Prostitution : 71% des Français hostiles à l’abrogation de la loi pénalisant les clients
Alors que le conseil constitutionnel doit se pencher demain mardi sur un recours formulé contre les dispositions de la loi de 2016 pénalisant les clients des personnes prostituées, Ipsos a interrogé pour CAP International plus de 1000 Français sur la manière dont ils perçoivent cette loi et la prostitution de manière générale. Notre enquête révèle que 71% des Français se montrent hostiles à une abrogation de la loi de 2016. 78% estiment que cette loi est une bonne chose, et parmi une série de mesures proposées pour lutter contre la vulnérabilité des personnes prostituées, seuls 4% considèrent qu’abroger la loi de 2016 est la réponse la plus efficace.
Article de Pascale Égré initialement publié sur Le Parisien
Réalisé par Ipsos pour CAP-international, une coalition pour l’abolition de la prostitution regroupant 28 associations dans 22 pays (dont le Mouvement du Nid en France), ce sondage dévoilé en exclusivité par Le Parisien – Aujourd’hui en France s’intéresse au regard des Français sur la loi de 2016 renforçant « la lutte contre le système prostitutionnel ».
À 78 %, les sondés considèrent cette loi qui prévoit la sanction des clients – et non plus des personnes prostituées, auparavant passibles de poursuites pour racolage – et l’accompagnement social de celles-ci comme « une bonne chose ». « L’esprit de la loi, qui fait passer la charge pénale des personnes prostituées vers les clients, est validé », commente Grégoire Théry, délégué général de Cap et porte-parole du Mouvement du Nid.
Un écart hommes/femmes dans les résultats
Le sondage aborde aussi directement le thème de la question prioritaire de constitutionnalité débattue ce mardi devant les Sages du Conseil constitutionnel : l’abrogation de la loi au nom de la liberté d’entreprendre et de la vulnérabilité accrue des personnes prostituées. Un quart des interrogés (24 %) ne partagent pas cette analyse et s’opposent à l’abrogation. Près de la moitié (47 %) « comprend (ces) arguments », mais estime qu’« ils ne justifient pas » d’abroger la loi. Au total donc, les deux tiers des sondés y sont défavorables (71 %). En revanche, 29 % se prononcent en faveur de l’abrogation du texte et ne veulent plus que le client soit sanctionné - une proportion qui monte à 40 % chez les hommes contre 20 % chez les femmes.
L’écart hommes/femmes apparaît nettement dans ce sondage, notamment sur la perception de la prostitution : elle est « une violence » pour 66 % des hommes contre 81 % des femmes. 61 % des hommes, et 79 % des femmes, valident l’idée qu’« il ne devrait pas être possible d’acheter l’accès au corps et à la sexualité d’autrui ». Enfin, 33 % des hommes contre 22 % des femmes considèrent que la prostitution « est un travail comme un autre » - 27 % au total, contre une large majorité de 73 % en désaccord.
« S’il est difficile de mesurer une évolution des mentalités, ce sondage montre toutefois que les Français sont sortis du mythe de la prostitution comme plus vieux métier du monde », relève Grégoire Théry. Ainsi, 54 % des sondés estiment « important » de lutter contre ce phénomène, 31 % « urgent ».