Les salariés aimeraient être aussi optimistes que leurs dirigeants

La huitième vague du baromètre de l’Observatoire du Monde du Travail met en évidence une poursuite de l’amélioration du moral des salariés liée aux évolutions de la conjoncture économique. Mais cette enquête montre aussi que les salariés sont sensiblement moins optimistes que les dirigeants d’entreprises.

Auteur(s)
  • Etienne Mercier Directeur Opinion et Santé - Public Affairs
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Depuis plusieurs semaines, différentes enquêtes montrent une opinion publique plus sensible aux bénéfices possibles d’une conjoncture nationale favorable qu’aux conséquences néfastes d’une conjoncture internationale instable. Interrogés sur leur situation professionnelle, les salariés semblent, pour leur part, plus à l’abri de brutales évolutions de climat, comme si les frontières de leur entreprise amortissaient ou atténuaient les soubresauts de la conjoncture. Tel est l’un des principaux enseignements de la huitième vague du baromètre de l’Observatoire du Monde du Travail et également de l’enquête thématique consacrée aux relations que les salariés entretiennent avec leur entreprise.

La note d’évaluation globale de leur vie professionnelle par les salariés atteint son niveau le plus élevé depuis la création de ce programme d’enquête en octobre 1996. Sa progression a en fait été constante depuis deux ans. La dernière évolution de cette appréciation peut être lue comme un négatif photographique : elle résulte avant tout d’un reflux des opinions négatives et plus particulièrement du sentiment d’inquiétude. Les salariés, qu’ils travaillent dans le secteur privé ou public, anticipent aujourd’hui plutôt de meilleures perspectives d’avenir pour leur pouvoir d’achat, et manifestent légèrement moins de craintes en ce qui concerne leur emploi (77% disent ne pas craindre pour leur emploi dans les mois qui viennent), notamment dans le secteur privé.

Cette amélioration relative de l’état d’esprit des salariés doit également se lire à travers le contraste qu’elle présente avec le regain d’optimisme plus net attribué aux dirigeants. Lorsqu’on leur demande de qualifier l’état d’esprit de la direction de leur entreprise, 65% des salariés interrogés pensent qu’il est plutôt optimiste, un chiffre aujourd’hui à son niveau le plus élevé et en amélioration depuis deux ans (+ 16 points par rapport à octobre 1996). Dans le détail, cet optimisme immédiat des sphères dirigeantes pourrait, selon les salariés, prendre la forme d’une propension plus nette à l’augmentation des effectifs, mais également celle d’un progrès dans la tendance à augmenter les salaires. Avec respectivement 33% d’avis optimistes sur la création d’emploi et 20% sur l’évolution des salaires, ces opinions restent toutefois minoritaires. Parallèlement, la préoccupation salariale gagne à nouveau du terrain, notamment au sein du secteur privé.

En écho à ce décalage entre un optimisme net attribué aux dirigeants et les avantages plus amortis en terme d’emploi et de salaires qui pourraient en découler, les salariés adoptent un point de vue singulièrement critique sur la question de la capacité des dirigeants à leur expliquer les changements nécessaires pour l’avenir de l’entreprise. Pour la première fois depuis la création de l’Observatoire du Monde du Travail, une majorité des interviewés pense que les dirigeants échouent dans cette mission : les plus critiques se trouvent parmi les cadres supérieurs et les cadres, mais aussi parmi les salariés du secteur public.

Les attentes des salariés vis-à-vis de leurs dirigeants sont pourtant fortes, d’autant plus fortes que l’enquête met au jour tout à la fois un grand attachement de ces salariés à leur entreprise (80%), une grande fierté à appartenir à l’entreprise pour laquelle ils travaillent (70%), mais également une opinion très positive à l’égard de leurs dirigeants : 77% déclarent avoir une bonne ou une très bonne opinion de la personne qui dirige leur établissement ou leur entreprise.

Tout semble donc indiquer qu’aujourd’hui les salariés français, attachés à leur entreprise et à leurs dirigeants, attendent de ces derniers qu’ils leur communiquent un optimisme à leurs yeux trop souvent décalé par rapport à leur propre perception de la réalité.

Auteur(s)
  • Etienne Mercier Directeur Opinion et Santé - Public Affairs

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