Observatoire Sociétal des Cancers : de profondes inégalités face aux soins de support

Dans la continuité des études produites depuis 2011, l’Observatoire sociétal des cancers s’est cette fois intéressé à la prise en charge des conséquences du cancer, notamment à l’accès aux soins de support (l'ensemble des soins et soutiens nécessaires aux personnes malades pendant et après la maladie, en complément du traitement) et à l’accompagnement social (droits, aides financières, vie professionnelle...).

Auteur(s)
  • Adeline Merceron Responsable d'activité santé - Département Public Affairs
  • Etienne Mercier Directeur Opinion et Santé - Public Affairs
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Le constat inquiétant révèle de grandes disparités de prise en charge et de suivi chez les personnes qui vivent avec les conséquences d’un cancer ou des traitements (physiques, psychologiques, sociales). Plus de la moitié ont observé un manque de coordination entre les professionnels, pourtant primordiale pour l’orientation vers des soins de support qui améliorent vraiment la qualité de vie. Le manque d’offre sur certains territoires, le manque d’effectifs, ou encore les problèmes financiers peuvent également entraver une prise en charge adéquate des conséquences du cancer: 19% des participants qui n’ont pas consulté l’ensemble des professionnels recommandés y ont renoncé pour des raisons financières ou d’accessibilité géographique.

Si la Ligue alerte depuis de nombreuses années sur les inégalités face au cancer et à ses conséquences, elle révèle qu’elles persistent quant à la prise en charge de celles-ci pendant de nombreuses années et demande aux pouvoirs publics d’agir pour garantir à tous l’égalité de soin et d’accompagnement.

Un accès aux soins de support encore très inégal

Même si le recours aux soins de supports est en moyenne assez répandu et conseillé, les inégalités persistent.

  • Parmi les personnes qui ressentent des douleurs chroniques, 61% ont été orientées vers un kinésithérapeute. En revanche, seules 26% des personnes qui souffrent de fatigue chronique sont orientées vers l’activité physique adaptée, alors qu’il s’agit du traitement le plus efficace.

  • 24% des personnes, malgré leurs séquelles, n’ont été orientées vers aucun soin de support depuis le début de leur parcours : ce sont en particulier les personnes peu diplômées et qui résident dans les territoires où l’offre de soins de premier recours est peu dense.

  • 19% des personnes qui ont été orientées vers des professionnels des soins de support ont renoncé à consulter pour des raisons financières ou d’accessibilité géographique.

Un plus grand renoncement aux soins de support en cas d'inaccessibilité géographique, financière ou par manque d'information

 

Les personnes susceptibles de renoncer davantage aux soins de support sont plus systématiquement des jeunes, des personnes dont les parcours de soins sont complexes, dont les revenus sont faibles et qui résident dans les territoires où il y a peu d’offre de soins de premier recours.

Concernant l’accompagnement social, la situation est encore plus compliquée : parmi les personnes qui témoignent de craintes vis-à-vis de leur emploi ou de leur budget, plus de la moitié (51%) n’ont pas été orientées vers un médecin du travail, un travailleur social, un professionnel médico-social ou de conseil.

Manque de coordination entre les professionnels et déserts médicaux

Les personnes qui présentent des conséquences du cancer ou des traitements ont besoin d’être soutenues et accompagnées. Ainsi, la coordination entre les intervenants du parcours de soins est un gage essentiel de qualité de la prise en charge. Or, 53% des participants qui présentent des conséquences du cancer ou des traitements ont ressenti au moins un manque de coordination entre les professionnels qui les accompagnent.

Un plus grand renoncement aux soins de support quand la coordination entre les professionnels est fragile

 

Les personnes qui ressentent un fort manque de coordination entre les professionnels qui les accompagnent – notamment parce que ces derniers sont en sous-effectifs - sont également celles qui renoncent le plus aux soins de support pour raisons d’accessibilité financière ou géographique.

