Quand les Européens sont au volant...

Il y a un an, Ipsos et la Fondation VINCI Autoroutes mettaient en place le Baromètre européen de la conduite responsable afin de contribuer à la lutte contre l’insécurité routière en incitant les conducteurs européens à rouler « autrement » et être les acteurs de leur propre sécurité et celle des autres. En ce début d’année, l’annonce de la hausse du nombre de victimes de la violence routière en France doit inciter à s’interroger sur la diffusion de comportements dangereux sur la route. Quels sont les pratiques à risque qui progressent ? Et celles qui reculent ? Les Européens prennent-ils conscience des dangers de l’hypovigilance ? Et de manière générale, leurs sentiments à l’égard de la violence routière ont-ils évolués ? Les Européens se montrent-ils plus fatalistes ? Ou au contraire convaincus qu’il existe des solutions ? 

Auteur(s)
  • Etienne Mercier Directeur Opinion et Santé - Public Affairs
  • Amandine Lama Directrice de Clientèle, Département Politique et Opinion, Public Affairs
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FACE A LA VIOLENCE ROUTIERE, UN FATALISME EN AUGMENTATION

Après plusieurs années de recul du nombre de victimes d’accidents de la route (12 ans de baisse continue dans le cas de la France), certains pays européens comme la France voient le nombre annuel de décès sur la route augmenter à nouveau.

D’ailleurs, si une majorité d’Européens considère toujours que le nombre de personnes tuées peut encore baisser de façon très importante dans les prochaines années (55%), ce sentiment est en baisse dans 6 des 7 pays déjà sondés en 2014. Seuls les Britanniques se montrent davantage persuadés que l’année dernière qu’il est possible de faire encore baisser de manière importante le nombre de victimes (51% ; +2).

Partout ailleurs, le fatalisme progresse. Dans l’ensemble des 10 pays sondés, ce sont 45% des Européens qui considèrent qu’il sera difficile de faire baisser beaucoup plus le nombre de personnes tuées, la route étant nécessairement dangereuse. Le sentiment d’avoir atteint un plancher en 2013 est partagé par de nombreux Européens, en tête desquels les Allemands (58% soit +3 points par rapport à l’année dernière considèrent qu’il sera difficile de faire baisser de manière importante le nombre de victimes). Ce sentiment est également majoritairement partagé par les ressortissants de deux autres pays où la mortalité par accident de la route est pourtant parmi les plus élevées en Europe (1) : la Grèce (57% pensent qu’il sera difficile de diminuer le nombre de victimes) et la Pologne (53%).

DES CAUSES D’ACCIDENTS MULTIPLES : LE DANGER DE L’ALCOOL AU VOLANT NE DOIT PAS FAIRE OUBLIER LES AUTRES FACTEURS DE RISQUE

Pour diminuer encore le nombre de victimes de la violence routière, les Européens ont conscience qu’il faut agir sur plusieurs plans. Les accidents et la gravité de leurs conséquences s’expliquent d’ailleurs souvent par une combinaison de facteurs.

Quand il s’agit de désigner les comportements les plus risqués au volant, l’impact des grandes campagnes de prévention sur les effets de l’alcool sur la conduite est tangible.

Aux yeux des Européens, conduire en ayant bu plus que la limite autorisée est en effet le comportement le plus risqué au volant (59% le citent parmi les deux plus dangereux), davantage même que la conduite sous l’emprise de stupéfiants (36% de citations) dont on entend moins parler, et qu’on estime sans doute dans le même temps moins fréquente que la conduite en état d’ébriété.

Seuls les Italiens considèrent la conduite sous l’emprise de stupéfiants plus risquée que l’alcool (56% contre 45%). C’est en revanche au Pays-Bas, pays dans lequel la consommation de cannabis est tolérée, que l’on cite le moins l’usage de stupéfiants comme un comportement particulièrement risqué au volant (19%). Pourtant, conduire après avoir consommé du cannabis multiplierait par 2 le risque d’être responsable d’un accident mortel. Ce risque serait même multiplié par 14 en cas de consommation conjointe de cannabis et d’alcool (2).

Quant au fait de conduire en ayant pris des médicaments qui altèrent la vigilance, il s’agit du comportement jugé le moins risqué (seuls 6% le citent parmi les 2 plus risqués), soit moins que de tourner ou déboîter sans mettre son clignotant (8%). Les Italiens apparaissent sur ce point encore un peu plus sensibilisés que la moyenne (11% de citations).

