aucune note supérieure à 6 / 10. Les non-parents, même s’ils sont plus sévères dans leur notation, ne remettent pas vraiment en question la capacité des parents à être complices avec leur enfant (6 / 10), à l’encourager ou le stimuler (5,7) ou à l’aider dans ses devoirs (5,6). Ils octroient aussi une note toujours au dessus de la moyenne à leur capacité d’écoute (5,2) et à leur faculté à être patient (5,1) ainsi qu’à rester calme (5,0) avec leur enfant. Par contre, ils pointent une fois de plus du doigt le fait que les parents n’accordent pas assez de temps à leur enfant (4,7 /10) et surtout qu’ils manquent d’autorité en mettant clairement en doute leur capacité à résoudre les conflits avec leur enfant (4,5) ainsi qu’à montrer et faire respecter leur autorité (4,1) ou à punir leur enfant (4,0). Les non-parents là encore ne se défont pas de l’idée que les parents d’aujourd’hui ont de grosses faiblesses en matière d’autorité.
Des parents plébiscitant des mesures relatives aux différents congés liés à l’arrivée d’un enfant et à la gestion de la relation famille – travail
Les Français estiment que c’est la prise de position des candidats à l’élection présidentielle sur les sujets relatifs à l’école qui aura le plus d’influence sur leur vote. En effet, la gestion de la violence à l’école arrive largement en tête du palmarès (71% des répondants estiment que la prise de positions des candidats sur ce sujet aura une influence primordiale sur leur vote), suivie ensuite par la problématique des moyens alloués à l’école et les liens entre l’école et le monde du travail (respectivement 56% et 46% des répondants jugent ces sujets primordiaux).
Les aides pouvant être mises en place pour faciliter le lien famille – travail requièrent ensuite l’attention des Français. La prise de position des présidentiables concernant les aides pour faire garder les enfants en bas âge (42%), pour faciliter le retour des femmes à l’emploi après un congé maternité ou parental (40%) ou pour améliorer l’articulation entre famille et travail (38%) auront une influence primordiale sur leur vote.
Enfin, leurs prises de position sur les rythmes scolaires ou la carte scolaire n’aura une influence plus importante que primordiale sur leur choix de vote (respectivement 41% et 43%) tandis que les Français jugent secondaire leurs prises de position sur les droits des personnes homosexuelles dans le domaine de l’adoption.
La quasi-totalité des Français est aussi favorable aux mesures concernant la gestion du lien famille - travail et la violence à l’école, deux thèmes sur lesquels la prise de position des présidentiables sont attendus. Le fait d’inciter les entreprises à mettre en place des mesures destinées à faciliter la vie des jeunes parents (93% des répondants y sont favorables, dont 46% le sont même « très) ou introduire des travaux d’intérêt général pour lutter contre la violence en milieu scolaire (92% de favorable, dont 60% de très favorables) sont en effet plébiscités.
Plus de 4 répondants sur 5 sont aussi en faveur d’un statut accordé aux beaux parents de familles recomposées (83% y sont favorables), d’introduire une part de contrôle continu dans l’examen du baccalauréat (82%) et d’augmenter la rémunération du congé parental (80%).
Encore une large majorité de répondants plébiscite la création d’un congé d’accueil de l’enfant d’une durée de 8 semaines à prendre à la suite du congé maternité (78%), le développement de l’apprentissage des langues vivantes étrangères dès la maternelle (75%), l’allongement de la durée du congé maternité (74%) et la garantie de l’accueil des enfants en maternelle dès l’âge de 2 ans et demi (71%).
Enfin, la mesure qui suscite un rejet massif de la part des répondants est celle d’interdire la fessée puisque 80% y sont défavorables. Les Français ne sont en effet pas du tout prêts à la voir prohiber, la considérant peut-être être comme une bonne réponse au manque d’autorité rencontré par les parents ou estimant que cette punition n’a pas à être interdite mais doit plutôt être laissée au jugement des parents.
Fiche technique :
Sondage Ipsos pour Enfant Magazine & Femme Actuelle
Echantillon de 1000 personnes âgées de 18 ans et plus représentatif de la population française interrogées par internet du 21 au 27 juillet 2011.