Communiquer en temps de guerre

Bush peut-il compter sur sa réélection ? Il doit encore convaincre les indécis qui restent sceptiques face à sa politique économique, et leur prouver qu’il sait ce qu’il fait : une enquête Ipsos Public Affairs/Cook Political Report réalisée cet été aux Etats-Unis, commentée par Thomas Riehle, directeur d'Ipsos Public Affairs (washington D.C.).

Auteur(s)
  • Jean-François Doridot Directeur Général Public Affairs
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Même César ressentit le besoin de raconter sa version de la guerre : « Omnia Gallia in tres partes est *» est la phrase par laquelle César commença son exercice en relations publiques sur la guerre et l’empire.
Pour le président des Etats-Unis, George W. Bush, c’est l’opinion qui est divisée en trois parties, avec, au centre le groupe clé des indécis :

  • Selon Ipsos Public Affairs/Cook Political Report, 45 % des électeurs américains pensent que la guerre en Irak était nécessaire, et que Bush n’a pas exagéré la question des armes de destruction massive (ADM). Pour ce groupe-là, tout ce que fait Bush est parfait : 75 % d’entre eux approuvent également la façon dont il gère l’économie et les questions de politique intérieure.
  • 36 % pensent qu’il ne fallait pas faire la guerre en Irak (que Bush ait – ou non – exagéré la question des ADM). Pour eux, Bush n’est pas compétent. Plus de 80 % d’entre eux désapprouvent également la façon dont Bush gère l’économie et d’autres dossiers de politique intérieure.
  • Au centre, se trouvent 13 % d’individus qui estiment qu’il fallait faire la guerre, ET que Bush a exagéré la question des ADM. Ils pensent tous qu’il fallait destituer Saddam Hussein, mais ils n’ont pas cru en la raison invoquée par Bush pour justifier l’intervention : rendre le monde plus sûr en supprimant l’arsenal des armes irakiennes.

Si ce groupe d’indécis devait s’opposer majoritairement à la réélection de Bush (malgré son soutien à la politique en Irak),

Bush pourrait perdre la course pour la réélection l’an prochain. Pour eux, Bush n’avait nul besoin d’exagérer la menace des ADM. Ils étaient totalement en faveur de l’intervention irakienne. Mais, en laissant la question relative aux ADM dominer le débat public pendant la guerre, Bush a pris le risque de perdre sa crédibilité auprès de ce groupe d’indécis, qui ne croit pas que les ADM en Irak présentaient une quelconque menace.

Ce groupe d’individus est d’ailleurs sceptique sur de nombreux autres sujets abordés par Bush, dès lors que celui-ci s’éloigne de la question de la destitution de Saddam Hussein. Les deux tiers d’entre eux désapprouvent la politique de Bush en matière d’économie et de politique intérieure. Ce groupe est à dominance blanche, masculine, sudiste, issue de la classe moyenne, dépourvue de diplôme universitaire, et occupant des emplois d’ouvriers ou de vendeurs.Pour ces indécis, l’économie est en grande difficulté. Bush doit s’expliquer sur de nombreux sujets ; il ne peut pas prendre le risque de perdre sa crédibilité en essayant de les convaincre qu’il devait envahir l’Irak à cause des ADM.

Actuellement, pour ce groupe décisif d’indécis, l’élection de 2004 peut basculer dans un sens ou dans autre : un tiers déclare vouloir réélire Bush, un tiers déclare vouloir voter pour quelqu’un d’autre, et un tiers envisage de voter pour un autre candidat.

Bush peut-il compter sur sa réélection ? Probablement, mais il doit encore convaincre le groupe des indécis qui restent sceptiques face à sa politique économique. Il doit leur prouver qu’il sait ce qu’il fait et qu’il leur dit la vérité sur les résultats attendus de son plan de réductions des impôts. S’il s’entête à vouloir les convaincre que les ADM en Irak présentaient un risque tel qu’il fallait destituer Saddam Hussein, il perdra sa crédibilité sur les perspectives de son programme économique.

Ensemble des électeurs inscrits aux Etats-Unis
Vont sûrement voter pour réélire Bush
40%
Envisagent de voter pour quelqu’un d’autre
3 %
Vont sûrement voter pour quelqu’un d’autre
35 %
Les pro-Bush sur la question de la guerre (45 % des électeurs) Bush n’a pas exagéré à propos des ADM, Et la guerre en Irak était nécessaire
Vont sûrement voter pour réélire Bush
72 %
Envisagent de voter pour quelqu’un d’autre
20 %
Vont sûrement voter pour quelqu’un d’autre
6 %
Les indécis (13% des électeurs) Bush a exagéré les ADM, Mais la guerre en Irak était nécessaire
Vont sûrement voter pour réélire Bush
33 %
Envisagent de voter pour quelqu’un d’autre
33 %
Vont sûrement voter pour quelqu’un d’autre
32 %
Les anti-Bush sur la question de la guerre (36 % des électeurs) Que Bush ait ou non exagéré à propos des ADM, La guerre en Irak n’était pas nécessaire
Vont sûrement voter pour réélire Bush
6 %
Envisagent de voter pour quelqu’un d’autre
23 %
Vont sûrement voter pour quelqu’un d’autre
70 %

Source : Sondage Ipsos Public Affairs/Cook Political Report sur 1520 électeurs inscrits aux Etats-Unis, réalisée les 8–10 juillet 2003 et les 22–24 Juillet 2003.

* L’ensemble de la Gaule est divisé en trois parties.

Ces analyses ont été publiées dans la dernière édition d'Ipsos Ideas, la newsletter internationale du groupe Ipsos

Auteur(s)
  • Jean-François Doridot Directeur Général Public Affairs

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