L’éthique de la marque

Qu’est ce qui caractérise fondamentalement l’investissement éthique ? C’est d’abord la volonté de l’investisseur de savoir où est précisément placé son argent, connaître sa destination finale, quel type de projet ou d’entreprise il finance. L’investissement éthique hisse le respect des règles sociales, le respect de l’environnement, le respect des droits fondamentaux au même niveau que les objectifs financiers classiques parmi les critères de choix d’un placement.

Qu'est ce qui caractérise fondamentalement l'investissement éthique ? C'est d'abord la volonté de l'investisseur de savoir où est précisément placé son argent, connaître sa destination finale, quel type de projet ou d'entreprise il finance. L'investissement éthique hisse le respect des règles sociales, le respect de l'environnement, le respect des droits fondamentaux au même niveau que les objectifs financiers classiques parmi les critères de choix d'un placement.

Les convictions de l'investisseur, sa vision du développement durable et de la cohésion sociale viennent percuter les préoccupations traditionnelles d'un placement qui concernent sa rentabilité, sa sécurité ou sa disponibilité. L'investissement éthique est au cœur de l'exigence du consommateur investisseur citoyen dont le souci de vivre dans un cadre économique prospère ne se distingue pas du désir d'un climat social stable et d'un environnement protégé. Naturellement l'investissement éthique évite les destinations jugées douteuses (armement, tabac, entreprises polluantes…) et s'oriente vers des initiatives solidaires ou des entreprises " socialement responsables ".

Aux U.S.A., le succès de l'investissement socialement responsable est tel qu'il draine aujourd'hui près de 12% des sommes épargnées. (source ARESE)

ISR, commerce équitable, économie solidaire….

De nombreuses initiatives relèvent du "commerce éthique": ONG, syndicats et consommateurs font pression (par des pétitions et des manifestations) sur les grandes multinationales pour les contraindre à adopter des codes de conduite, à travers lesquels elles s'engagent à respecter les critères minimaux du droit du travail dans leurs usines et dans celles de leurs fournisseurs.

Le développement des labels vise à aider des producteurs des pays en développement, les codes à améliorer les conditions de travail de secteurs industriels - textile, habillement, chaussure, jouet -, à la fois dans la vente au détail et dans la fabrication, tant au Nord qu'au Sud.
Nike, gros producteur de chaussures de sport a ainsi accepté un code de conduite, après une campagne très virulente de consommateurs nord-américains et européens, à la suite de révélations médiatiques sur l'exploitation d'ouvriers en Indonésie, en Chine et en Thaïlande.

Dans l'habillement, des sociétés comme Levi-Strauss, Liz Clairborne et Gap ont également adopté des codes éthiques pour protéger leur image de marque.

En 1998, l'Organisation internationale du travail (OIT) a dénombré 215 codes de ce type, dont plus de 90% concernaient des multinationales, la plupart basées au Nord.

En France, les campagnes du collectif " De l'éthique sur l'étiquette " ont conduit un certain nombre d'entreprises à prendre des initiatives afin de répondre aux attentes des consommateurs.

Auchan et Promodès sont les plus avancés dans ce domaine.

Fin 1997 : Auchan a adopté un code de conduite. Dans ce cadre, l'enseigne a fait réaliser une quinzaine d'audits au Bangladesh et en Chine, dont un des objectifs prioritaires, est l'expérimentation d'une méthode permettant une réelle implication du personnel des entreprises implantées dans les pays en voie de développement.

Incontestablement, qu'il s'agisse des investisseurs ou des consommateurs, l'éthique sociale ou environnementale émerge comme une des caractéristiques fondamentales de notre horizon économique.

Les investisseurs

Dans une enquête réalisée par la Sofres en novembre 2001 auprès de l'ensemble de la communauté financière européenne, 93% des professionnels interrogés jugeaient que l'investissement socialement responsable est une démarche qu'il faut encourager. La maîtrise du risque environnemental et social est considérée à 92% positive sur le long terme pour la situation économique de l'entreprise et à 86% positive pour son parcours boursier. Ces résultats méritent d'être nuancés par une appréciation majoritairement négative des conséquences économiques et boursières de l'investissement socialement responsable à court terme. C'est une contradiction qu'il sera nécessaire de lever.

