La Tentation de l’Ile : le protectionnisme est-il la solution ?

Protectionnisme ou libéralisme : quelle réponse apporter à la crise qui secoue la planète ? Ipsos a sondé, via son dispositif international « Global @dvisor »*, les citoyens de 22 pays afin de proposer une photographie de l’opinion mondiale sur l’état du système économique et politique. 

La dislocation des grandes régions qui constituent le monde est-elle à l'ordre du jour ?  

Europe, Amérique du Nord, Amérique du Sud, Asie-Pacifique, Afrique devaient être des zones de libre-échange, la circulation des biens et des personnes devait être possible partout, les frontières étaient appelées à disparaître.
Cette utopie a animé des générations, avec d’autant plus de force qu’elle devait être la condition de la paix et du progrès. La mondialisation n’y était pas seulement économique ou financière, mais culturelle et humaniste.

Qu'en reste-t-il aujourd'hui ? 

À en juger par la nouvelle enquête de Global @dvisor* la réponse tient en un mot : rien.

Pourquoi ?

Parce que « le pays est en déclin » pour 67% des Français, 60% des Américains ou 69% des Espagnols.
Parce que croire que « ma génération a une vie moins bonne que celle de mes parents » est partagé par 61% des Français, qui pensent aussi à 67% que « les jeunes d’aujourd’hui auront une vie moins bonne que leurs parents », ce qui met la France en tête du tiercé des pays le plus pessimistes du monde, avec la Belgique (66%) ou l’Espagne (65%).
Parce que les opinions publiques se sentent abandonnées par les responsables politiques : « les partis et hommes politiques traditionnels ne se soucient pas des gens comme moi » signe cette perception avec 76% des Français qui s’en convainquent, largement devant les Allemands (53%), les Suédois (42%) ou les Japonais (39%). De même, « les experts dans mon pays ne comprennent pas la vie des gens comme moi » est une vérité pour 73% des Français, avec 74% des Espagnols ou 72% des Mexicains.

Est-ce que l'on a encore envie d'y croire ?

En France, la tendance à penser que l’avenir sera meilleur s’est cassée avec la permanence de la crise : 90% imaginaient que 2014 seraient meilleure que 2013, 89% que 2013 seraient meilleure que 2012. Fin 2016, ils ne sont plus que 52% à attendre quelque chose de meilleur en 2017[1].

Alors, que faire ?

Se fermer, se cantonner à son territoire et se protéger, voilà la réaction instinctive, réflexe de la plupart des pays du monde, au premier rang desquels les Etats-Unis et leur nouveau Président.
« Faire davantage pour se protéger du monde d’aujourd’hui », voilà ce qu’il faut pour 47% des Américains, 39% des Canadiens et des Israéliens, 37% des Australiens, 36% des Français ou des Brésiliens.
Considérer que « ouvrir l’économie du pays aux entreprises étrangères et au commerce international est une menace pour le pays », voilà la conviction de 33% des Français, à rapprocher des 38% d’Italiens, 29% d’Américains, 34% d’Argentins.
Pour cela, « nous avons besoin d'un dirigeant qui soit prêt à changer les règles du jeu » est une idée plébiscitée par 80% des Français, alors que la moyenne mondiale est de 49%.
Dans un contexte de campagne électorale, il est difficile de ne pas considérer ces résultats comme la toile de fond sur laquelle chacun doit se positionner.

Dans ce monde dont les mutations font peur, Marine Le Pen répond le plus à la demande de protectionnisme absolu et d’Etat-Providence ; à l’opposé, Emmanuel Macron incarne une tradition libérale pour qui la mondialisation est synonyme de dérégulations et d’opportunités. Entre rejet de la mondialisation et mondialisation pour tous, François Fillon veut équilibrer libéralisme et autorité de l’Etat et Jean-Luc Mélenchon, avec « L'Europe, on la change ou on la quitte » n’est pas loin d’un protectionnisme dur, mais de gauche.

