Difficile de concilier vie professionnelle et vie familiale

Même s'ils ont parfois du mal à le reconnaître, l'enquête Ipsos-Enfant Magazine montre que pour beaucoup de jeunes parents, la vie professionnelle empêche de vivre pleinement la vie familiale. Inversement, la vie familiale est souvent perçue comme un frein à l'épanouissement professionnel, surtout pour les femmes.

Dans un peu plus d’un mois, les collectifs autour de l’enfance mis en place en octobre dernier par Christian Jacob, le ministre délégué à la Famille, remettront leurs propositions au gouvernement. Composés d’élus, de représentants des associations familiales, des syndicats et du patronat, ils travaillent aujourd’hui dans le cadre de l’organisation de la conférence de la famille 2003 qui se déroulera au printemps prochain. A l’heure où le problème de la conciliation vie familiale – vie professionnelle est sur le point d’être débattu lors de la conférence et de donner naissance à un projet de loi à l’automne 2003, Enfant Magazine a souhaité donner la parole aux principaux intéressés, les parents de jeunes enfants, en confiant à Ipsos la réalisation d’une enquête visant à recueillir leurs opinions sur le sujet et à dresser un véritable panorama de leur état d’esprit actuel.

Au vu des résultats de l’enquête, il apparaît assez clairement que les parents de jeunes enfants considèrent aujourd’hui que leurs vies professionnelles et familiales ont des interactions qu’ils ont du mal à gérer. Leur vie professionnelle les empêche de vivre pleinement leur vie familiale et leur vie familiale est souvent perçue comme un frein à leur épanouissement professionnel. Dès lors, ils expriment de fortes attentes dans ce domaine et cela auprès de l’ensemble des acteurs concernés : les pouvoirs publics et les employeurs. Signe de ces changements d’attitudes et de mentalité, l’image même de celui ou celle qui décide de s’arrêter un temps pour élever son ou ses enfants évolue positivement vers des attributs de modernité et même de séduction.

Vie professionnelle et vie familiale, deux activités que les jeunes parents ont aujourd’hui du mal à concilier

L’ensemble des enquêtes réalisées dans le domaine de la parentalité montrent qu’au premier abord les parents ont toujours du mal à "avouer" qu’ils éprouvent des difficultés dans l’éducation de leurs enfants ou à harmoniser les exigences liées à la vie professionnelle et à la vie familiale. C’est pour beaucoup le constat d’une certaine forme d’échec qui peut se révéler dérangeant, voire écrasant. De fait, aujourd’hui, globalement, 71% des parents actifs considèrent qu’ils arrivent à concilier vie professionnelle et vie familiale de façon satisfaisante pour leur(s) enfant(s). Reste que 28% avouent toutefois spontanément éprouver des difficultés à le faire.

Mis en situation, la majorité des parents qui travaillent, change d’attitude et se montre beaucoup plus touchée par le problème. Ils avouent ainsi ne pas consacrer suffisamment de temps à la sphère familiale et plus spécifiquement à leur enfant (62%), à leur conjoint (63%) ou à eux-mêmes (65%) tandis que beaucoup considèrent dans le même temps qu’ils en consacrent suffisamment (52%) ou trop (39%) à leur travail. Plus marquant encore, il semble que ce sentiment de ne pas disposer de suffisamment de moments pour les activités extra-professionnelles et familiales se soit désormais installé au sein de l’ensemble de la population parentale. Il est inter-générationnel, il est aussi bien ressenti par les plus jeunes que par les plus âgés. Ainsi, qu’ils débutent dans la vie professionnelle ou qu’ils aient déjà acquis une certaine expérience dans le monde du travail, la majorité des parents de jeunes enfants ne semble pas pour autant aujourd’hui capable de trouver des solutions adéquates leur permettant de gérer efficacement les deux sphères. Il semble même que le problème aille plutôt en s’aggravant avec l’âge (59% des moins de 35 ans avouent ne pas consacrer assez de temps à leur enfant contre 66% pour les plus de 35 ans).

Surtout, on note que le sentiment de ne pas accorder suffisamment de moments à ses enfants, à son conjoint et à soi-même n’est plus l’apanage des seuls hommes. Il s’est "globalisé" et est désormais vécu de façon quasiment identique par les femmes dont la carrière professionnelle s’apparente de plus en plus à celle des hommes et qui, par conséquent envisagent de moins en moins de l’interrompre pour s’occuper et élever leurs enfants. Ainsi, aujourd’hui, plus de la majorité d’entre elles disent ne pas passer assez de temps avec leur(s) enfant(s) (66% pour les hommes).

Des interactions entre vie professionnelle et vie familiale qui risquent à terme de rendre la vie des parents de jeunes enfants de plus en plus difficile

Au vu des résultats de l’enquête réalisée par Ipsos, on note que les parents actifs de jeunes enfants ont aujourd’hui le sentiment que chacune de ces sphères de leur vie (professionnelle et familiale) a des interactions sur l’autre et que ces dernières ne sont pas toujours positives, loin s’en faut.