La disponibilité de l’offre de soins (médecins libéraux et autres professionnels soignants, établissements de santé) d'un territoire a une grande influence sur l’accès aux soins de supports. En effet, si les professionnels sont présents, disponibles et qu’ils se coordonnent, ils prendront le temps d’orienter leurs patients vers des spécialistes des soins de support. En revanche, dans les territoires où l’accès aux soins est plus compliqué (déserts médicaux), les conseils font défaut.


La crise sanitaire : facteur aggravant des inégalités territoriales

L’étude montre que, dans les départements plus fortement touchés par les vagues successives de COVID-19, le taux de satisfaction vis-à-vis de la prise en charge des personnes atteintes de cancer est moins élevé qu’à l’échelle de l’ensemble des participants.
Ainsi, les départements de l’est de la France, la Guadeloupe et la Martinique sont ceux qui ont le plus cumulé les effectifs de décès liés à la COVID-19 : on y observe un taux de satisfaction compris entre 76 et 82%, soit une satisfaction plus faible que la moyenne de l’ensemble de l’échantillon située à 94%. Dans ces territoires, la saturation du système de santé liée à l’ampleur de la pandémie explique certainement que les personnes atteintes de cancer se soient senties moins bien accompagnées.


De plus en plus de personnes sont touchées par le cancer et vivent donc avec ses conséquences

Selon les dernières estimations, 3,8 millions de personnes de 15 ans ou plus en France ont connu l’expérience d’un cancer au cours de leur vie[1]. Ce chiffre augmente, ce qui signifie qu’un nombre croissant de personnes doivent vivre avec des conséquences dues à leur cancer ou aux traitements.
84% des personnes ayant eu un cancer, quelle que soit l’ancienneté du diagnostic, ressentent au moins une conséquence physique ou psychologique en lien avec la maladie ou ses traitements. Une nouvelle fois, on observe que certains profils sont plus susceptibles de ressentir de nombreuses et fortes conséquences physiques et psychologiques que d’autres : les femmes, les personnes dont les revenus sont inférieurs à 2 500 euros, celles dont le parcours de soins a été complexe...

Tout ce qui est psychologie, les troubles de l’humeur, c’est toujours là. Et une chose qui ne s’arrange toujours pas, c’est la douleur, la douleur au niveau du bras, la douleur au niveau de la cicatrice. Ça, je l’ai toujours eu en permanence et ça fait 10 ans.

- Extrait d’un entretien réalisé avec Mme B., atteinte d’un cancer du sein (diagnostiquée en 2010)

Les conséquences physiques ou psychologiques du cancer : 3,8 millions de personnes potentiellement concernées

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A propos de la ligue contre le cancer

1er financeur associatif indépendant de la recherche contre le cancer, la Ligue contre le cancer est une organisation non- gouvernementale indépendante reposant sur la générosité du public et sur l’engagement de ses militants.

Forte de plus de 500 000 adhérents et 20 000 bénévoles, la Ligue est un mouvement populaire organisé en une fédération de 103 Comités départementaux. Ensemble, ils luttent dans quatre directions complémentaires : chercher pour guérir, prévenir pour protéger, accompagner pour aider, mobiliser pour agir.

Aujourd’hui, la Ligue, fait de la lutte contre le cancer un enjeu sociétal rassemblant le plus grand nombre possible d’acteurs sanitaires mais aussi économiques, sociaux ou politiques sur tous les territoires. En brisant les tabous et les peurs, la Ligue contribue au changement de l’image du cancer et de ceux qui en sont atteints.

Pour en savoir plus : www.ligue-cancer.net


A propos de cette enquête

Sondage mené par Ipsos pour la Ligue contre le cancer auprès de 7709 personnes soignées ou ayant été soignées pour un cancer

Auteur(s)
  • Adeline Merceron Responsable d'activité santé - Département Public Affairs
  • Etienne Mercier Directeur Opinion et Santé - Public Affairs

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