Réputation, nouveaux défis et nouvelles opportunités

Gérer sa réputation, c'est instaurer une relation de confiance avec ses différentes parties prenantes. Mais dans une époque où le moindre incident relayé et commenté sur les réseaux sociaux peut compromettre ce fragile équilibre, comment les entreprises peuvent préserver cette confiance tout en continuant à se développer ? Découvrez nos analyses et recommandations partagées lors de la conférence "Réputation, quelle nouvelle donne ?"

Auteur(s)
  • Brice Teinturier Directeur Général Délégué France, Ipsos (@BriceTeinturier)
  • Fabienne Simon Chief client officer
  • Guillaume Petit Directeur Corporate Reputation
  • Thibaut Coiffier Directeur associé, Advise
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Ubersatisfait… et uberméfiant. C’est le double visage de l’utilisateur de l’application mobile Uber. D’un côté, il apprécie les tarifs compétitifs et la fluidité de service de la plateforme de VTC. De l’autre, il critique la firme américaine sur ses pratiques sociales et fiscales qui font débat. D’où la réputation d’Uber… discutée et discutable.

« La réputation est un phénomène complexe, explique Guillaume Petit, directeur du département Réputation chez Ipsos Public Affairs. Elle résulte d’opinions, d’émotions, de perceptions et d’expériences diverses, plus ou moins congruentes, et parfois contradictoires. Et une entreprise n’a pas une réputation, mais parfois plusieurs, en fonction de la diversité de ses parties prenantes (grand public, investisseurs, partenaires, influenceurs…), chez qui elle sera perçue de manière différente. » 

Les trois dimensions indissociables de la réputation

Pour obtenir la considération de ses consommateurs, l’entreprise remplit un triple contrat. Tout d’abord, leur proposer des produits ou services utiles. Ensuite, elle veille à emporter leur adhésion sur ses valeurs et sur son projet. Le troisième contrat concerne l’avantage concurrentiel qui distingue l’entreprise des autres acteurs du marché et qui profite aussi à ses clients.

"L’indicateur magique de réputation n'existe pas !"

« Si la réputation se construit sur ces trois dimensions complémentaires et indissociables, chacune prend plus ou moins d’importance, d’une l’entreprise à l’autre », souligne Thibaut Coiffier, consultant senior chez Ipsos Advise. Ainsi chez certains acteurs et sur certains marché, l’utilité prévaut sur l’avantage concurrentiel et surtout sur l’adhésion aux valeurs. Pour le réseau coopératif Biocoop, l’avantage concurrentiel repose avant tout sur l’engagement sociétal de la marque et l’adhésion des clients à ses engagements en matière d’agriculture biologique et de commerce équitable. Quant à Free, l’opérateur internet et mobile privilégie depuis toujours l’avantage concurrentiel (innovation disruptive, tarifs agressifs).
Chacune des trois composantes de la réputation touche plus ou moins les différentes cibles de l’entreprise : clients, journalistes, investisseurs, collaborateurs, ONG et associations… Les opinions n’ont pas le même degré d’importance et « l’indicateur magique de réputation » n’existe pas !

La réputation fragilisée face au web social tout-puissant

« Internet et les réseaux sociaux engendrent des flux permanents d’infos que plus personne ne contrôle », observe Brice Teinturier, directeur général délégué France, Ipsos. En un clic, la réputation d’une entreprise peut se ternir. Aucune n’est à l’abri d’un incident de réputation, ou pire d’une cyber-attaque, à l’instar de VINCI.

Interpellations et invectives contre les marques se démultiplient. Dernièrement, New Balance en a fait les frais. Un bad buzz a enflammé les réseaux sociaux, après une déclaration à la presse de son vice-président, qui espérait du changement, suite à l’élection de Donald Trump. Aussitôt, la marque est cataloguée pro-Trump. Des internautes brûlent leurs chaussures de sport siglées NB, et postent les images sur les réseaux sociaux. Les tentatives d’explication de la marque n’y font rien. C’est alors qu’un site américain d’extrême-droite lui apporte son soutien. Un effet « huile sur le feu », que New Balance a tenté de circonscrire en vain. L’internaute prend également davantage la parole en tant que salarié, ce qui n’est pas sans poser de problème pour les entreprises. Jusqu’où pousser la transparence, et comment gérer l’implication de ses salariés sur les réseaux sociaux ? Autant de questions que se posent les directeurs de la communication, que nous avons interrogés dans le cadre de notre grande enquête internationale, le Reputation Council.

« Avec le web social, tout le monde peut exprimer son sens critique aiguisé et mobiliser sa/ses communauté(s). Soigner sa réputation, c’est toujours adapter ses réponses à chaque partie prenante sans jamais transiger avec la cohérence d’ensemble »
— Thibaut Coiffier —

Sous l’effet de la digitalisation, le citoyen-consommateur a changé. Il privilégie les solutions collaboratives avec ses pairs (logement, transport, financement…), veut faire par lui-même (la mode du « do it yourself » portée par les tutoriels sur YouTube) et se mobilise volontiers. « Avant, le citoyen-consommateur français était résigné, rappelle Brice Teinturier. Aujourd’hui, il fait preuve d’une capacité de mobilisation très rapide et pour des causes variées. » De « Touche pas à mon pot de Nutella » contre le projet de taxe sur l’huile de palme, au mouvement de soutien #JeSuisCharlie. Le citoyen-consommateur est de plus en plus défiant, ce qui pousse les marques à jouer la carte de la transparence. Comme Fleury Michon avec sa campagne de communication sur le surimi pour prouver la qualité et la traçabilité de sa production.