Ces critères prennent de plus en plus de place dans les recommandations des analystes boursiers comme les choix d'investissements des principaux acteurs financiers. 51% de gestionnaires de portefeuille en Europe reconnaissent accorder une prime aux sociétés socialement responsable dans leurs choix d'investissement.
La place croissante prise par l'ISR dans les critères de choix et de recommandation crée des attentes nouvelles sur les marchés financiers européens. 75% des acteurs de la finance européenne interrogés déclarent attendre un engagement des pouvoirs publics pour encourager des mesures incitatives au développement de l'ISR.

Les consommateurs

Les consommateurs expriment une indignation très forte à l'égard des entreprises qui licencient alors qu'elles annoncent des résultats financiers positifs. Cette pratique est absolument incomprise. Michelin ou Danone ont pu mesurer l'émoi provoqué par l'annonce de plans sociaux au moment où elles annonçaient des résultats à la hausse. L'opinion n'accepte pas que l'emploi soit considéré comme une variable d'ajustement comme une autre.

Deux grandes études réalisées par Ipsos sur les valeurs idéologiques des français et sur les tendances de l'opinion et de la consommation en 2000 illustrent aujourd'hui la relation nouvelle qui s'est nouée entre les français et les marques qu'ils consomment
Dans la sphère économique comme dans celle du social, les Français rejettent l'absence de règles, de normes et craignent par-dessus tout, la loi du plus fort. La première demande est évidemment une demande de sûreté et de sécurité physique. Mais ce besoin de sécurité dépasse la seule question de la lutte contre la délinquance ou les incivilités : l'opinion est de plus en plus soucieuse de sécurité alimentaire bien sûr et de sécurité sociale au sens large du terme.
Il y a en fait dans l'opinion, particulièrement au sein des catégories les plus fragiles, un fort besoin de protection. La crainte de l'avenir se manifeste sous la forme d'une crainte d'une évolution non maîtrisée du progrès technique, scientifique et technologique. Ce sentiment est manifeste dans l'aspiration à davantage de sécurité environnementale.
Si les Français souhaitent que leur environnement soit protégé des risques, il y a aussi, derrière cette attente, une aspiration plus large à une meilleure qualité de vie (qualité de l'air, amélioration des transports, meilleure articulation des temps sociaux, animation de la ville…), particulièrement vivace chez les jeunes, les urbains et les classes moyennes et moyennes supérieures. Le label "safe" est plus que jamais d'actualité.
C'est une interpellation directe des entreprises et des pouvoirs publics. Vis à vis des marques cette demande de sécurité est claire et se caractérise par la méfiance vis à vis des produits dont l'origine et la traçabilité sont douteuses. On recherche la transparence dans les modes de production, la clarté dans toute la chaîne de distribution. Il ne s'agit plus d'un paramètre périphérique dans la démarche du consommateur. Cette exigence est devenue centrale.
les consommateurs français montrent une sensibilité croissante aux attitudes " morales ". L'éthique de la marque est valorisée, la relation de confiance privilégiée. L'intérêt pour l'origine des produits, les conditions économiques qui ont participé à leur production constituent des vecteurs puissants d'image et d'attraction.
Cette exigence est conforme à un phénomène que nous constatons depuis plusieurs années dans l'évolution des valeurs des français. La demande d'ordre et de régulation est forte dans le domaine social. Les Français estiment " qu'il y a des choses à respecter " et expriment un fort besoin de civisme et d'éthique. C'est une exigence qui irrigue l'ensemble de la société.
Le consommateur n'est pas un individu myope, l'œil concentré sur le produit, sa conscience en sommeil. Les Français veulent connaître les coulisses du produit. La transparence que garantit une marque consolide la confiance des consommateurs.

Cette attente très forte s'accompagne d'une perception plutôt floue des remèdes possibles.

Fin 2000, 80% des français disaient n'avoir jamais entendu parler de l'économie solidaire. Par ailleurs, la très forte majorité des personnes interrogées par Ipsos en septembre 2000, 91%, n'avait jamais entendu parler de commerce équitable avant l'enquête

Mais une fois celle ci définie , ils sont 44% à se déclarer prêts à acheter des produits qui respectent les valeurs de l'économie solidaire, 40% prêts à boycotter les produits ne respectant pas ces valeurs. Et 39% prêts à effectuer des dons en nature en faveur d'associations défendant l'économie solidaire.

