Trend Observer fête ses 10 ans
A l’occasion des dix ans de Trend Observer, l’observatoire international des tendances émergentes, Ipsos Insight organisait le 12 décembre dernier au Palais de Tokyo, une grande rétrospective des tendances de société et de consommation.Retour sur les trois grandes phases qui ont marqué la décennie 1997- 2006.
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1997-2001 : l'euphorie technologique
Période de grande illusion, et d'enthousiasme, ces années marquent l'avènement du « tout technologique » dans la société de consommation. L'euphorie liée à l'expansion de la « bulle internet » ainsi que le véritable culte voué aux valeurs d'interaction, d'ouverture et de rapidité marquent avant tout l'espoir d'accomplir un vrai projet personnel.
Cet engouement général pour les technologies et l'affirmation de la singularité de l'individu marquent le retour du matérialisme et des discours de réussite.
Le développement de la « Net Economy » affirme le primat de l'individu, du talent individuel et de la créativité personnelle. C'est l'époque des « gourous » du net de Nicholas Negroponte à Bill Gates, en passant par Pierre Levy en France et son concept de « cyberculture » ou Jeremy Rifkin aux Etats-Unis et ses théories sur le nouvel « âge de l'accès ».
L'attrait du « Do It Yourself » reflète la volonté des individus de devenir acteurs de leur vie plutôt que de la subir. Dans ce contexte, le pouvoir de l'argent s'affiche sans culpabilité. Dans ces années, l'opulence se justifie comme une récompense à la réussite personnelle. A l'instar des « années fric » (les années 80), les signes de richesse sont exhibés comme autant de symboles de réussite.
C'est aussi une période où l'excentricité et l'extravagance sont en vogue. Des comportements qui étaient jusque là signes de vulgarité et de « laisser-aller » se diffusent avec succès dans un pays comme le Japon par exemple.
2001-2004 : l'ère des peurs
L'effondrement de la bulle Internet et les attentats du 11 septembre ont soudainement rompu avec ce bel enthousiasme et ouvert une nouvelle ère : celle des peurs et des insécurités. Les consommateurs sont désormais en quête de protection et cherchent refuge dans la sphère privée.
Dans ce climat général d'incertitude et d'insécurité, trois courants, qui sont autant de façon de vivre à l'ère des peurs se dégagent :
Réalisme et hyper-réalisme
Loin de l'utopie des années antérieures, la tendance est à la résurgence d'un idéal simple, concret, accessible. Le futur se construit au présent. Le bonheur se doit d'être pragmatique et réalisable. Il faut affronter la réalité « telle qu'elle est » sans chichi ni trompettes.
L'essor des talks shows, de la téléréalité, des docu-vérités… sont des expressions particulièrement révélatrices de cette tendance. Les films « coup de poing » de Michael Moore font une percée au milieu des blockbusters de rigueur, Catherine Millet exhibe de façon froide et crue ses pratiques sexuelles : l'époque est à l'hyperréalisme. La bulle ouatée et doucereuse de la seconde moitié des années 1990 est derrière nous.
Le neo conservatisme
Pourtant, prenant le contre-pied du mouvement hyperréaliste, les « néo-conservateurs » essaient de maintenir l'euphorie en se réfugiant dans un culte nostalgique et assagi au passé. Le style rétro est à l'honneur : mode, design, automobile… tous les secteurs surfent sur la tendance.
Affirmer son appartenance nationale et renouer avec ses origines deviennent des façons de préserver un équilibre de plus en plus fragile pour certains.
La poussée des partis conservateurs dans de nombreux pays occidentaux ou le neo-japonisme traduisent ce repli dans la tradition. Une tendance qui touche toutes les générations : la ré-appropriation par la jeunesse japonaise des traditions (cérémonies du thé, philosophie des samouraïs), s'inscrit dans cette quête de repères.
L'auto-illusion :
Pour éviter une réalité trop dure à assumer, certains tentent d'oublier leurs angoisses par une consommation excessive ou compulsive. Ils se dissimulent derrière le paravent de la consommation. C'est la troisième façon d'affronter l'ère des peurs. On débranche, on déconnecte, en espérant que tout cela passera finalement.
Dans ce contexte, le luxe devient un exutoire. Statutaires, synonymes d'abondance et d'aisance, les marques de luxe plongent en effet le consommateur dans un univers onirique qui apaise ses frustrations et ses craintes. C'est le grand retour du luxe qui s'annonce alors et qui ne s'est pas démenti depuis.
Parallèlement à cette consommation boulimique et au retour du luxe, la déferlante « kidding » s'impose aussi comme une des manifestations fortes de la tendance. Démarche régressive et ego centrée, le kidding se traduit par le désir de se dégager de toute responsabilité en adoptant une posture infantile. On rêve de redevenir un enfant afin d'échapper à l'âge de la responsabilité. Les codes publicitaires s'emparent de cette tendance et font de l'enfant qui gît en nous un idéal de vie et de plaisir.
Depuis 2005 : l'avènement de l'ego-casting
Alors que l'éclatement de la bulle internet en 2001 paraissait sonner le glas de l'ère technologique, l'émergence de l'ego-casting ravive le mouvement en 2005. De nombreux signes attestent cette mutation qui s'apparente à une « révolution silencieuse ».
Porté par une avancée technologique sans précédent, l'ego-casting permet de faire venir le monde à soi à tout moment et en tout lieu, selon ses envies, ses exigences personnelles. Services à la carte, ou 24h/24, livraison à domicile, WIFI …ont le vent en poupe.
La tendance se confirme d'ailleurs en 2006 par la généralisation des blogs, le développement rapides des nouvelles start-up, l'expansion du Web 2 :0 … L'individu reprend le pouvoir sur l'ère de l'image et du son. Contrairement à la seconde moitié des années 1990, il n'est plus question d'euphorie (les peurs sont toujours parmi nous) mais le mouvement est lancé. La crise de l'industrie musicale, la montée de nouveaux modes de participation via les technologies annoncent que nous passons progressivement dans une nouvelle période dans laquelle les technologies redeviennent au coeur du changement social. De nouvelles façons de consommer émergent, de nouvelles aspirations politiques. Bienvenue dans la société de la transparence…
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Contacts:
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Directeur du département Tendances & Prospective, Ipsos Insight
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