Interrogés sur les principales causes d’accidents mortels (et non pas seulement les comportements les plus à risque), les Européens désignent à nouveau en premier lieu la conduite sous l’emprise d’alcool ou de stupéfiants.

Pour 62%, il s’agit de l’une des principales causes d’accidents mortels sur les routes de leur pays. Les Français (78%) et les Polonais (77%) sont les plus nombreux à mettre en avant cette cause.

En revanche, lorsque les Européens se prononcent sur les principales causes d’accidents mortels sur autoroute, l’alcool et les stupéfiants sont le facteur le moins cité. Les Français y restent néanmoins plus sensibilisés que la moyenne des Européens (32% contre 25%).

Les campagnes de prévention sur les dangers de l’hypovigilance semblent également produire des effets. Les risques liés à l’inattention (notamment liée à l’usage du téléphone portable) sont plus souvent cette année soulignés par les répondants : il s’agit de la 2ème cause d’accidents mortels la plus citée (53% la considèrent comme l’une des causes principales d’accidents mortels sur les routes de leur pays). Les citations progressent dans tous les pays déjà sondés l’année dernière, à l’exception de l’Italie dont les résultats restent néanmoins dans la moyenne (54% ; -1).

Envoyer des SMS en conduisant apparait notamment comme un comportement des plus risqués (29% la citent parmi les deux comportements les plus risqués au volant), juste après la conduite sous l’emprise d’alcool ou de stupéfiants (36%), et avant même le dépassement des limitations de vitesse (25%). Dans plusieurs pays, l’envoi de SMS en conduisant est même jugé plus dangereux que la conduite sous l’emprise de stupéfiants (sans doute en partie car il est jugé plus fréquent) : en Grande-Bretagne (42% citent l’envoi de SMS comme un comportement des plus risqués contre 23% pour la conduite sous l’emprise de stupéfiants) et au Pays-Bas (37% citent les SMS contre seulement 19% les stupéfiants soit le plus faible niveau observé).

L’inattention est un peu moins perçue comme une cause majeure d’accidents sur autoroute (30%), où elle est devancée par son corolaire : la somnolence. Cette dernière est citée par 40% des Européens, ce qui en fait la 2ème cause d’accidents mortels sur les autoroutes à leurs yeux. Les Français se montrent sur ce point particulièrement sensibilisés, avec 56% qui la considèrent comme une cause majeure d’accidents sur autoroutes.  Mais sur les routes en général, il s’agit de la cause d’accidents mortels la moins citée : seulement 8% la citent. D’ailleurs, la conduite en état de fatigue ou de manque de sommeil est peu citée parmi les comportements les plus risqués au volant (seulement 18%). Sa dangerosité est sans doute encore sous-estimée.

L’attention croissante portée aux dangers de l’alcool au volant et à l’hypovigilance ne doit pas faire oublier l’une des causes majeures d’accidents mortels : la vitesse. En effet, dans un pays comme la France, elle serait responsable d’au moins 1 accident mortel sur 4 (3).

Or dépasser les limitations de vitesse n’arrive qu’en 4ème position des comportements considérés comme les plus risqués au volant, derrière l’alcool, les stupéfiants et l’envoi de SMS.  Surtout, le niveau de citations est extrêmement variable d’un pays à l’autre. La France et la Suède sont les pays où le dépassement des limites de vitesse fait l’objet d’une moins forte sensibilisation : seuls 13% des Français et 11% des Suédois le considèrent comme l’un des comportements les plus dangereux. Les pays dans lesquels on souligne au contraire le plus le risque de la vitesse excessive sont la Pologne (44% de citations), la Grèce (39%), mais aussi… l’Allemagne (30%). Dans un pays où l’on rechigne parfois à communiquer sur les accidents mortels liés à la vitesse (4) et dont l’on vante la sûreté des autoroutes sans limitations, les répondants sont néanmoins conscients de la dangerosité de la vitesse excessive.

Notons par ailleurs que si la vitesse excessive reste aux yeux des répondants la première cause d’accidents mortels sur autoroute (42%), les citations sont en recul dans tous les pays déjà sondés en 2014. La baisse du niveau de citations est particulièrement nette en Suède (31% de citations seulement ; -7), en Italie (46% ;-7) et en Espagne (43% ; -6). Les Allemands restent quant à eux contre toute attente les plus sensibilisés sur ce sujet (57% ;-2 malgré tout).

