Internet en France : un média pour s’informer sur la politique, mais pas encore pour militer

L'enquête Ipsos/Logica Business Consulting réalisée pour MSN montre que les Français considèrent qu'Internet est un bon moyen d'information sur l'actualité politique. En revanche, ils ne comptent pas beaucoup utiliser la toile pour militer au cours de la campagne présidentielle 2012.

PRÈS DES DEUX-TIERS DES FRANÇAIS INTÉRESSÉS PAR LA POLITIQUE ET LA CAMPAGNE PRÉSIDENTIELLE DE 2012

63% des Français se disent intéressés par l’actualité politique en général, et 61% par la campagne de l’élection présidentielle de 2012.

On observe des différences d’intérêt selon les catégories d’individus : les plus intéressés sont les hommes (71% se disent intéressés par la politique, contre 56% des femmes), les plus âgés (73% des plus de 60 ans contre 43% seulement des 18-24 ans, l’intérêt augmentant proportionnellement à l’âge), les catégories aisées comme les cadres (69% contre 49% des catégories populaires comme les ouvriers). On notera également que les individus ayant l’intention de voter pour Marine Le Pen sont moins intéressés par la politique (59%) que ceux déclarant vouloir voter pour François Hollande (74%) ou Nicolas Sarkozy (75%), mais aussi intéressés que les autres par la campagne elle-même (69% contre respectivement 72% et 74%).

 

LES SOURCES D’INFORMATION EN MATIÈRE DE POLITIQUE : LE POIDS DES MEDIA TRADITIONNELS, L’APPÉTENCE DES FRANÇAIS POUR LES ÉMISSIONS HUMORISTIQUES (57%)

La hiérarchie traditionnelle entre les media se retrouve en matière d’information politique : 71% des Français déclarent utiliser la télévision au moins une fois par jour pour s’informer en matière de politique, contre 56% pour la radio, 33% pour Internet et 23% pour la presse papier (à l’échelle de la semaine, Internet est au coude-à-coude avec la presse papier). La suprématie de la télévision s’observe dans toutes les catégories d’individus. Chez les moins de 35 ans en revanche, Internet est presque autant utilisé (40%) que la radio (44%).

Les Français sont également attachés aux formats journalistiques traditionnels pour aborder la politique : 62% apprécient le Journal Télévisé, 58% les émissions de débat (du type C dans l’air), 57% les émissions humoristiques (du type Guignols de l’info ou Nicolas Canteloup), 56% les articles papier ou sur Internet et 54% les interviews de personnalités politiques. Une majorité de Français (52%) apprécie également les conversations avec leurs proches.

En revanche, les nouveaux formats plus interactifs liés au web attirent encore peu : 16% des Français (19% des internautes) apprécient les commentaires des internautes sur les articles ou les forums, 13% (16% des internautes) apprécient les discussions sur les réseaux sociaux et 10% (12%) les discussions sur messageries instantanées.

Même sur Internet, les Français montrent leur moindre appétence, en matière de politique, pour les réseaux sociaux ou les forums. Ils préfèrent s’informer sur Internet via des cadres de référence connus et reconnus, qui les rassurent sur la qualité de l’information. Ainsi, ils consultent en priorité les portails d’information du type Yahoo, Google ou MSN (51% des internautes) et les sites des médias traditionnels off line du type lemonde.fr, tf1.fr (46%). Les réseaux sociaux ne sont préférés que par 17% des internautes, les sites pure players du type Rue89 ou Mediapart le sont par 11%, les forums et blogs par 6% et les sites collaboratifs du type Agoravox par 4% seulement. On observe une hiérarchie des préférences identique chez les plus jeunes.

 

LES FRANÇAIS SOULIGNENT LES LIMITES MAIS AUSSI LE POTENTIEL D’INTERNET EN MATIÈRE D’INFORMATION ET DE PARTICIPATION CITOYENNE

Loin d’être naïfs vis-à-vis de la toile ou au contraire de rejeter en bloc la « poubelle de la démocratie », les Français portent un regard assez réaliste et mesuré sur Internet, sans condamnation ni fétichisme. C’est ainsi pour eux une source d’information qui n’a un impact ni positif ni négatif sur la vie politique (41%), 38% estimant qu’il a un impact positif et 14% seulement un impact négatif.

Certes, ils pointent les limites d’Internet et la nécessité de bien maîtriser l’outil : 87% disent ainsi « qu’Internet facilite les rumeurs », 72% « qu’il est difficile d’identifier les sources » et 71% « qu’il faut bien connaître internet pour y trouver des informations faibles et intéressantes ». Mais Internet est aussi un formidable outil d’expression citoyenne et politique : pour 71%, « Internet donne la parole aux gens comme moi », pour 69% « on peut y exprimer son opinion plus librement qu’ailleurs » et pour 60% « Internet est un bon moyen pour échanger ses idées et discuter de politique ».

 

INTERNET ET LA POLITIQUE, UN OUTIL D’INFORMATION MAIS PAS ENCORE D’ACTION MILITANTE : SEULS 14% COMPTENT DISCUTER DE LA CAMPAGNE PRÉSIDENTIELLE SUR LES FORUMS OU EN FAISANT DES COMMENTAIRES AUX ARTICLES ET 8% COMPTENT DONNER LEUR ADRESSE MAIL À UN PARTI POLITIQUE

Si Internet est donc reconnu et utilisé comme une source d’information politique, les Français ne s’en servent pas (encore) comme outil d’échange, et encore moins comme un outil d’action ou de militantisme fort.

Dans le cadre de la campagne Présidentielle, une majorité des internautes (51%) comptent s’informer sur les sites/blogs des candidats. En revanche, seuls 14% comptent discuter politique sur les forums/articles durant la campagne (et 9% sur Facebook ou Twitter), seuls 11% pensent publier des liens vers du contenu politique sur un réseau social, seuls 8% comptent donner leur e-mail à un parti politique pour participer activement à la campagne et 6% comptent faire la promotion d’un candidat sur le web.

Les jeunes internautes sont certes plus nombreux à vouloir utiliser les réseaux sociaux pendant la campagne, mais dans de faibles proportions : 22% par exemple sont prêts à publier un lien sur Facebook ou Twitter vers du contenu politique.

Il est très probable que l’utilisation d’Internet en tant qu’outil politique grandisse en même temps que les jeunes générations (qui sont moins politisées que les plus âgés). Pour autant, il semble que pour 2012, comme pour 2007, l’activité militante en France sur Internet aura du mal à atteindre les niveaux des Etats-Unis de 2008. Outre la maîtrise d’Internet par la population, d’autres facteurs sont en effet en parties liées à la réussite d’une e-campaign : par exemple l’engouement pour un candidat (très fort pour Obama en 2008, en particulier chez les jeunes) mais aussi certains facteurs culturels (le militantisme en France se faisant de manière moins affichée qu’aux Etats-Unis par exemple, sur le web ou ailleurs).

Auteur(s)

  • Mathieu Doiret - Ipsos Knowledge Centre
    Mathieu Doiret
    Directeur de clientèle, Ipsos Knowledge Centre

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