Si la demande d'éthique dans la fabrication des produits augmente, l'opinion sur le poids et la place qu'occuperont demain ces principes socialement responsables dans l'économie et les échanges est partagée. 48% des français jugent que " le principe du respect de l'être humain prendre de plus en plus d'importance dans l'économie et les échanges ", dans les années à venir. 49% pensent au contraire que " la recherche du prix le plus bas restera la base de l'économie ". Ces résultats enregistrés fin 2000 ne tiennent pas compte de l'impact des évènements survenus le 11septembre 2001 dont une des conséquences principales sur l'opinion occidentale et les états concerne une demande de régulation plus forte de l'économie de marché.

Les français sont ils dés lors prêts à passer à l'acte ?

Dans une enquête publiée en février auprès de jeunes cadres et futurs jeunes cadres, 15% des jeunes interrogés disent attacher de l'importance au comportement éthique ou réputé éthique d'une entreprise qui souhaite les embaucher. Cependant cette préoccupation n'arrive qu'en 10ème position, très loin derrière les salaires, (54%), la possibilité d'avoir rapidement des responsabilités (34%) ou la sécurité de l'emploi (28%).

Une enquête du CREDOC pour le secrétariat d'état au droit des femmes montre que 4 français sur cinq se disent prêts à acheter plus volontiers des produits fabriqués dans des entreprises qui respectent l'égalité entre les hommes et les femmes.

Une enquête I¨PSOS montre que 90% des français est aujourd'hui prête à privilégier , à qualité équivalente, les produits issus du commerce équitable. Surtout la quasi-totalité d'entre eux (86%) consisteraient dans ce choix, tout en sachant que les produits issus du commerce équitable sont parfois un peu plus chers afin d'offrir au producteur un prix plus " juste ".

L'image des grandes sociétés françaises, mesurée par IPSOS dans son baromètre mensuel, illustre cette réalité .

L'image des sociétés

Depuis la catastrophe écologique crée par le naufrage de l'Erika, Total-Elf-Fina ne parvient pas à recouvrer une image positive auprès des Français. Le groupe pétrolier, qui souffre également des multiples rebondissements de la tentaculaire "affaire Elf", encaisse avec l'explosion de l'usine AZF à Toulouse un nouveau coup dur : l'indice d'image (*) chute de 13 points, pour se situer aujourd'hui à un niveau de loin jamais atteint par aucune des 30 entreprises testées depuis deux ans : -40. Deux Français sur trois ont aujourd'hui une "mauvaise image" du groupe, contre seulement 26% d'avis contraire, soit là encore des niveaux records. Même le Crédit Lyonnais, pourtant habitué à l'impopularité, n'a jamais été mesuré aussi bas. Cette banque retrouve d'ailleurs ce mois-ci, grâce à une progression de sept points, un solde d'image à nouveau positif (43% de bonne image contre 42% de mauvaise).

Par contre, Ancien mal classé, Danone sort de manière spectaculaire, de la zone rouge. L'avant dernière place enregistrée en septembre dernier, consécutivement aux polémiques ayant entourées la vague de licenciements dans certaines usines du groupe (Lu), est déjà un mauvais souvenir pour le géant de l'agroalimentaire.

Même si Danone est encore loin des hauts niveaux de popularité enregistrés en début d'année, son indice d'image se redresse fortement (+29 points, soit la plus forte progression du baromètre). Avec 57% de bonnes images contre 34% de mauvaises, la firme retrouve un solde d'opinion largement positif.

La forte notoriété de la marque et son investissement très ancien en faveur d'un développement respectueux de l'environnement, de la qualité de vie et de la santé expliquent cette remontée rapide. En outre, Danone demeure considérée historiquement comme une entreprise en avance sur les questions sociales tant par le discours de ses patrons successifs que la par la politique sociale conduite par l'entreprise en son sein. Danone, malgré l'épisode " Lu ", est considérée comme une entreprise socialement responsable. La qualité du plan social proposé en l'espèce le démontre également.

La bonne performance réalisée par Air France est également à relever. La compagnie aérienne, qui n'a pas, contrairement à bon nombre de ses concurrents, annoncé de lourdes restructurations et de licenciements suite aux évènements du 11 septembre, profite peut-être aussi de l'impact médiatique de la remise en service du Concorde, pour progresser de 13 points en terme d'indice. Deux Français sur trois ont à nouveau une bonne image du transporteur aérien (contre 28% d'avis contraire).

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