SUR LES ROUTES, L’ENFER, C’EST TOUJOURS LES AUTRES

Interrogés sur leurs qualités de conducteur, les Européens s’accordent volontiers de très bonnes notes : 7,7 / 10 en moyenne, les notes étant dans chaque pays extrêmement stables par rapport à l’année dernière. Les Grecs et les Italiens sont ceux qui s’estiment les meilleurs (8/10 en moyenne), les Polonais étant quant à eux les plus modestes (7,2/10). Les hommes se considèrent volontiers un peu meilleurs conducteurs (7,9/10) que les femmes (7,6/10). Les Européens de 35 ans et plus (7,8/10) se jugent également plus capables que les moins de 35 ans (7,5/10), moins expérimentés mais aussi particulièrement concernés par l’utilisation d’objets connectés au volant.

Mais quel que soit le pays ou la catégorie de population considérée, le même sentiment domine : tous ont le sentiment d’être de bons conducteurs.

D’ailleurs, invités à décrire par deux adjectifs leur attitude au volant, les conducteurs européens n’hésitent pas à se faire des compliments : 98% d’entre eux citent au moins une attitude positive. Ils seraient vigilants (77%), calmes (54%), courtois (26%) et conscients de leur vulnérabilité (6%). Seuls 12% avouent dans le même temps au moins un trait de caractère négatif : 9% concèdent qu’ils sont stressés, 3% agressifs et seulement 1% irresponsables. Moins d’1% se jugent dangereux.
Mais qui sont donc les mauvais conducteurs ?

Sans aucun doute pour les Européens, les mauvais conducteurs, ce sont les autres. Lorsqu’ils décrivent le comportement de leurs compatriotes au volant, seuls 34% emploient au moins un adjectif positif. Ils sont beaucoup moins nombreux que lorsqu’ils se jugent eux-mêmes à considérer les autres vigilants (16%), calmes (12%) ou courtois (10%). Surtout, 83% des Européens emploient au moins un adjectif négatif pour décrire l’attitude de leurs compatriotes. Ils sont selon eux irresponsables (44%), stressés (38%), agressifs (30%) et/ou même dangereux (26%). Les plus critiques sont les Grecs qui emploient à 97% des qualificatifs négatifs pour décrire la conduite de leurs compatriotes. Parmi eux, 40% estiment même que les autres sont dangereux, un record. La palme de l’irresponsabilité est quant à elle décernée aux Polonais (65%), celle de l’agressivité aux Britanniques (36%) et celle du stress au volant… aux Suédois (58%), pourtant considérés par les Européens comme les conducteurs les plus responsables.

LA SUEDE, PATRIE DES CONDUCTEURS RESPONSABLES ?

Interrogés sur le pays dans lequel les conducteurs se montrent les plus responsables, les Européens donnent la première place à la Suède (37% de citations). De leur côté, les Suédois, même s’ils considèrent leurs compatriotes particulièrement stressés au volant, jugent aussi être le pays modèle en matière de conduite responsable (59% de citations).

L’Allemagne est en deuxième position, avec 27% de citations. Elle arrive même en 1er pour les Espagnols, les Grecs et les Polonais, sans doute plus habitués à voir des conducteurs allemands sur leurs routes que des ressortissants suédois.

La Grande-Bretagne et les Pays-Bas viennent ensuite (11% de citations chacun), suivis de la Belgique (4%) et de la France (3%). Les Européens du Sud et de l’Est sont bons derniers : l’Espagne (2%), l’Italie (1%), la Grèce (1%) ou encore la Pologne (1%).  Dans ces pays, les citations ne dépassent pas 10% même quand on juge son propre pays.

La bonne réputation des Suédois est-elle méritée ? Pas totalement. En effet, sur 13 comportements dangereux testés (allant de l’usage du téléphone au volant au fait de circuler sur la bande d’arrêt d’urgence),  les Suédois avouent en moyenne 5,4 pratiques dangereuses, soit autant que la moyenne européenne (5,3/13). Britanniques, Hollandais, Français et Espagnols se montreraient en réalité plus responsables au volant, avec un nombre moyen de pratiques à risque inférieur à la moyenne. Les Suédois sont même les plus nombreux à reconnaître qu’il leur arrive de dépasser de quelques km/h la limitation de vitesse indiquée (95% ; +8 points par rapport à l’année dernière).

