Saga Flair : Intelligences Artificielles
L’extension de la robotique, des neurosciences et de l’Intelligence artificielle va poser une question sociale et philosophique, en particulier dans les pays influencés par la culture de la faute et où travailler, c’est être, avoir un statut, appartenir à une classe sociale.
Ici, les repères de tout le système de représentations frémissent, s’inversent ou vacillent, selon les points de vue.
Avec les différentes lois sur la durée du travail, les Européens n’ont jamais eu autant de temps libre. Pourtant, 78% souhaitent ralentir leur rythme de vie (82% en France) et 50% indiquent manquer de temps pour faire ce qu’ils veulent ou doivent faire (60% en France).
Ils risquent d’en avoir encore plus si rien n’est fait pour rattraper le retard entre l’Europe et les GAFAM54 de la Silicon Valley ou les BATX de l’Asie si l’on suit la pensée de Laurent Alexandre : « Nous sommes devenus une colonie numérique et ne progresserons pas si nous continuons à être mauvais, à geindre et à avoir une législation hostile aux industriels. Il faut regarder les choses en face : si nous sommes des crapauds numériques, ce n’est pas à cause d’un complot mondial, ni à cause des Gafa qui tricheraient. C’est parce que les Gafa sont excellents et que nous sommes nuls. », assène-t-il.
Parmi les solutions qu’il recommande, l’apprentissage est décisif : « Il faut améliorer l’école. Le QI moyen en France est de 98, alors qu’il est de 108 à Singapour. Avant, le niveau des Singapouriens était inférieur au nôtre. Mais eux ont modernisé l’école et paient très bien leurs professeurs… Nous faisons le contraire ! Le moment de la petite enfance est déterminant dans le développement des individus : un million de synapses se créent chaque seconde dans le cerveau d’un enfant de trois ans. Il faut des programmes de pointe en matière d’innovation dans l’éducation. »
Pour autant, ne plus travailler, est-ce un déclassement ?
Quand Il les chasse du Paradis, Dieu adresse deux paroles terribles : à Eve, « tu enfanteras dans la douleur », à Adam, « tu mangeras le pain à la sueur de ton visage ». La péridurale a en partie réglé la question pour Eve. Les robots et l’IA vont-ils créer une société de l’Otium, du temps libre, du temps philosophique pour les deux ?
On se souvient que Platon oppose dans De Republica ceux qui ont le temps de penser parce qu’ils ne travaillent pas (ils jouissent du temps libre, l’otium) et ceux qui travaillent, sont dans les « affaires », le monde de l’argent, de l’activité et n’ont pas le loisir de penser (negotium, qui donnera les négociants).
Il bannit donc les seconds de la vie publique, parce que « la nature n’a fait ni cordonnier, ni forgeron ; de pareilles occupations dégradent les gens qui les exercent, vils mercenaires, misérables sans nom qui sont exclus par leur état même des droits politiques. Quant aux marchands accoutumés à mentir et à tromper, on ne les souffrira dans la cité que comme un mal nécessaire ».
IA, robotique et génétique vont-elles créer une société, une philosophie, une vie d’un type nouveau ?
Cours de tai-chi par un robot Nao dans une école élémentaire
La nouvelle alliance homme – machine, par Charlotte Zapfel, Data Scientist chez Ipsos
En quelques mots, où en est-on des Data aujourd’hui ?
La combinaison de l’explosion des volumes de données, de la démultiplication de la puissance de calcul et du développement de nouveaux algorithmes nous a propulsés depuis quelques années déjà dans l’âge d’or de l’IA : un perpétuel mouvement, qui porte la promesse d’une compréhension totale du monde par le biais du web. Or, si l’accès à ces Big Data n’est plus un obstacle technique, leur exploitation reste un challenge encore aujourd’hui. En effet, Internet est un réseau mouvant de territoires, chacun à la fréquentation volatile (voire imprévisible) et aux frontières plus ou moins perméables, où s’expriment autant de facettes de moi que de réseaux que je fréquente. Ainsi, étudier ces data, c’est observer la société à travers un kaléidoscope : la perception des individus est fragmentée mais d’autres informations, telles que la dynamique des communautés, apparaissent distinctement. Pour accéder au Graal qu’est le Big Data, il faut d’abord poser la bonne question au Roi Pêcheur...
Est-il encore utile de faire parler les consommateurs citoyens pour savoir ce qu’ils pensent ou ressentent ?
L’Homme est un animal social. Il met en place des systèmes de signes, écrits ou oraux, pour construire et consolider ses communautés. Le langage est donc essentiel pour accéder à la pensée des consommateurs-citoyens puisque, non seulement il est un vecteur millénaire de communication, mais en plus, il structure la pensée. Dans le roman 1984 d’Orwell, le Parti met en place le Novlang, une langue au vocabulaire réduit qui rend impossible le crime par la pensée, car lorsqu’on n’a plus de mots pour exprimer une idée, alors on cesse d’y penser. C’est pourquoi, pour me comprendre, il faut absolument étudier mes mots et les tournures syntaxiques que j’emploie : ils sont le produit d’une part, inconsciemment, de la somme de mes expériences et d’autre part, consciemment, de ce que je souhaite véhiculer, à la fois sur le sujet de conversation et sur moi-même.
Ce n’est pas la même chose de parler de job, de boulot, de travail, ... Il n’y a pas de synonymes parfaits !
Qui est capable de saisir toutes ces nuances ? L’IA avec les algorithmes ou les humains ?
À l’heure où les études tendent vers des approches de plus en plus holistiques, il est possible de se rendre compte de l’avantage que procure le traitement automatique du langage. Tout d’abord, en partant de la parole du répondant, on limite le biais de l’enquêteur, mais cela permet également d’exploiter de nouvelles sources d’information, non sollicitées, et donc de chercher des réponses à des questions qui ne sont pas posées.
Mais la beauté des méthodes, c’est qu’elles hybrident les intelligences humaine et artificielle en les employant là où elles sont les plus performantes. En effet, la machine peut facilement détecter des patterns pertinents dans un corpus de quelques milliers de verbatim mais c’est l’expert qui, par la somme de son expérience humaine et de ses acquis professionnels, va en extraire la substance et la valoriser pour répondre aux besoins de son client.
La collaboration homme – machine transforme sous nos yeux le secteur de la santé, avec un rôle essentiel des IA, le faire évoluer du curatif au préventif.