Le vainqueur de la Primaire « ouverte aux acteurs de la Belle Alliance populaire » aura à définir son propre territoire : une île ou un continent.
* Étude réalisée en novembre 2016 via l’Ipsos Online Panel system sur 16 096 personnes âgées de 16 à 64 ans en Afrique du Sud, Allemagne, Argentine, Australie, Belgique, Brésil, Canada, Corée du Sud, Espagne, France, Hongrie, Inde, Israël, Italie, Japon, Mexique, Pérou, Pologne, Suède, Turquie, UK et USA.
[1] Étude réalisée du 25 novembre au 9 décembre via l’Ipsos Online Panel system sur 18 062 personnes âgées de 16 à 64 ans en en Afrique du Sud, Allemagne, Argentine, Australie, Belgique, Brésil, Canada, Corée du Sud, Espagne, France, Hongrie, Inde, Israël, Italie, Japon, Mexique, Pérou, Pologne, Suède, Turquie, UK et USA.

Auteur(s)

  • Yves Bardon
    Yves Bardon
    Directeur du programme Flair, Ipsos Knowledge Centre
  • Stéphane Zumsteeg - Directeur Opinion et Recherche Sociale, Public Affairs
    Stéphane Zumsteeg
    Directeur du Département Opinion et Recherche Sociale, Public Affairs
  • Mathieu Gallard - Directeur d'études, Public Affairs
    Mathieu Gallard
    Directeur d'Études, Public Affairs

Articles liés

  • Ipsos Predictions

    Rapport Predictions : les pronostics des Français pour 2026

    En 2025, 85% des Français pensent que l'année a été mauvaise pour leur pays, illustrant un pessimisme élevé, à égalité de la Corée du Sud. Sur le plan personnel, 55% des Français considèrent que 2025 n’a pas été une mauvaise année pour eux ou pour leur famille, une amélioration par rapport aux années précédentes. Pour 2026, seuls 41% des Français se déclarent optimistes, bien en dessous de la moyenne mondiale. Une large majorité de Français (73%) souhaitent renforcer leurs liens avec leur famille et leurs amis, ainsi que faire plus d’exercice physique pour 57% d’entre-deux, tandis que des préoccupations sécuritaires et climatiques prédominent. En ce qui concerne le football, 49% des Français prévoient de suivre la Coupe du Monde 2026 en Amérique du Nord, un intérêt timide comparé à d'autres nations comme l’Argentine avec 89% des Argentins. Pour plus de 6 Français sur 10 (65%), il est improbable que la guerre en Ukraine prenne fin en 2026.
  • Feu d'artifice
    Société Enquête

    Palmarès des personnalités de 2025

    À l'occasion de la fin d'année 2025, les Français ont été interrogés sur les personnalités qui les ont le plus marqués, positivement ou négativement, dans cinq grandes catégories : la diplomatie internationale, le sport, la culture, la politique française et la société civile.
    Pour chaque catégorie, les répondants devaient désigner deux personnalités parmi une liste proposée. Cinq figures se distinguent nettement en arrivant en tête de leur catégorie respective : Donald Trump pour la diplomatie internationale, Léon Marchand pour le sport, Aya Nakamura pour la culture, Jordan Bardella pour la politique française et Michel-Édouard Leclerc pour la société civile
  • Société | France
    Société Enquête

    Économie et citoyens : repenser le lien

    Ipsos bva dévoile les résultats de l’enquête « Économie et citoyens : repenser le lien », réalisée pour l’association « Lire la société », qui révèle un fossé entre les Français, l’économie et la politique. Si 60 % s’intéressent aux questions économiques, notamment à l’inflation et aux prix (90 %), seuls 54 % se disent à l’aise avec les grands concepts. Cette faible littératie s’accompagne d’un blocage politique : 50 % jugent crucial de respecter les promesses électorales, même au détriment du vote du budget, une position marquée chez les sympathisants de LFI (75 %) et du RN (63 %). Très sensibles au pouvoir d’achat, les Français restent divisés sur la culture du compromis, tandis que 94 % estiment prioritaire de renforcer l’enseignement des enjeux économiques à l’école.