Les Suédois sont également plus nombreux que la moyenne à avouer ne pas respecter les distances de sécurité (75% ; +4), à téléphoner au volant sans kit mains libres (48% ; +2) ou à envoyer des SMS/mails tout en conduisant (29% ; +3). Surtout, l’ensemble de ces mauvaises habitudes sont en progression.

Les Allemands, qui talonnent les Suédois en matière de bonne réputation au volant, ne font pas véritablement mieux : ils avouent 5,5 comportements à risque en moyenne, et sont les champions européens du paramétrage de GPS en conduisant (51% ;+3) et de la lecture de documents papier au volant : carte, journal… (15% ;-2).

LA MAUVAISE REPUTATION DES ITALIENS AU VOLANT, PAS TOTALEMENT MERITEE

Quant à la patrie des conducteurs les plus irresponsables, il s’agirait de l’Italie (31% de citations). Les Italiens sont d’ailleurs tout à fait prêts à le reconnaître (58% d’entre eux citent leur propre pays comme étant celui où les comportements sont les moins bons). Ils sont suivis par les Grecs (20%), eux-mêmes très critiques à l’égard de la conduite dans leur pays (61% des Grecs désignent la Grèce comme le pays où les conducteurs se montrent les moins responsables). La Pologne arrive quant à elle en troisième position de ce palmarès de l’irresponsabilité au volant, avec 16% de citations. Les plus critiques à son égard sont les Polonais eux-mêmes (44%) mais aussi les Hollandais (34%) qui les jugent encore plus irresponsables que les Italiens. La France et l’Espagne arrivent quant à elles en 4ème position, avec 8% de citations chacune.

En dépit de leur mauvaise réputation, les Italiens déclarent un nombre moyen de mauvais comportements au volant à peine au dessus de la moyenne européenne (5,5 pratiques risquées contre 5,3 en moyenne), soit bien moins que les Grecs (6,2) et les Polonais (5,8).

Sur l’ensemble des comportements dangereux testés, les Italiens ne sont jamais les plus mauvais élèves. Dans le classement des mauvaises habitudes au volant, les Grecs en revanche se trouvent souvent sur la plus haute marche du podium : ils sont ainsi les plus nombreux à téléphoner au volant, avec kit mains libres (67%), à circuler sur autoroute sur la voie du milieu alors que la voie de droite est libre (76%), voire même sur la bande d’arrêt d’urgence (28%).

Ils sont également de loin les plus nombreux à avouer conduire en oubliant de s’attacher (49%). Le port de la ceinture est pourtant obligatoire en Grèce pour tous les occupants d’une voiture. Or d’après l’OMS, le taux de port de la ceinture de sécurité en Grèce n’est que de 75% à l’avant du véhicule et seulement 42% à l’arrière (contre 98% à l’avant et 83% à l’arrière en France) (5).

Enfin, les Grecs sont les plus nombreux à avouer conduire sous l’emprise de l’alcool : 13% admettent qu’il leur arrive de le faire alors même qu’ils ressentent les effets sur leur état physique et leurs perceptions, et 29% lorsqu’ils ne le ressentent pas. En matière d’alcool au volant, les Grecs sont de loin les plus mauvais élèves. Ils ne s’interdisent de conduire qu’à partir de 3 verres d’alcool en moyenne, contre 2,1 pour l’ensemble des Européens interrogés. Pourtant, la Grèce interdit la conduite avec plus de 0,5 g/l de sang, soit 2 verres d’alcool.

Ils sont aussi les plus nombreux à déclarer prendre parfois la route alors qu’ils sont très fatigués (56%). D’ailleurs, la Grèce est le pays dont les habitants sont les plus nombreux à dormir 6h ou moins par semaine (contre 26% en moyenne), alors que la durée recommandée est de 7h à 8h de sommeil.

Quant aux Polonais, s’ils sont moins stigmatisés que les Italiens par les autres Européens, ils sont pourtant souvent plus nombreux que la moyenne (et que les Italiens) à adopter des comportements dangereux, en particulier en ce qui concerne les objets connectés. Les Polonais sont en effet les Européens qui utilisent le plus leur téléphone au volant, sans kit mains libres (59%) et qui signalent le plus aux autres conducteurs via leur smartphone ou autre un événement (accident, ralentissement…) tout en conduisant (24%).