Ainsi, la grande majorité des parents qui travaillent, considèrent qu’aujourd’hui le fait d’avoir un ou des enfants est pour une femme un frein important dans sa carrière professionnelle (74%). Parmi eux, 32% estiment même que c’est un handicap très important (et 42% plutôt important). Ce sentiment est encore plus le fait des hommes (79%) que des femmes (70%). Pour autant, une proportion non négligeable de parents qui travaillent considère que c’est aussi désormais un frein important pour les hommes. Parmi ces parents, les pères ressentent plus particulièrement cette interaction sur leur évolution professionnelle puisque 28% d’entre eux considèrent la vie familiale comme un frein à la carrière. De plus en plus de femmes exerçant une activité professionnelle, cela exige des hommes qu’ils assument une plus grande partie de la charge que représente l’ensemble des responsabilités familiales. Par ailleurs, de plus en plus d’hommes désirent assumer un rôle plus grand dans la vie de la famille et dans l’éducation de leurs enfants et se trouvent à leur tour confrontés au problème de la conciliation du travail et des responsabilités familiales. 

En conséquence, aujourd’hui, près d’un parent sur deux avoue que sa vie professionnelle a une incidence importante sur le moment choisi pour concevoir leur(s) enfant(s) (51%) et sur le nombre d’enfant(s) qu’il compte avoir (47%). Là encore, au-delà de l’importance du chiffre, on est frappé par l’homogénéité des réponses : 52% des moins de 35 ans disent que cela a eu une interaction sur le moment choisi pour la conception contre 50% pour les plus de 35 ans. Logiquement, cette dernière incidence est plus forte auprès des femmes (52%) mais elle est toutefois importante auprès d’une bonne part des pères interrogés (48%).

Des attentes : la prise en compte de la vie familiale au sein de la sphère professionnelle

Le fait d’être confronté à des interactions entre vie professionnelle et vie familiale et surtout de ne pas toujours réussir à les concilier, pousse les parents actifs de jeunes enfants à examiner de plus en plus leurs futures opportunités professionnelles sous l’angle de cette nécessaire conciliation et surtout de faire intervenir dans leurs critères de choix les possibilités d’aménagement proposées par l’employeur. Ainsi, si demain il décidait de changer de travail, près d’un parent sur deux, estime que le fait de lui permettre d’adapter ses horaires en cas d’obligations familiales serait un critère décisif dans le choix de son futur employeur (45% considèrent aussi qu’il serait important mais pas décisif) tandis que seulement 7% pensent qu’il serait secondaire. De même, serait aussi perçu comme étant un critère décisif par nombre de parents, le fait de leur laisser prendre la plupart de leurs congés pendant les vacances scolaires (41%), un travail à temps partiel s’ils le désirent (31%) ou enfin de proposer une crèche ou une halte-garderie intégrée sur leur lieu de travail (30%).

De fait, les parents se montrent aujourd’hui demandeurs de toute mesure leur permettant de concilier au mieux leur vie professionnelle et leur vie familiale. Leur perception du congé parental en est une assez bonne illustration. Ainsi, 67% des parents interrogés souhaiteraient que sa durée puisse être étendue au delà des trois ans de l’enfant. Parmi eux, 42% se diraient même tout à fait d’accord avec cette mesure. La plupart restent "mesurés" dans leur désir de voir le congé parental prolongé puisque parmi toutes les modalités de choix qui leur étaient proposées, la très grande majorité des parents a choisi la plus basse, c’est à dire un allongement du congé jusqu’aux 6 ans de l’enfant (76%). La plupart des parents estiment aussi certainement, qu’à partir de 11 ans ou 15 ans, l’enfant acquiert une certaine "autonomie" qui ne nécessite plus de recourir au congé parental et qui leur permet donc de reprendre leur activité professionnelle : seulement 14% et 8% d’entre eux auraient respectivement opté pour que la prolongation aille jusqu’à 11 et 15 ans.

Idéalement, le congé parental est un système qui tente la grande majorité des parents. De fait s’il était rémunéré à hauteur de 50% de leur salaire et s’ils avaient l’assurance de retrouver la même progression de carrière après l’avoir pris, 78% des parents travaillant aujourd’hui déclarent qu’ils auraient demandé à en bénéficier. La moitié d’entre eux en est même certain (47%). Là encore, si logiquement les femmes se montreraient plus sensibles que les hommes à une telle mesure (61% l’auraient certainement pris), une proportion non négligeable d’hommes se diraient aussi "certainement" intéressée (33%).

Faut-il y voir une illustration du malaise qui est aujourd’hui celui des jeunes parents face aux difficultés qu’ils rencontrent dans la gestion simultanée et même télescopée de leurs vies professionnelles et familiales ? Peut-on y voir une évolution des opinions et des attitudes ? La réponse n’est pas forcément évidente. Toujours est-il que celui ou celle qui s’arrêterait pendant un an de travailler pour élever son enfant est aujourd’hui perçu par la très grande majorité des parents de façon éminemment positive. Ainsi, une femme qui déciderait de le faire serait perçue comme séduisante (88% et même très séduisante pour 52%), moderne (88% et même très moderne pour 51%) et sexy (69% et même très sexy pour 36%). De même, un homme qui s’arrêterait pour les mêmes raisons serait considéré par la majorité des parents interrogés comme moderne (94% dont 64% de très moderne), séduisant (86% dont 52% de très séduisant) et sexy 56% dont 27% de très sexy). Le père qui demain déciderait de mettre entre parenthèses pendant un temps sa carrière professionnelle pour élever son enfant, "gagnerait" beaucoup auprès de la gente féminine puisque la grande majorité des femmes estimerait qu’il serait séduisant (93%), moderne (98%) et sexy (69%). Voilà de quoi en faire rêver plus d’un sur de "nouveaux" attraits de la vie familiale.

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