A cent jours des élections régionales du 15 mars 1998, la majorité domine l’opposition UDF-RPR, indique l’enquête IPSOS-le Point. Au stade actuel, la première grande compétition nationale depuis la victoire de la gauche aux législatives de juin 1997 se présente plutôt bien pour le camp gouvernemental: 39% des personnes interrogées souhaitent "la victoire de la gauche", contre 34% celle de la droite tandis que 27% ne veulent ni l’une ni l’autre ou bien ne se prononçent pas.
En point moyen, les listes PS-PC-Verts totalisent 45% des intentions de vote contre seulement 35% pour les listes UDF-RPR. Cet écart de dix points en faveur de la gauche s’explique, en partie, par le fait que cette enquête propose des listes propres au PCF, au PS et aux écologistes. On ignore, en effet, au stade actuel, dans quel nombre de départements les formations de la majorité iront à la bataille avec une liste commune ou bien en ordre dispersé.
La gauche, qui ne dirige actuellement que deux régions sur vingt-deux (Nord-Pas-de-Calais et Limousin), a cependant tout à gagner dans un scrutin qui effacera les régionales désastreuses, pour elle, de 1992. Le gouvernement socialiste d’Edith Cresson subissait alors un très fort rejet dans l’opinion: le parti gouvernemental ne rassembla que 18,3% des suffrages exprimés, la gauche non communiste se hissant péniblement à 20,4% des voix. Avec une première fourchette d’intentions de vote entre 28 et 32%, le PS semble assuré d’enregistrer, au printemps prochain, une sérieuse progression par rapport à cette très basse référence. Le parti de Lionel Jospin pourrait même faire mieux qu’en juin 1997, ce qui constituerait une belle performance pour une formation gouvernementale.
Crédité d’un score allant de 8,5% à 10% des intentions de vote, le PCF est en léger progrès par rapport aux régionales de 1992, mais à peine stable au regard des dernières législatives. Côté écologistes, les Verts semblent s’être refait une petite santé (entre 4 et 6% des intentions de vote), alors même que d’autres sensibilités de cette mouvance pourraient grappiller quelques pourcentages.
Dans l’autre camp, créditée de 33% à 36,5% des intentions de vote, l’opposition UDF-RPR est en recul par rapport aux régionales précédentes et semble peiner à retrouver les 35,8% des dernières législatives. La droite classique souffre toujours de la forte concurrence du Front national. Au stade actuel, l’extrême-droite (entre 15 et 17% des intentions de vote) pourrait progresser sensiblement par rapport à 1992 et même 1997.
Ces indications ne représentent que la position de départ des différentes forces politiques. Elles sont à interpréter avec d’autant plus de précaution que l’on ignore la configuration exacte des listes dans les départements ainsi que le nom des personnalités qui les conduiront.
Le scrutin du 15 mars 1998 sera-t-il un véritable test national ? Une courte majorité de sondés (55%) entend se déterminer en fonction de la situation politique de la région dans laquelle ils vivent. Seul l’électorat communiste semble privilégier le contexte national. Les prochaines régionales intéressent plutôt les Français, mais on remarque que près d’un tiers des personnes interrogées ne se prononcent pas sur le bilan du président de leur Conseil régional. L’institution régionale, et ses réalisations, demeurent assez méconnues. Et c’est seulement dans l’électorat UDF-RPR que la satisfaction à l’égard du bilan régional franchit la barre de la majorité absolue des opinions.
A droite comme à gauche, ces régionales vont poser de sérieuses questions stratégiques. Les formations de la "majorité plurielles" doivent-elles aller unies devant les électeurs ? Tel est le souhait de deux-tiers des sympathisants socialistes et d’une majorité absolue de proches du PCF. Du côté des écologistes, l’option de listes uniques rencontre cependant un accueil nettement plus partagé. La droite, pour sa part, se pose la question d’une éventuelle alliance avec le Front national. Une telle perspective est rejetée par les deux-tiers des sympathisants UDF-RPR, même si la famille néo-gaulliste s’y montre sensiblement moins hostile que la sensibilité libérale de l’opposition. L’orientation préconisée publiquement par Edouard Balladur, selon laquelle la droite ne s’alliera pas avec le FN pour obtenir des présidences de région, correspond au souhait d’une forte majorité de l’électorat de la droite classique.