Les Polonais sont presqu’aussi nombreux que les Grecs à avouer qu’il leur arrive de prendre le volant alors qu’ils sont très fatigués (55%) et sont d’ailleurs juste derrière les Grecs en matière de déficit de sommeil (30% des Polonais dorment 6h ou mois par nuit en semaine).

Ils se montrent en revanche plus responsables que les Grecs en matière d’alcool au volant : seuls 3% d’entre eux avouent qu’il leur arrive de prendre le volant en ayant trop bu. Il faut rappeler que la règlementation en Pologne est à ce sujet parmi les plus strictes : 0,2 g/l de sang maximum. Si les Polonais s’interdisent de prendre le volant à partir de 1,6 verre en moyenne (contre 2,1 pour la moyenne des Européens), ils sont déjà au dessus du maximum autorisé par leur réglementation nationale.

INCIVILITE AU VOLANT : LES ITALIENS NE SONT PAS NON PLUS LES CONDUCTEURS LES PLUS AGRESSIFS

L’incivilité au volant est un mal très répandu : 80% des Européens déclarent ainsi qu’il leur arrive d’avoir peur du comportement agressif du comportement d’un autre conducteur. Ce sentiment est très largement majoritaire quel que soit le pays considéré, les Européens les plus inquiets étant les Espagnols (87%), juste devant les Grecs (86%) et les Français (86%).

Le comportement incivil le plus courant au volant est le fait d’injurier les autres conducteurs : 56% des Européens reconnaissent le faire au moins de temps en temps, les champions en la matière étant non pas les Italiens (63% le font) mais les Grecs qui au volant semblent avoir l’insulte facile (74%). Les Suédois restent quant à eux les Européens qui profèrent le moins d’injures (30% ; +2 points néanmoins par rapport à l’année dernière).

L’usage intempestif du klaxon est le deuxième comportement incivique le plus répandu chez les conducteurs européens (47%), plus particulièrement les Européens du Sud, Espagnols en tête (64% ; +1), devant les Grecs (60%) et les Italiens (58% ; +3).

Quant au fait de coller délibérément le véhicule d’un conducteur qui nous énerve, au mépris des recommandations en matière de distance de sécurité, il s’agit d’un comportement adopté par près d’un tiers des Européens (32%), les spécialistes étant les Grecs (49%).

Enfin, 15% des Européens n’hésitent pas à descendre de leur véhicule pour s’expliquer avec un autre conducteur. En la matière, les Européens du Sud ne sont pas ceux qui ont le sang le plus chaud. Ce sont les Polonais qui avouent le plus ce type de comportement (25%), devant les Grecs (21%), les Italiens (21%) et les Espagnols (19%).

Si les Européens du Nord semblent dans l’ensemble moins enclins à se laisser aller à ce type d’incivilités, ils ne sont pas exempts de tout reproche : les Hollandais sont ainsi les plus nombreux à doubler à droite sur l’autoroute (43% contre 20% des Italiens qui sur ce point sont les meilleurs élèves).

Si ces incivilités au volant restent un peu plus souvent le fait des hommes et des conducteurs les plus jeunes, les différences entre hommes et femmes semblent s’atténuer chez les nouvelles générations, les jeunes femmes adoptant les plus mauvais des comportements des garçons tels que proférer des injures (61% des femmes de moins de 35 ans le font, contre 49% de leurs aînées) ou coller un véhicule qui les énerve (34% le font contre 23%). Descendre de son véhicule pour s’expliquer avec un autre conducteur reste un comportement plutôt masculin (22% des jeunes hommes le font), mais certaines jeunes femmes n’hésitent plus à les imiter (13%).

HYPOVIGILANCE : UNE CONSCIENCE DU DANGER ACCRUE, MAIS DES COMPORTEMENTS A RISQUE TOUJOURS TROP FREQUENTS

Si les Européens ont conscience que l’inattention ou même la somnolence sont un facteur important d’accident mortel, leurs comportements sont encore trop souvent à risque en la matière.

Près d’un Européen sur trois considère en effet qu’on peut conduire alors qu’on est fatigué (31%).