Certains internautes parlent plus fort que d’autres sur les réseaux sociaux. D’après la fameuse règle du 90-9-1 de l’expert danois Jakob Nielsen, 90 % des utilisateurs se contentent de lire les posts, 9 % les commentent, et seulement 1 % créent et publient des contenus. « Il y a un risque évident de sur-représentation et de sur-simplification, analyse Guillaume Petit. Nous croisons donc les données du web avec les résultats d’études, pour obtenir des indicateurs fiables sur la réputation, et dégager des opportunités. »


5 CONVICTIONS SUR LA RÉPUTATION

Une bonne réputation contribue à fidéliser les clients, aide à en conquérir de nouveaux, permet de se rétablir plus vite d’un incident réputationnel et favorise une compréhension des contraintes et des enjeux de l’entreprise dans les prises de décisions législatives ou réglementaires. Alors comment capitaliser sur sa réputation ? Voici nos cinq recommandations.

— 1 —
Se différencier

Les valeurs de marque, comme les discours RSE sont parfois interchangeables d’une entreprise à l’autre, d’un secteur à l’autre, ce qui nuit d’emblée à leur crédibilité, voire à leur « audibilité ». Il revient au contraire à chaque entreprise, d’affirmer sa différence, tout en restant authentique et en assumant sa personnalité. C’est la seule voie pour capter l’attention, susciter de l’intérêt et être écouté…. In fine considéré.

— 2 —
Accepter d'être faillible

L’entreprise ne peut plus contrôler. En cas de couac, il faut a minima envisager le mea culpa. « Un incident peut être l’occasion de rebondir à son avantage à condition d’être crédible pour être audible et entendu », insiste Thibaut Coiffier. Accepter d’être faillible, mais assumer également ses imperfections : l’entreprise est porteuse d’une identité, et la cohérence et la constance sont toujours préférées aux changements de posture au gré de l’opinion majoritaire, si l’entreprise se montre également ouverte aux critiques et aux changements.

—3—
Oser s'engager

La parole des entreprises est attendue : 72 % des Français se disent intéressés, quand les dirigeants présentent leurs innovations, et 64 % quand ils évoquent des pistes en vue de redresser la France. Les citoyens-consommateurs aspirent à ce que les entreprises s’engagent dans des domaines précis, tels l’épanouissement des salariés, l’expérience client, la protection de l’environnement… L’incarnation de ces messages par un dirigeant ou le dirigeant est une piste à ne pas négliger.

—4—
Être préparé

La gestion du risque de réputation doit être menée de façon transversale dans l’entreprise et à tous les niveaux. Plusieurs outils permettent un pilotage du risque : retours consommateurs, modélisation de scénarii… En matière de risques, celui concernant les cyber-attaques est de plus en plus prégnant comme nous le confirme désormais l’actualité, ainsi que les directeurs de la communication du Reputation Council interrogés : 42% le citent comme une des principales menaces pour leur entreprise. Tout en avouant leur difficulté à s’y préparer, ce genre de risque étant par définition en constante évolution dans sa forme et dans ses effets.

—5—
Écouter

Les salariés, les clients, les parties prenantes, les fournisseurs, les influenceurs…. L’entreprise se déploie au cœur d’un éco-système, qu’à défaut de maîtriser, elle doit comprendre et dont elle doit capter les inflexions pour prendre les bonnes décisions.


 « Plus que jamais, la réputation se situe au cœur des enjeux business de l’entreprise. Si une « bonne réputation » permet d’amortir certaines crises dans une logique défensive, elle est aussi (et surtout !) un puissant levier de développement pour chaque entreprise, en lui assurant l’attractivité qui prépare ses succès de demain ! »
— Fabienne Simon —

Découvrez les résultats de notre enquête Reputation Council : 109 communicants seniors de grandes entreprises interrogés à travers le monde sur les 6 sujet suivants :

  1. Communication de crise : ce qui permet de s’en sortir
     
  2. Répondre au nouveau risque de la cybercriminalité
     
  3. L’importance de la nationalité de l’entreprise dans sa réputation
     
  4. Identifier et mesurer le risque de réputation
     
  5. La transparence : jusqu’où ?
     
  6. Comment les réseaux sociaux travaillent-ils pour l’entreprise ?

THE REPUTATION COUNCIL
Latest findings from the eleventh sitting
 

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  • Brice Teinturier Directeur Général Délégué France, Ipsos (@BriceTeinturier)
  • Fabienne Simon Chief client officer
  • Guillaume Petit Directeur Corporate Reputation
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