Référendum : vers la victoire du "ni oui ni non"

La dernière vague du baromètre Ipsos-Vizzavi-Le Point-France 2-Europe 1 sur le référendum confirme que le "oui" au quinquennat devrait largement l'emporter, dans un scrutin marqué par une très forte abstention. Cette étude révèle également les bonnes raisons invoquées par les Français pour bouder les urnes.

Auteur(s)
  • Jean-François Doridot Directeur Général Public Affairs
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Il ne fait pas de doute que le quinquennat sera adopté suite au référendum du 24 septembre. Aujourd'hui, l'avance du "oui" est telle (64 points, soit 82% contre 18% pour le "non") que l'on imagine mal comment les adversaires à la réduction du mandat présidentiel pourraient l'emporter.

La vraie interrogation concerne la participation. Va-t-on battre pour ce scrutin le record d'abstention du 6 novembre 1988, quand 63,11% des électeurs avaient choisi de ne pas se prononcer sur le statut de la Nouvelle Calédonie ? C'est en tout cas envisageable.Les 8 et 9 septembre 2000, seulement 36% des électeurs se déclaraient "tout à fait certains d'aller voter". De plus, contrairement à ce que l'on observe traditionnellement dans les enquêtes pré-électorales, la tendance est assez nettement orientée à la baisse (-2 points en une semaine, -8 points sur les quinze derniers jours.) Les électeurs de droite sont à peine plus motivés que les proches de la gauche plurielle (41% de "certains d'aller voter" à droite, contre 35% à gauche.)

Vraisemblablement dimanche 24 septembre, un "ni oui ni non" massif éclipsera en partie le résultat de la consultation. Les raisons de l'abstention sont diverses et variées. Parmi les deux tiers d'électeurs "pas certains d'aller voter", 33% évoquent leur manque "d'avis tranché" sur la question. Cette proposition, la plus souvent citée, relativise quelque peu le désintérêt des Français pour la question. Certes, le sujet ne les passionne guère. Mais les électeurs s'abstiendront également parce qu'ils ne savent pas dans quel camp se placer. L'absence de débat sur la place publique, sur les avantages, les inconvénients, les enjeux de la réduction du mandat présidentiel, se fait ici cruellement sentir, et sera pour partie responsable d'une faible mobilisation le jour du scrutin.

Les autres raisons invoquées sont en revanche plus attendues : un tiers des abstentionnistes potentiels "ne se sent pas concerné par la réduction de la durée du mandat présidentiel", 30% ne pourront tout simplement "pas aller voter" ce jour là et un quart estime encore que leur vote serait de toute façon inutile, tant "le oui est sûr de l'emporter". L'abstention idéologique, ("le parti dont vous vous sentez le plus proche appelle à l'abstention") recueille 11% de citations. On ne recense en fait que 10% d'abstentionnistes invétérés, qui "s'abstiennent toujours ou presque pendant les élections".Plus globalement, le référendum souffrira inéluctablement du désintérêt massif des Français pour la question. A peine un tiers des électeurs manifeste aujourd'hui un intérêt pour la réduction du mandat présidentiel (contre 66% d'avis contraire.) Là encore, la tendance n'incite pas à l'optimisme. Les rangs des "intéressés" sont de plus en plus clairsemés au fur et à mesure que le scrutin approche (de 41% à 33% aujourd'hui, soit une chute de 8 points en quinze jours.) Pour mémoire, 53% des électeurs se déclaraient intéressés par le statut de la Nouvelle Calédonie une semaine avant le scrutin…

Si l'on pensait un temps que le lancement officiel cette semaine de la campagne électorale parviendrait à mobiliser quelque peu les électeurs, aujourd'hui rien n'est moins sûr. Pourtant, les enquêtes d'opinion montrent depuis longtemps l'attachement des Français à être consultés plus régulièrement. Le référendum sur le quinquennat devrait donc les intéresser à double titre : il leur donne l'occasion de s'exprimer, éventuellement en faveur d'un quinquennat correspondant à ce souci de "contre-pouvoir", ou tout du moins de consultations plus rapprochées. Or, on se dirige vers le record d'abstention de la Ve République : drôle de paradoxe ...

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  • Jean-François Doridot Directeur Général Public Affairs

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