Vers la société de la notation généralisée ?

Au début de l’année 2008, en annonçant que les membres du gouvernement seraient notés par un cabinet de conseil privé, François Fillon avait déclenché un tollé général. Peu après, le site Note2be.com, qui se proposait de noter les professeurs, a essuyé une marée de critiques et a dû renoncer à sa formule initiale, nominative. Pourtant, il suffit de parcourir Internet pour le constater : les systèmes de notation se multiplient. On parle de noter les médecins (c’est déjà le cas aux Etats-Unis avec RateMD.com), les entreprises... Finira-t-on par tout noter ? Des hommes politiques aux instituteurs ? Des patrons aux syndicalistes ? En terminant, c’est bien naturel, par nous-mêmes ? L’enquête réalisée en ligne par Ipsos Marketing pour Marketing Magazine en juin 2008, auprès d’un échantillon représentatif de 500 personnes, dresse un premier bilan de la question.

La notation séduit

Et si, malgré les controverses, les Français, étaient favorables à la notation ? En tout cas, force est de constater que la pratique ne choque pas. Bien au contraire. Ainsi, 77% des personnes interrogées trouvent normal de noter les membres du gouvernement. Un chiffre qui en dit long sur le désir des citoyens de mieux contrôler leurs représentants. Mais les hommes politiques ne sont pas les seuls concernés. Les chefs d’entreprise avec 66% de personnes pensant qu’ils doivent être notés et les syndicats, avec 63%, suivent de près. D’une manière générale, on observe qu’une majorité des personnes interrogées est favorable à la notation. Les réfractaires restent une minorité. Bien sûr, pour d’autres corps de métiers, plus spécialisés, l’opinion est moins franche. C’est le cas des fonctionnaires (57%), des policiers (56%), des avocats (56%) et des commerçants (53%). L’opinion est encore plus réservée pour les médecins (51%) ainsi que pour les professeurs et les instituteurs (48%).

Mais difficile de nier l’évidence. Dans un contexte de méfiance et d’incertitude quant à l’efficacité des institutions, la culture du résultat semble séduire une proportion non négligeable des Français. Au-delà des autorités, les citoyens eux-mêmes sont concernés. Ainsi, 70% des personnes interrogées pensent que noter des personnes dans leur milieu professionnel peut avoir une influence positive sur leur travail. 22% en sont même tout à fait certains. Pas de différence de sexe ni de génération sur ce sujet.

Le marketing de la notation

Serait-ce la conséquence de ce que l‘on observe sur Internet ? Il est vrai que, sur la toile, les internautes sont incités à noter à tout moment : les produits, les services, les articles… et les avis eux-mêmes n’échappent pas à cette fièvre évaluatrice ! 43% des personnes interrogées ont déjà attribué des notes à des produits ou des prestations de service sur un site Internet. Et 20% déclarent le faire de temps en temps. Ces pratiques sont déjà largement répandues et devraient se développer dans les années à venir. Autre élément important : les notes ont une réelle influence sur leurs comportements. 33% des sondés déclarent avoir été déjà influencés dans leurs choix, notamment pour l'achat d'un produit ou le recours à un service. C’est un nouveau marketing qui se met en place, démultiplié par les possibilités qu’offre la toile. Il faut déjà imaginer l’avenir, lorsque les témoignages vidéo seront monnaie courante. Ces notes qui sont aujourd’hui accompagnées de commentaires ou témoignages écrits, « s’humaniseront » avec la prise de parole des particuliers. La panoplie du parfait évaluateur sera ainsi complète…


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