Les Polonais sont même une majorité à le penser (52%). Ils sont d’ailleurs les Européens qui conduisent le plus longtemps sans faire de pause (4h10 en moyenne contre 3h15 pour l’ensemble des conducteurs européens, une durée déjà bien supérieure aux 2 heures maximum recommandées).

Les Allemands sont quant à eux ceux qui déclarent le plus massivement qu’il ne faut jamais conduire en état de fatigue (82% le pensent). Pourtant, ils sont les plus nombreux en Europe à reconnaître s’être déjà sentis très fatigués mais avoir continué parce qu’ils y étaient contraints (55%). Les Allemands sont d’ailleurs, après les Polonais, les Européens qui conduisent le plus longtemps sans s’arrêter : 3h48 en moyenne. Conséquence de ces pratiques, l’Allemagne détient le record du nombre de conducteurs ayant déjà eu l’impression de s’être assoupis quelques secondes au volant (33% contre 25% en moyenne).

Les Allemands, comme le reste des Européens, sont pourtant très majoritairement conscients qu’une sieste est un moyen efficace de lutter contre la somnolence au volant (80% ; 81% pour la moyenne européenne). Mais ils peinent, comme les autres conducteurs européens, à mettre cette recommandation en pratique, trop souvent convaincus qu’il existe d’autres moyens de lutter contre l’hypovigilance. Ainsi, seuls 57% des Européens s’arrêtent ne serait-ce que rarement pour faire une sieste ou cours d’un long trajet en voiture, les Grecs étant les moins nombreux à le faire (36%).

Les Européens sont un peu plus nombreux à déclarer changer de conducteur au cours d’un long trajet (70% dont seulement 14% qui le font « souvent »). Les Grecs sont là encore les moins nombreux à adopter ce bon comportement (62%).

Si les Européens peinent à adopter les bons comportements en matière de lutte contre la somnolence au volant, c’est en partie parce que les idées reçues sont légion dans ce domaine. Une majorité d’Européens est en effet convaincue que chacun des moyens suivants est efficace pour lutter contre l’endormissement au volant : discuter avec un passager pour maintenir son attention (79%), boire du café (64%), mettre de la musique dans la voiture ou écouter les informations à la radio (59%) ou conduire la fenêtre ouverte (58%). Certains suggèrent même de grignoter (36% ; 60% des Hollandais) ou, plus surprenant encore, de téléphoner au volant (10% ; 15% en Italie et en Suède).

Convaincus de pouvoir lutter contre l’hypovigilance par divers stratagèmes, les Européens n’hésitent pas à adopter des comportements à risque lors de départs pour de longs trajets en voiture : 81% se couchent plus tard ou se lèvent plus tôt que d’habitude (88% en Pologne où le déficit de sommeil est déjà le plus important), 75% finissent leurs préparatifs de départ tard dans la soirée avant le départ (88% en Grèce) et 67% n’hésitent pas à partir de nuit (78% en Pologne ; 77% en Allemagne).

(1) Nombre de victimes de la route par million d’habitants
(2) Cf. Association Prévention Routière : http://www.preventionroutiere.asso.fr/Nos-publications/Statistiques-d-accidents/Principaux-facteurs-d-accidents
(3) Cf. Association Prévention Routière d’après les estimations des forces de l’ordre pour 2012 : http://www.preventionroutiere.asso.fr/Nos-publications/Statistiques-d-accidents/Principaux-facteurs-d-accidents
(4) Cf. http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2014/04/07/01016-20140407ARTFIG00234-l8216allemagne-tait-le-nombre-d-accidents-sur-les-autoroutes-a-vitesse-libre.php
(5) Cf. Rapport de l’OMS sur la sécurité routière : http://who.int/violence_injury_prevention/road_safety_status/data/table_a4_fr.pdf

Fiche technique :
Deuxième vague du Baromètre européen de la conduite responsable réalisé sur Internet du 9 au 19 janvier 2015, sur plus de 10 000 Européens dans 10 pays (France, Belgique, Allemagne, Grande-Bretagne, Italie, Espagne, Suède, Pays-Bas, Grèce et Pologne) sur leur comportement au volant. Dans chacun de ces pays, un échantillon représentatif de la population nationale âgée de 15 ans et plus a été interrogé (méthode des quotas). 

Auteur(s)
  • Etienne Mercier Directeur Opinion et Santé - Public Affairs
  • Amandine Lama Directrice de Clientèle, Département Politique et Opinion, Public Affairs

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